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Économie - Focus

L’économie turque à la merci de l’instabilité politico-sécuritaire

Déjà vacillant, le « miracle économique » turc pourrait devenir un lointain souvenir avec les investisseurs qui se détournent toujours plus de la Turquie face au risque sécuritaire et au flou politique.

La Bourse d’Istanbul a perdu près de 20 % depuis le début de l’année, un plongeon plus marqué que dans la plupart des autres pays émergents. Murad Sezer / Reuters

La fin de la trêve entre l'État turc et la rébellion kurde du PKK est un coup dur pour l'économie de la Turquie, qui était déjà dans une passe difficile et subira inévitablement le contrecoup d'une crise politique, estiment des experts. Car l'absence d'accord de gouvernement, près de deux mois après des législatives marquées par la perte de la majorité absolue pour le parti islamo-conservateur au pouvoir AKP, inquiète autant les milieux économiques que des violences surtout concentrées jusque-là dans l'est du pays.
Le tourisme, déjà touché par la désaffection d'une partie du pourtour méditerranéen par les voyagistes, et la balance commerciale devraient en être les principales victimes.
La perspective d'élections anticipées « pèse sur le climat des investissements », prévoit Inan Demir, économiste en chef à la Finansbank. De quoi faire vaciller un peu plus un « miracle économique » turc qui a déjà du plomb dans l'aile...

Le pays a été présenté pendant près d'une décennie comme un des chefs de file des pays émergents, avec un taux de croissance flirtant parfois avec les 10 %. Il s'est vite rétabli après la crise mondiale de 2008 / 2009, mais la mécanique s’essouffle depuis trois ans. Rares sont les indices économiques dont le pouvoir peut désormais se féliciter. La croissance s'est ralentie à 2,4 % l'an dernier et la livre turque s'est massivement dépréciée. Et l'objectif gouvernemental d'une croissance de 4 % pour 2015, déjà revu à la baisse, sera « difficile à atteindre », de l'avis de M. Demir. Quant à la Bourse d'Istanbul, elle a perdu près de 20 % depuis le début de l'année, un plongeon plus marqué que dans la plupart des autres pays émergents.

« Aucune chance d'éclaircie »
Secteur-clé pour l'économie, le tourisme pouvait espérer bénéficier d'un effet report après l'attentat en juin dans un hôtel de touristes en Tunisie. Des tours-opérateurs, notamment allemands, avaient alors indiqué qu'ils redirigeraient certains clients vers la Turquie. Mais ce regain d'intérêt risque d'être de courte durée. En raison des guerres en Syrie et en Irak, deux pays frontaliers, les revenus touristiques de la Turquie ont chuté de près de 9 % durant les six premiers mois de 2015, passant à 12,5 milliards de dollars contre 13,7 milliards pour la même période de l'année précédente, selon des chiffres officiels.

La tendance est la même pour les exportations, tombées à 73,3 milliards de dollars contre 80 milliards en 2014 sur la période janvier-juillet. « Dans la période à venir, il n'y a aucune chance d'une éclaircie sur ces deux points », affirmait lundi l'économiste Güngör Uras dans le journal Milliyet, en évoquant les problèmes du tourisme et de la balance commerciale, déjà chroniquement déficitaire. Pour cet expert respecté, les faiblesses de ces deux secteurs auront aussi « un effet néfaste sur la production industrielle ».
« L'instabilité politique est la chose la plus détestée par les investisseurs étrangers », rappelle l'analyste politique Serkan Demirtas (sans lien avec le leader prokurde Selahhatin Demirtas).
« La Turquie doit son miracle à l'arrivée en masse de liquidités. Si cela n'est plus possible il y a évidemment un risque pour l'économie », ajoute-t-il, en jugeant probable l'organisation de législatives anticipées qui prolongerait l'incertitude.
Le président turc Recep Tayyip Erdogan ne semble toutefois pas s'inquiéter, estimant que la « situation est passagère ».

 

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