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Moyen Orient et Monde - Portrait

De l’importance d’être Ernest Moniz...

Tout le monde retiendra son souffle jusqu'à l'apposition, en principe dans quelques jours, des signatures respectives sur le document d'entente USA-Iran. Quid de ceux qui ont tiré les ficelles dans les coulisses ?

Un des longs face-à-face Moniz-Salehi.

Si l'accord historique sur le nucléaire iranien entre les 5+1 et Téhéran est conclu, on prendra une photo souvenir où, à côté du secrétaire d'État américain, John Kerry, se tiendra un monsieur petit de taille et aux longs cheveux argentés. C'est Ernest Moniz, secrétaire d'État à l'Énergie dans le cabinet du président Barack Obama et surtout, comme on l'a appelé, « son arme », car il a joué un rôle majeur dans ces pourparlers qui se sont échelonnés sur treize ans.
Ernest Moniz a été l'homme des situations difficiles à dénouer. Il est un redoutable négociateur, un homme de science de très haut niveau, doublé d'un politicien aux stratégies affûtées. C'est à lui qu'a eu recours le président Obama pour convaincre le Congrès américain, sceptique à l'égard de cet accord avec l'Iran et prêt à y opposer son veto, qu'en fait, c'était là un marché bénéfique pour les États-Unis et pour le monde. D'autant, selon Ernest Moniz, que cet accord n'est pas fondé sur la confiance, mais sur des stipulations intransigeantes, et qu'il est conçu pour durer dans le temps, et non pas pour 10, 15 ou 20 ans.
Physicien nucléaire, Ernest Moniz sait néanmoins être intransigeant, fort de son savoir scientifique à toute épreuve et des bonnes relations, que lui, démocrate, a su cultiver avec les membres républicains du Congrès, bien avant de devenir secrétaire à l'Énergie en 2013. Âgé de 70 ans, il fait partie de la première génération d'émigrés portugais. Le président Obama l'a choisi, à son second mandat, pour remplacer Steven Chu, qui n'est rien de moins qu'un Prix Nobel de physique. C'est dire qu'il fait le poids.

 

(Lire aussi : L'Iran et les États-Unis évoquent des « progrès »)

 

Moniz et Salehi, des anciens du MIT
Une fois diplômé en physique nucléaire du Massachusetts Institute of Technology (MIT), on le retrouve à de hauts postes : directeur du laboratoire de l'énergie et de l'environnement du MIT, directeur du bureau présidentiel de la politique de la science et de la technologie, et secrétaire d'État adjoint dans l'administration du président Bill Clinton.
Autour de la table des négociations, il a retrouvé en son homologue iranien un ancien élément brillant de MIT : Ali Akbar Salehi (66 ans), à la tête de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique. Ils ont fréquenté la prestigieuse université presque à la même période, mais ne se sont jamais rencontrés. M. Salehi est le dernier de la vague d'Iraniens ayant étudié dans les universités d'élite américaines. Un proche de Khamenei et un ancien ministre des Affaires étrangères, il est le numéro 2 du groupe négociateur iranien (mené par le ministre des Affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif), comme l'est Ernest Moniz, côté américain. Et, comme ce dernier aussi, à part son expertise scientifique, il a à convaincre ses compatriotes qu'avec un tel accord, l'Iran ne va pas faire marche arrière face aux pressions américaines.
Dans leurs maints face-à-face, qui parfois ont duré 20 heures, lui et Ernest Moniz ont concocté des stratégies, au départ semblables à deux lignes parallèles, mais qui ont fini par se rencontrer. Les pourparlers Moniz-Salehi étaient un moyen de détacher l'argumentation surchauffée des sanctions et de la souveraineté nationale d'une discussion plus technique.

Dynamique des sessions
Parallèlement aussi, tous deux ont développé une bonne relation personnelle. En avril dernier, Ernest Moniz avait offert des cadeaux au premier petit-fils que venait d'avoir Ali Akbar Salehi. « Ils ont une belle prestance et sont le reflet d'une même image, placée dans des contextes différents », affirme Michael Driscoll, un éminent professeur de science nucléaire du MIT.
« Certes, les États-Unis, comme l'Iran, disposent d'une incroyable diversité d'experts opérant dans tous les domaines, mais il est rare qu'un scientifique du calibre d'Ernest Moniz fasse partie du gouvernement, au moment où une telle capacité peut être cruciale. Sa présence a changé la dynamique des sessions de tergiversation », fait remarquer John Deuch, chimiste et ancien secrétaire d'État adjoint à la Défense.
Ernest Moniz était peu connu du grand public qui l'a découvert en janvier dernier, quand le président américain a prononcé son discours sur l'état de l'Union au Congrès. Ce soir-là, les caméras des télévisions se sont longuement braquées sur sa longue chevelure grise qui a créé le buzz sur les réseaux sociaux. On l'a comparé à Beethoven, à George Washington et aux autres pères fondateurs.
L'an dernier, à cette même occasion, le président Obama l'avait ainsi présenté : « En cas de catastrophe, il sera votre chef d'État. » À comprendre, comme pour le discours sur l'état de l'Union, que lorsque les pouvoirs exécutif et législatif sont réunis dans un même endroit, le président désigne un membre de son cabinet, appelé le « survivant ». Ce dernier est isolé à l'extérieur sous haute surveillance. Il devrait prendre en charge l'État au cas où surviendrait une attaque ou tout autre accident provoquant l'incapacité de gouverner des responsables réunis. Car, à aucun moment, il ne doit y avoir un vide de l'exécutif.

 

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