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Économie - Liban - Éclairage

Soldes à tout prix : le revers de l’étiquette

Avec le début du ramadan, les soldes d'été ont commencé encore plus tôt qu'à l'accoutumée. Une valse des étiquettes qui pourrait s'avérer néfaste à long terme, autant pour les détaillants que pour les consommateurs.

Les soldes entraînent une réduction de la marge commerciale et de la rentabilité pour les commerçants. Jean-François Monier/AFP

Depuis le début du ramadan, les rues sont calmes, Beyrouth tourne au ralenti et la plupart des devantures des boutiques de Hamra ou d'Achrafieh sont couvertes d'affiches « sales » de toutes les couleurs. Anticipant une baisse des ventes, les commerçants ont commencé à vendre au rabais. « Nous avons avancé la date des soldes d'une dizaine de jours par rapport aux années précédentes afin de se caler sur les dates du ramadan », témoigne un distributeur de vêtements pour femmes sous le couvert de l'anonymat.
Les soldes ont normalement pour but de liquider les collections passées et d'aider à lisser les effets des cycles commerciaux. Mais depuis quelques années, leur calendrier est de moins en moins respecté. « La réglementation qui fixe des périodes officielles de soldes n'est plus appliquée depuis bien longtemps. Désormais, les soldes se déroulent presque en continu! » constate Nicolas Chammas, président de l'Association des commerçants de Beyrouth. « Le phénomène touche tous les secteurs – de la mode aux jouets, en passant par l'horlogerie ou les biens électroniques – et s'étend dans tout le Liban, surtout dans les régions du Nord et de la Békaa où les difficultés économiques sont plus grandes », poursuit-il.

Mimétisme
Une tendance qui s'explique avant tout par les mauvaises ventes des mois précédents. « Alors que nous venons de recevoir la collection automne-hiver, nous avons encore trop de stocks invendus de la collection d'été que nous devons liquider », explique la responsable marketing d'une boutique de vêtements pour femmes de l'ABC Achrafieh, qui a dû lancer des réductions de 30 %, une semaine plus tôt que d'habitude. « Les vendeurs le font en désespoir de cause : leur chiffre d'affaires a baissé depuis quatre ans à cause des effets de la situation politico-sécuritaire et de la hausse des charges d'exploitation liée au décret de réajustement des salaires de février 2012 », affirme Nicolas Chammas.
Autre facteur : le phénomène de mimétisme qui caractérise le marché. « Même sans nos problèmes de stocks, nous aurions été obligés de suivre le tempo imposé par nos concurrents », indique la responsable marketing précitée. Un mouvement qui est aussi influencé par les stratégies internationales ou régionales des maisons mères des grandes franchises comme H&M ou Zara.
Pourtant, selon Nicolas Chammas, les soldes sont de « mauvaises ventes » car elles entraînent une réduction de la marge commerciale, soit un écart de plus en plus petit entre le prix de vente et le prix d'achat. « Par exemple, si le chiffre d'affaires baisse de 30 %, la rentabilité diminue, elle, de 45 %. Ces mauvais résultats se répercutent sur la trésorerie qui se déprécie à son tour de 60 % ! » avance-t-il. Le représentant des commerçants beyrouthins estime que les marges commerciales peuvent baisser jusqu'à 50 ou 60 % : « Cette politique généralisée des soldes, c'est une spirale infernale ! »

Réglementer
D'autant que la poursuite de la tendance impacte les anticipations et les comportements des consommateurs. « Je pense que le fait de démarrer chaque année un à deux jours plus tôt aura un impact à long terme sur la consommation du mois de mai », s'inquiète un distributeur de grandes marques. « Les soldes sont un remède qui, à long terme, peut s'avérer pire que le mal », s'inquiète Nicolas Chammas.
« On fait l'erreur de penser que le laisser-faire est bénéfique en matière commerciale mais, au contraire, sur le long terme tout le monde y perd », analyse de son côté Nadim Chammas, distributeur de Slowear, concept-store regroupant quatre marques italiennes haut de gamme. En débutant les soldes de plus en plus tôt, les détaillants anticipent la diminution de la part de leurs produits vendus à plein tarif et augmentent leurs prix dès le début de la saison. Les consommateurs sont donc perdants, tout comme les commerçants qui diminuent leurs marges commerciales. « Le Liban devrait réglementer le calendrier et les produits concernés par les soldes, poursuit Nadim Chammas. Cela limiterait cette baisse sauvage des prix. »

 

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