Un groupe Libyen lié à el-Qaëda a démenti mardi la mort du chef jihadiste Mokhtar Belmokhtar dans une frappe américaine le weekend dernier en Libye, un décès annoncé par le gouvernement Libyen mais que Washington s'est refusé jusque-là à confirmer.
Les États-Unis ont annoncé avoir mené dimanche avant l'aube un raid sur un bâtiment à Ajdabiya (est) pour tenter de tuer Mokhtar Belmokhtar, responsable d'attaques aussi sanglantes que spectaculaires dans le Sahel et donné pour mort maintes fois dans le passé. Mais ils ont choisi de rester prudents, un responsable du Pentagone expliquant lundi que Washington n'était pas encore en mesure de confirmer que le jihadiste algérien était bien dans le bâtiment "comme nous le pensions". Le gouvernement Libyen reconnu par la communauté internationale a lui dès dimanche affirmé que Belmokhtar avait péri dans la frappe alors qu'il tenait à Ajdabiya "une réunion avec d'autres chefs de groupes extrémistes, dont des membres d'Ansar Asharia", groupe classé "terroriste" par l'ONU.
Dans un communiqué, Ansar Asharia a identifié "sept martyrs tués dans le raid américain croisé", parmi lesquels ne figure pas Belmokhtar. "Nous démentons la mort de toute autre personnalité", a ajouté le groupe sans mentionner le nom de Belmokhtar ni préciser s'il était présent à la réunion d'Ajdabiya, à 160 km à l'ouest de Benghazi, la capitale de l'est Libyen en proie aux combats entre jihadistes et forces gouvernementales.
(Pour mémoire : Le jihadiste Mokhtar Belmokhtar mis en accusation à New York)
Alger n'a reçu aucune notification
Sur les réseaux sociaux, des comptes jihadistes ont aussi fait état de sept morts dans le raid. Un groupe islamiste local a publié des photos de corps ainsi que les noms des victimes sans aucune référence à Belmokhtar. En Algérie, une source de sécurité a affirmé que les autorités algériennes n'avaient reçu aucune notification de la mort de Belmokhtar de la part des Libyens ou des Américains, ni aucune demande d'authentification de son identité.
Plongée dans le chaos depuis la chute en 2011 du dictateur Mouammar Kadhafi, la Libye est déchirée par des combats entre milices lourdement armées et une lutte au pouvoir avec deux gouvernements et Parlements rivaux. Des groupes jihadistes en ont profité, notamment le groupe État islamique (EI), qui s'est implanté en Libye en 2014 et a annoncé le 9 juin avoir pris la grande ville de Syrte (450 km à l'est de Tripoli). C'est le gouvernement siégeant à Bayda (est) qui a annoncé la mort de Belmokhtar. Un gouvernement parallèle installé par les milices de Fajr Libya est basé à Tripoli, la capitale, conquise par ces milices en août 2014.
Mokhtar Belmokhtar, dont la tête a été mise à prix par Washington pour cinq millions de dollars, avait déjà été donné pour mort par le Tchad en avril 2013, mais il avait revendiqué le mois suivant un double attentat suicide meurtrier au Niger. "Notre première évaluation est que le bombardement avait réussi (à tuer Belmokhtar), mais nous ne sommes pas prêts" à confirmer cette évaluation, car "nous n'avons pas finalisé" le processus de vérification, a précisé lundi le Pentagone.
(Pour mémoire : Belmokhtar menace à nouveau la France)
Fidèle à el-Qaëda
Deux chasseurs-bombardiers F-15 Strike Eagle armés de bombes guidées et des drones d'observation ont été utilisés durant le raid mené par les États-Unis, qui pourchassent les groupes jihadistes dans de nombreux pays. Ainsi, une attaque au drone a tué la semaine dernière le chef d'el-Qaëda dans la péninsule arabique (Aqpa), Nasser al-Wahishi, un coup très dur infligé au réseau. En 2014, les forces spéciales américaines avaient capturé en Libye Ahmed Abou Khattala, l'un des organisateurs présumés de l'attaque contre le consulat américain à Benghazi en 2012 qui avait tué quatre Américains dont l'ambassadeur.
Né en juin 1972 à Ghardaïa aux portes du Sahara, Belmokhtar a combattu en Afghanistan en 1991, où il a perdu un oeil, ce qui a valu le surnom de "Laouar" (le borgne). Ex-chef d'el-Qaëda au Maghreb islamique (Aqmi), il a créé fin 2012 sa propre unité combattante, les "Signataires par le sang".
En janvier 2013, il a revendiqué la prise d'otages massive sur le complexe gazier d'In Amenas en Algérie, qui a notamment coûté la vie à 37 étrangers. Il venait de réaffirmer en mai dernier la loyauté de son groupe à el-Qaëda, en démentant l'allégeance à l'EI proclamée par un autre dirigeant. Condamné à mort par la justice algérienne, Belmokhtar aurait notamment commandité l'assassinat de quatre Français en Mauritanie en 2007 et le rapt de plusieurs Occidentaux.
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commentaires (3)
IL N'EST PAS MORT... IL EST ALLÉ AD PATRES !
LA LIBRE EXPRESSION
12 h 03, le 17 juin 2015