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Économie - Quatre questions à...

« Seule une reprise mondiale sera susceptible de relancer l’économie française »

Quatre questions à... Gilles Saint-Paul, professeur à Toulouse School of Economics et chercheur au Center for Economic Policy Research à Londres.

Le gouvernement français a revu à la baisse jeudi dernier ses prévisions de croissance, après l'annonce par l'Insee d'une croissance nulle pour la France au deuxième trimestre, comme au premier. Deux trimestres consécutifs qui donnent au gouvernement des signes d'alarme pour agir.

À votre avis, quelles sont les raisons de cette stagnation économique en France ?
Cette stagnation est, à mon avis, due au fait que les acteurs économiques anticipent un environnement peu favorable à l'investissement et à l'embauche, à cause des niveaux record atteints par la fiscalité ainsi que de l'attitude généralement peu favorable au monde des affaires. Le gouvernement a récemment tenté d'inverser la vapeur en mettant en œuvre des mesures fiscales incitatives pour l'embauche. Mais ces politiques viennent après deux ans de durcissement fiscal et le gouvernement aura du mal à convaincre les entreprises que leur caractère ne soit pas purement opportuniste.

Le ministre des Finances, Michel Sapin, a annoncé qu'il n'anticipait plus qu'une hausse de 0,5 % du PIB, soit moitié moins que la prévision retenue dans le budget. Pourquoi le gouvernement français change-t-il d'avis maintenant sur les prévisions de croissance ?
Les prévisions de croissance officielles jouent un rôle dans la planification du budget de l'État. Celui-ci est censé tenir des objectifs en matière de déficit. Il est généralement considéré comme déraisonnable que le déficit soit supérieur à 3 % du PIB. Plus les prévisions de croissance sont favorables, plus les projections de recettes fiscales le sont également et plus le déficit prévu dans le budget est faible. L'État a donc tendance à systématiquement surévaluer les prévisions de croissance afin que son budget apparaisse comme relativement équilibré. Cette année, tout comme l'année précédente, le gouvernement a donc revu à la baisse ses prévisions, qui étaient au départ supérieures à celles d'instituts indépendants comme le FMI. Ces révisions s'accompagnent évidemment d'une reconnaissance officielle du fait que le déficit sera plus élevé que prévu. Mais le fait que la mauvaise performance de l'économie française soit présentée de cette façon, plutôt que sous la forme de projections plus réalistes dès le départ, donne la fausse impression que la conjoncture s'est détériorée, alors qu'en fait c'était les prévisions de départ qui étaient trop optimistes afin de réduire artificiellement les déficits prévus.

Quelles sont les principales entraves qui empêchent la reprise en France ?
Les principales entraves tiennent aux rigidités de l'économie : poids de la fiscalité, réglementation du marché du travail et du marché des biens, etc. À ceci s'ajoutent les problèmes de compétitivité des entreprises françaises qui se sont accumulés depuis la mise en place de l'euro. Du fait de la monnaie unique, il n'est plus possible de rétablir sa compétitivité au moyen d'une dévaluation. Le gouvernement tente de s'attaquer au problème en réduisant les charges sociales des entreprises qui grèvent le coût du travail. Mais pour financer ces réductions, on doit soit trouver de l'argent ailleurs, ce qui se traduit par la hausse d'un autre impôt, soit faire des économies, ce qui est politiquement difficile.

Peut-on s'attendre à une reprise de la croissance au troisième trimestre ? Qu'en est-il pour 2015 ? Quelles mesures le gouvernement français doit-il entreprendre ?
Je m'attends à ce que la performance de l'économie française reste en deçà de celle des autres pays de la zone euro. Je ne crois pas à une reprise significative de la croissance au troisième trimestre. En tout état de cause, seule une reprise mondiale sera susceptible de relancer l'économie française à travers la demande extérieure. Mais le déficit de croissance de la France comparé aux autres économies avancées persistera tant que les problèmes structurels ne seront pas réglés. Le gouvernement devrait mettre en place une réforme des retraites ambitieuse afin d'accroître le taux d'activité, ce qui permettrait de réduire les charges sociales. Il faudrait aussi revenir sur le niveau du salaire minimum qui est excessif, notamment dans les territoires les moins développés économiquement, ainsi que sur les réductions de temps de travail qui ont également eu un impact négatif sur le coût du travail. Outre ces trois principaux chantiers, il faut aussi s'attaquer aux myriades de réglementations qui freinent la création d'entreprises et l'embauche.

Le gouvernement français a revu à la baisse jeudi dernier ses prévisions de croissance, après l'annonce par l'Insee d'une croissance nulle pour la France au deuxième trimestre, comme au premier. Deux trimestres consécutifs qui donnent au gouvernement des signes d'alarme pour agir.
À votre avis, quelles sont les raisons de cette stagnation économique en France ?Cette stagnation est, à...
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