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Économie - Liban

Grille des salaires : vers l’« intifada populaire » ?

Les commissions parlementaires mixtes se réunissent aujourd'hui à 10h30 pour poursuivre l'examen des points les plus contestés relatifs au financement de la grille des salaires. Rendez-vous de la dernière chance pour le CCS qui menace d'une « intifada populaire ».

Les menaces syndicales n’ont pas fait perdre son objectivité au gouverneur de la Banque centrale, Riad Salamé, invité par les commissions conjointes à donner son avis sur la grille des salaires. Photo Sami Ayad

Les commissions parlementaires mixtes ont entamé hier leurs réunions pour poursuivre l'examen des moyens de financement de la grille des salaires, en présence du gouverneur de la Banque centrale Riad Salamé. À l'issue de la troisième séance, ce dernier a mis en garde contre les conséquences négatives engendrées par une adoption potentielle au Parlement de la nouvelle grille des salaires. Le gouverneur de la BDL a notamment mis l'accent sur les risques d'inflation, sur les taxes et sur la notation souveraine du Liban. Il a ainsi proposé d'échelonner la hausse sur cinq ans.


L'ensemble du secteur public attend depuis plus de deux ans l'adoption du projet de loi sur la nouvelle grille des salaires. Mais les discussions concernant les moyens de financement de la grille tournent en rond depuis des mois et les députés doivent jongler entre les pressions des organismes économiques, qui mettent en garde contre les « conséquences dramatiques d'une hausse des taxes », et celles des syndicats qui menacent d'une escalade si la loi n'est pas rapidement votée.


Vendredi dernier, sept articles du projet de loi avaient été avalisés par les commissions, mais les divergences restent profondes concernant les articles 1 et 5, relatifs respectivement à la TVA et aux permis de construire. Hier, à l'issue des réunions des commissions parlementaires mixtes, le président de la commission des Finances, le député Ibrahim Kanaan, a indiqué que l'article 5 a été avalisé mais que les commissions poursuivront leurs discussions autour des moyens de financement.

 

Le CCS : La grille ou le soulèvement populaire
Le président du Comité de coordination syndicale (CCS), Hanna Gharib, a de son côté fait savoir que « les professeurs ne renonceront pas à leurs droits », refusant un échelonnement du paiement qui est, selon lui, anticonstitutionnel. M. Gharib avait auparavant averti que « tout nouvel ajournement serait fatal » et avait fait planer « la menace du boycott des examens officiels ». Arrivé en fin d'après-midi à la place de l'Étoile, il a demandé que la grille des salaires soit adoptée dans les plus brefs délais « sans quoi le CCS aura recours à une escalade qui pourrait mener au soulèvement populaire ». M. Gharib tiendra aujourd'hui une conférence de presse pour discuter des étapes futures de l'action envisagée.


La protestation spontanée qui a eu lieu hier à 18h30 a été l'occasion pour Nehmé Mahfoud de réitérer le refus du CCS de voir la grille des salaires échelonnée. Le président du syndicat des enseignants a affirmé qu'il fallait que la grille soit approuvée telle quelle au plus tard aujourd'hui, mardi, sans quoi les responsables seront témoins à partir de mercredi de mouvements de protestations sans précédent. « Ils ont approuvé au Parlement 10 000 milliards de livres sans budget et ils ne veulent pas approuver 2 000 milliards pour financer la grille », s'est-il insurgé.

 

Les organismes économiques
Les représentants des organismes économiques ont plusieurs fois déjà crié au scandale, appelant les responsables à revoir les sources de financement de la grille. Force est de noter que le secteur privé souffre depuis trois ans des affres de la crise syrienne et de la position des monarchies du Golfe qui ont mis en garde leurs ressortissants contre la venue au Liban.


C'est dans cette optique qu'une délégation des représentants des instances économiques s'est rendue hier chez le vice-président de la Chambre Farid Makari demandant à ce dernier de former une commission restreinte au sein de laquelle les organismes économiques seraient représentés.
À l'issue de la réunion, le président de l'Association des commerçants de Beyrouth (ACB) Nicolas Chammas a souligné qu'il était nécessaire de prendre son temps en ce qui concerne le coût final de la nouvelle grille. Il a également demandé « la formation d'une commission restreinte à laquelle prendraient part les instances économiques ».
M. Chammas a en outre indiqué qu'il fallait se pencher sur la réduction des dépenses étatiques, notamment les transferts à EDL, en mettant en place des partenariats privé-public, soulignant en outre qu'il était impératif d'améliorer la perception des impôts et des frais administratifs, notamment les frais portuaires ainsi que la TVA. Les organismes économiques ont également demandé de mettre en place des impôts qui n'épuiseraient pas l'économie, de considérer sérieusement l'option d'échelonnement proposée par le gouvernement précédent et surtout de « coupler l'adoption de la grille des salaires avec des réformes administratives urgentes ».


Même son de cloche au niveau du président de l'Association des industriels libanais (AIL), Nehmat Frem, qui va jusqu'à remettre en question la stabilité de la livre libanaise au cas où la grille des salaires serait adoptée sans réfléchir sérieusement aux moyens de financement. « Les premiers à être touchés par les conséquences négatives de l'adoption de la grille telle quelle seront d'abord et avant tout ses bénéficiaires », a-t-il mis en garde, en soulignant les effets inflationnistes et la dégradation du pouvoir d'achat des citoyens « qui porteront seuls le coût de la nouvelle grille ». Il a également indiqué que cette mesure ne pouvait que dilater davantage la dette publique.
Parallèlement, le président de l'Association des courtiers d'assurances libanais (ACAL) Assaad Mirza a brandi la menace d'une dévaluation de la livre. Il a ainsi rappelé « qu'en 1992, le dollar avait atteint 3 000 livres alors que la conjoncture économique était plus favorable que celle que traverse le Liban aujourd'hui ».
Le député Ghazi Youssef a, quant à lui, souligné dans une entrevue accordée à la Voix du Liban que l'adoption de la grille des salaires aura des conséquences graves sur les importations libanaises.


Pour l'ancien ministre des Finances Jihad Azour, le gouvernement se trouve dans une impasse. D'un côté, il se doit de respecter les promesses faites aux fonctionnaires et, d'un autre côté, « ce n'est un secret pour personne que l'adoption de la grille est une initiative qui n'a pas été étudiée ». Il a souligné qu'il y avait eu un cumul d'erreurs graves dans ce dossier. « La BDL aurait dû mettre en exergue depuis un moment les conséquences graves de ces négligences », a-t-il ajouté. Il a en outre expliqué que si la grille était approuvée sans des études claires sur les moyens de financement (hier), les conséquences sur la structure de l'État libanais se feront ressentir durant des années. Rappelant que le dernier rapport du Fonds monétaire international avait mis en garde contre l'adoption de la grille d'une manière hasardeuse, il a souligné que si les transferts à EDL étaient stoppés, c'est le contribuable qui souffrirait d'une telle démarche. Enfin, l'ancien ministre a demandé « si les responsables trouvent les moyens de financement pour la première année, que feront-ils les années suivantes ? ».


Dans ce contexte, le chef du législatif, Nabih Berry, a indiqué lundi au quotidien as-Safir que si les commissions mixtes n'aboutissent pas à un accord lors de la séance matinale, il convoquera les députés à une séance nocturne et, s'il le faut, à une nouvelle séance aujourd'hui.
M. Berry a également assuré que si le projet de loi est approuvé par les commissions, il sera placé à l'ordre du jour de la prochaine session parlementaire prévue pour mercredi et jeudi afin qu'il soit adopté.
Les responsables piétinent face à un État en manque de ressources et de transparence, qui adopte une attitude de déni concernant la nécessité de mettre en place des réformes tandis que la grogne sociale gonfle de jour en jour...
Le bras de fer risque d'être rude. Et les citoyens, encore une fois, seront des victimes idéales.

 

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Les commissions parlementaires mixtes ont entamé hier leurs réunions pour poursuivre l'examen des moyens de financement de la grille des salaires, en présence du gouverneur de la Banque centrale Riad Salamé. À l'issue de la troisième séance, ce dernier a mis en garde contre les conséquences négatives engendrées par une adoption potentielle au Parlement de la nouvelle grille des...

commentaires (1)

Tout le monde est insatisfait à cause de l’inflation toujours galopante et la grille des salaires si mal étudiée sera un désastre pour tout le pays .

Sabbagha Antoine

12 h 50, le 08 avril 2014

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Commentaires (1)

  • Tout le monde est insatisfait à cause de l’inflation toujours galopante et la grille des salaires si mal étudiée sera un désastre pour tout le pays .

    Sabbagha Antoine

    12 h 50, le 08 avril 2014

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