Les dirigeants européens ont apporté vendredi un soutien fort à l'Ukraine en signant le volet politique de l'accord d'association auquel s'était vivement opposée la Russie au début de la crise fin 2013. "L'Union européenne soutient les Ukrainiens et leur droit de décider de leur propre avenir", ont affirmé les 28 chefs d’État et de gouvernement de l'UE avant d'accueillir vendredi matin le Premier ministre ukrainien Arseni Iatseniouk.
Cette signature creuse un peu plus le fossé entre les Occidentaux et la Russie à l'issue d'une semaine de tensions croissantes autour de la Crimée.
Elle intervient également alors que Moscou vient de finaliser le rattachement de cette presqu'île russophone, qui a été ratifié vendredi à l'unanimité par la chambre haute du parlement russe, après l'avoir été la veille par la chambre basse. Après le vote de la chambre haute, Vladimir Poutine a signé la loi sur la ratification du traité de rattachement de la Crimée à la Russie ainsi que la loi créant deux nouvelles entités administratives russes, la Crimée et la ville portuaire de Sébastopol. La signature a eu lieu lors d'une cérémonie au Kremlin, retransmise en direct à la télévision.
Estimant que la situation ne montrait aucun signe de "désescalade", les États-Unis et l'UE ont décidé jeudi de durcir les sanctions visant des responsables russes ou ukrainiens pro-russes. Washington a frappé haut en ciblant de proches collaborateurs du président Vladimir Poutine, dont Sergueï Ivanov, son chef de cabinet. Ils ont ajouté 20 personnes à la liste des onze dont les avoirs étaient déjà gelés. Bruxelles a emboité le pas en décidant l'ajout de 12 Russes et Ukrainiens pro-russes à leur liste, portant à 33 le nombre de personnes ciblées. Les noms des nouveaux sanctionnés devaient être dévoilés en début d'après-midi par le Journal officiel de l'UE. "Certains sont vraiment haut placés", a souligné le président du Conseil européen, Herman Van Rompuy.
Le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, a, par ailleurs, annoncé la suspension d'une partie de la coopération militaire avec la Russie. Cette suspension concerne plusieurs activités de la coopération militaire qui couvrent les échanges de visites et les exercices conjoints, a précisé l'entourage du ministre. Les deux pays restent toutefois en contact dans le cadre de la mise en oeuvre des engagements internationaux, a-t-on ajouté.
"Suivre le chemin de ceux qui sont ouvertement russophobes et isoler la Russie est une voie sans issue", a réagi vendredi le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov. M. Lavrov a déclaré que les Etats-Unis, en appliquant des sanctions, n'étaient pas "guidés par le bon sens mais par la volonté de punir". Le ministre russe des Affaires étrangères a aussi commenté la signature vendredi du volet politique de l'accord d'association entre l'Ukraine et l'Union européenne: "Je pense que ce n'est pas une mesure dictée par les intérêts de l'économie ukrainienne, du peuple ukrainien dans sa totalité mais une tentative de gagner des points dans le jeu géopolitique".
"Dieu sait quel est l'objectif de la Russie..."
Inédit dans l'histoire de l'UE, l'accord d'association vise à arrimer l'Ukraine à l'Union, sans pour autant déboucher sur son adhésion au bloc des 28. L'UE et l'Ukraine étaient convenus de signer cet accord en novembre, mais le président ukrainien Viktor Ianoukovitch avait fait volte-face sous pression de Moscou, déclenchant la crise qui a conduit à sa chute puis au rattachement de la Crimée à la Russie.
Seuls les chapitres "politiques" de l'accord ont été signés, ceux instituant une zone de libre échange ayant été renvoyés à la formation d'un gouvernement ukrainien issu des élections du 25 mai, et au lancement de réformes économiques demandées par le FMI.
A l'issue de la signature, Le Premier ministre Iatseniouk s'est affirmé convaincu que l'UE allait "parler d'une voix unie et forte" pour parer une escalade avec la Russie. "Dieu sait quel est l'objectif final pour la Russie (...) A-t-elle décidé d'imposer un nouvel ordre mondial?", s'est-il interrogé. Il a appelé l'UE à prendre de "réelles" sanctions économiques contre la Russie, car c'est le "meilleur moyen de (la) contenir". Les 28 ont cependant décidé de ne pas franchir pour l'instant cette étape, le stade 3 de sa réponse graduée à la crise, en raison notamment des conséquences économiques pour les Européens eux-mêmes.
Moscou supprime une aide à Kiev
Préoccupée par les risques de sanctions économiques, les agences d'évaluation Standard & Poor's et Fitch ont néanmoins abaissé à "négative" la perspective de la note de solvabilité de la Russie. "Étant donné que les banques et les investisseurs américains et européens pourraient avoir des réticences à prêter à la Russie dans les circonstances actuelles, l'économie pourrait ralentir davantage et le secteur privé pourrait avoir besoin d'aide publique", a expliqué Fitch.
Le gouvernement japonais a de son côté décidé de proposer une aide de quelque 710 millions d'euros sous diverses formes à Kiev.
L'Ukraine fait face à d'importantes difficultés économiques et financières, accentuées par l'annulation par la Russie des aides dans le domaine énergétique. Moscou a ainsi annoncé vendredi la suppression du rabais qu'elle accordait à l'Ukraine sur le prix du gaz en échange de l'utilisation d'une base navale en Crimée. L'Ukraine va désormais devoir payer 480 dollars les 1.000 m3 de gaz, un des prix les plus élevés d'Europe, selon la presse économique russe.
L'UE a par ailleurs décidé d'accélérer les préparatifs pour signer "au plus tard en juin" un accord d'association avec la Géorgie et la Moldavie, deux autres anciennes républiques soviétiques souhaitant sortir de la sphère d'influence russe.
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commentaires (7)
L'Ouest ukrainien sera enfin sauvé et finalement développé et civilisé grâce à cet accord historique avec l'union Européenne !
ANTOINE-SERGE KARAMAOUN
12 h 32, le 22 mars 2014