Jadis salués comme les héros de la révolution en Syrie, les rebelles de Homs, dans leurs quartiers assiégés, affamés et abandonnés, défendent désormais comme ils peuvent leur réduit, redoutant la fin de la révolte s'ils viennent à être battus.
Homs a été baptisée « la capitale de la révolution » dès le début du soulèvement, il y a trois ans, contre le régime de Bachar el-Assad, marqué pendant les premiers mois par des manifestations et sit-in pacifiques. Mais le régime a riposté avec brutalité, jetant en prison des milliers de protestataires et ouvrant le feu contre les manifestants, puis bombardant pendant des semaines et des mois les quartiers rebelles et plongeant le pays dans une véritable guerre. De petites poches de rebelles ont réussi à résister à Homs, mais, assiégés depuis 20 mois par les forces du régime qui progressent ailleurs dans le pays, ils craignent d'être chassés de cette ville stratégique. « Ce que nous redoutons, c'est que le régime prenne le contrôle des zones assiégées », affirme Thaër, un militant de 25 ans et ancien bijoutier du quartier Khaldiyeh, qui fut un bastion de la révolution avant que l'armée ne s'en empare. « Si cela se produit, ce sera la fin de la révolution et nous devrons oublier le retour de nos familles dans leurs demeures, ajoute-t-il, anxieux. Le régime sera, sans grande difficulté, capable de reprendre le contrôle de tout le pays. »
Les quartiers en ruine autour de la Vieille Ville, où les rebelles défendent comme ils peuvent leurs dernières positions, offrent des scènes de désolation : des rues jonchées de gravats longent des blocs d'appartements vides et éventrés. Mais les rebelles continuent de voir dans leur ville le symbole de la révolution et se disent déterminés à ne pas laisser la propagande du régime crier victoire. « Les révolutionnaires ne défendent pas des décombres, mais ils défendent ce que Homs représente », souligne Aboul Hareth, un religieux local.
Avant une opération humanitaire de l'ONU qui a permis en février l'évacuation de 1 400 personnes et la distribution d'une aide limitée, le vieux Homs n'avait plus reçu ni vivres ni médicaments depuis juin 2012, et les habitants avaient dû se nourrir d'herbes. Quelque 1 500 personnes n'ont d'autre choix que d'abandonner leur quartier ou de résister jusqu'à la mort. Parmi elles figurent une centaine de blessés « sans aucun médicament », déplore Thaër.
(Lire aussi : Rare visite d’Assad dans un camp de déplacés)
Ne pas trahir les morts
Les rebelles ont également vu avec effarement l'unité de la contestation se désintégrer, avec des factions aux ordres de l'étranger et des groupes armés semant le chaos. « Si j'abandonne, je trahirai les amis qui ont donné leur vie pour empêcher l'armée de prendre l'ensemble de Homs », explique Dia' Abou Jihad, un combattant de 24 ans, électricien de formation.
Alors que la guerre a désormais fait plus de 140 000 morts en Syrie, selon une ONG, les rebelles se rappellent du début de la révolte, un mouvement spontané et pacifique lancé par des jeunes qui, inspirés par le printemps arabe, étaient sortis dans les rues pour réclamer la fin de 40 ans de règne sans partage de la famille Assad. Ils se rappellent aussi l'attaque du régime en février 2012 contre le quartier de Baba Amr, où des centaines de personnes ont été tuées, hâtant ainsi la militarisation du soulèvement. « Un vrai révolutionnaire quitte sa maison, va combattre l'ennemi et retourne la nuit. Il voit sa maman, mange un bout et s'éclipse à nouveau avant l'aube », déclare Yazan, un militant de 29 ans. « Ce qui se passe ici est tout à fait le contraire », avec des quartiers résidentiels transformés en champs de bataille, ajoute-t-il. Mais comme les rebelles ont pris les armes en désespoir de cause, « certains, connus pour être des voyous, se sont proclamés chefs de bataillon », poursuit Yazan, ancien étudiant en finance internationale.
Les combats ont forcé des dizaines de milliers de familles à fuir Homs pour rejoindre le flot des déplacés et des réfugiés, aujourd'hui estimé à 9 millions de personnes. Abou Fahmi, volontaire dans un hôpital de campagne, indique que l'idée d'une trêve a été évoquée, mais « sans résultat tangible ». Yazan dit qu'il s'attendait à la brutalité du régime, mais se dit déçu que personne ne soit venu au secours de Homs. « Nous pensions que les gens ne nous laisseraient pas mourir ici. »
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commentaires (7)
le bon titre aurait plutôt été La vie brisée des habitants de Homs...mais dans leurs délires réciproques,les deux parties semblent se foutre éperdument des habitants de Homs..sacrés arabes...tout pour plaire!
GEDEON Christian
22 h 08, le 13 mars 2014