"J'ai cru que je pouvais changer les choses en protestant de manière pacifique contre le gouvernement". Il y a trois ans, Anna*, une jeune Syrienne de Salamiyeh, dans le gouvernorat de Hama (ouest de la Syrie), était prête à tout. Avec le recul, elle considère cette période comme un échec.
Quand une partie de la Syrie, enivrée par les vents du printemps arabe, commence à se soulever pacifiquement en mars 2011 contre le régime de Bachar el-Assad, Anna, aujourd'hui âgée de 25 ans, est de la plupart des manifestations.
A Homs, non loin de Salamiyeh, ou à Salamiyeh même, Anna et son groupe d'activistes formé d'amis, de personnes rencontrées lors des premiers jours de la révolution, de médecins, d'ingénieurs, d'écrivains, d'avocats... battent le pavé. "Nous nous interposions entre les forces de sécurité et les autres manifestants pour protéger ces derniers, explique-t-elle à lorientlejour.com. Nous ne pensions pas avec notre tête. Nous n'avions plus peur, nous voulions la liberté".
Employée dans un cabinet d'avocats, l'étudiante en droit passe son temps entre la maison et les manifestations. Elle passe par l'hôpital aussi. "Mon père est resté à l'hôpital de Homs pendant une longue période en 2012 et 2013. Il avait été blessé au pied un jour où les forces de sécurité avaient attaqué une manifestation", explique la jeune femme.
Aujourd'hui, trois ans plus tard, "je vois bien que tout cela n'a pas marché. Quand les services de renseignement ont commencé à attaquer les manifestants, nous avons dû arrêter", explique Anna.
Quand la guerre commence, Anna retourne à la maison. Elle essaie de recommencer à travailler, mais ne trouve rien. "Au bout de quelques mois, j'ai perdu espoir".
Il y a un an, la jeune fille a décidé de s'installer à Beyrouth. "J'ai pris cette décision quand j'ai senti que je ne pouvais plus rien faire et que je ne pouvais plus me protéger", explique-t-elle. "J'ai failli mourir trois fois à Homs à cause des tirs de francs-tireurs et trois fois on m'a menacée de mort à Salamiyeh. Les chabihha (milices du régime de Assad) m'ont menacée avec des armes à ma sortie du travail. Ils me disaient : +Fais attention, sinon on te tuera+", raconte la jeune avocate.
Et puis, il y avait ce quotidien, marqué par la mort. Anna perd beaucoup d'amis "en prison ou tués par le régime", dit-elle, "et aujourd'hui, d'autres meurent de faim dans les zones assiégées par le régime".
Il y a les autres pertes aussi, moins palpables, mais tout aussi terribles. "Nous avons perdu nos rêves, le sentiment de sécurité. Pendant la guerre, nous avons perdu notre patrie et nos rêves de liberté. En une minute, on peut tout perdre".
Aujourd'hui, c'est la peur du lendemain qui hante la jeune Syrienne, "parce que nous n'avons plus de patrie à laquelle retourner". "Je pense tout le temps à ce qui se passe en Syrie et cela me mine... La guerre va encore durer longtemps malheureusement". Si Anna travaille désormais au Liban et s'est fait des "amis exceptionnels", elle n'a pas "l'impression d'avoir un avenir" dans ce pays. Elle envisage de partir du Liban pour continuer ses études ailleurs.
Aujourd'hui, son seul souhait est que la guerre s'arrête et que les Syriens réfléchissent à un moyen de construire une démocratie dans leur pays. Mais, conclut-elle ,"peut être que maintenant nous avons même peur de rêver".
*Le prénom a été modifié à la demande de la militante interviewée.
Demain, le témoignage de Hanane
Quand une partie de la Syrie, enivrée par les vents du printemps arabe, commence à se soulever...
commentaires (3)
Madame Anna la Syrienne a seulement perdu sa patrie, elle. Elle ne perd pas ses reves car ils ne lui appartenait pas, puisqu'elle a sans aucun doute contribué à faire entrer par mégarde ou par ignorance (plus probable) les loups sionistes très démocrates, les américains (+ leur queue de comète européenne) et les salafo-wahhabites dans la bergerie de ses ancetres. Madame Anna ne peut plaindre que soi-meme et demander pardon à Dieu pour l'erreur fatale qu'elle a accomplie.. Regretter aujourd'hui ne sert à rien.. Il aurait fallu pensé avant et/ou ne pas se laisser gruger comme en Ukraine Aujourd'hui, où le "target" de prédilection sont les tous jeunes; c'es très bien étudié dans les labo sio-américains.
Ali Farhat
01 h 13, le 12 mars 2014