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Liban

Jamil Sayyed à l’Unesco : Paris réaffirme son respect des usages diplomatiques

La demande d'accréditation de l'ancien directeur de la Sûreté générale, Jamil Sayyed, comme délégué permanent des îles Marshall (un archipel, État indépendant du Pacifique) auprès de l'Unesco a occupé une bonne partie du point de presse bihebdomadaire du Quai d'Orsay.


Interrogé à ce sujet, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Romain Nadal, a déclaré que la France est le siège de l'Unesco, que le gouvernement n'a aucun droit de regard sur les nominations au sein de l'organisme international et que la France n'a par conséquent aucun commentaire à faire sur cette affaire puisqu'elle se doit de respecter le droit international.
Dès lors que la procédure d'accréditation du représentant d'un pays est acceptée par les instances de l'Unesco et que la procédure est achevée, ces ambassadeurs permanents bénéficient du statut diplomatique qui leur est dû, a ajouté le porte-parole qui a précisé que les autorités françaises sont tenues de délivrer aux délégués accrédités les documents nécessaires.


Et si un de ces diplomates faisait l'objet d'une condamnation quelconque ?
Des sources proches du Quai d'Orsay ont répondu à cette question, estimant que dans un tel cas ou si le délégué permanent, tout comme n'importe quel autre diplomate accrédité en France, avait un comportement contraire à son statut, il pourrait être déclaré persona non grata. Cela serait applicable également, ont indiqué ces sources, si la personne était condamnée par une instance qualifiée pour crimes contre l'humanité ou si elle était condamnée, même avec effet rétroactif, pour des violations du droit international.


Du côté de l'Unesco, on laisse entendre qu'il n'y a pas une « affaire Jamil Sayyed », comme rapporté par certains articles et commentaires de presse mais tout simplement un dossier présenté par un État membre pour nommer un délégué permanent au siège de la place Fontenoy. « Nous n'avons aucune raison de contester une telle nomination dès lors que le pays concerné formule cette demande en toute souveraineté et qu'il n'y a aucun motif valable de contestation », a déclaré un responsable de l'organisation internationale qui a laissé entendre que le dossier relatif à M. Sayyed est présenté depuis plus de deux mois mais que l'intéressé n'a pas encore présenté ses lettres de créance.


Un diplomate arabe accrédité depuis de nombreuses années en France a commenté hier les articles de presse sur le cas de figure de Jamil Sayyed, déplorant que jusqu'en 1990, les ambassadeurs auprès de l'Unesco étaient, comme il se doit, des hommes de lettres ou des noms connus des mondes de la culture et de l'éducation, mais que depuis cette date, des délégués permanents n'ayant pas cette particularité ont été nommés. Ce qui donne lieu, a-t-il ajouté, à certaines interrogations, notamment lorsque ces personnes sont des hommes d'affaires connus sur la scène internationale.


Toujours est-il qu'après les clarifications du Quai d'Orsay et de la place Fontenoy, qui ont démenti l'existence de tout sentiment de malaise, des ambassadeurs de « grands pays » ont laissé entendre que leur fonction pourrait être dévalorisée avec la multiplication, depuis un certain temps, de représentants permanents de mini-États qui n'ont pas les moyens d'entretenir de coûteuses missions à Paris. D'autant, poursuivent-ils, que les délégués de ces États, pour la plupart des archipels indépendants des océans Pacifique et Indien et de la zone des Caraïbes, ne portent pas la nationalité des pays qui les nomment, notamment des noms d'hommes d'affaires libanais résidant à Paris. On compte en effet dans ce cas plus de dix de nos compatriotes.


Alors que de « méchantes langues » accusent ces nouveaux venus d'opportunisme du fait de nombreux avantages que leur statut diplomatique leur confère (passeports diplomatiques ou spéciaux, facilités de déplacement à travers le monde et autres privilèges), des responsables de l'Unesco affirment que ces ambassadeurs d'emprunt, pour la plupart de richissimes hommes d'affaires, soutiennent économiquement les États qu'ils représentent en leur assurant parfois d'importants investissements internationaux pour leurs projets de développement nationaux.


Pour en revenir au cas « atypique » de Jamil Sayyed, les commentaires tournent autour de son passé de directeur général de la SG libanaise et de sa position par rapport au tribunal international sur le Liban. M. Sayyed considère que l'article paru à son sujet dans Le Figaro de lundi dernier est inspiré par ses adversaires politiques libanais et qu'il contient des allusions déplacées et des imprécisions délibérées. Il a expliqué à titre d'exemple – par l'entremise d'amis parisiens – que, selon des rapports sur les droits de l'homme émanant d'organisations internationales respectées et reconnues par l'ONU, il est considéré comme ayant été abusivement emprisonné quatre ans durant au Liban, après l'assassinat de Rafic Hariri.

De plus, précise un avocat français ayant suivi ce dossier, lorsque Jamil Sayyed s'est rendu tout récemment à La Haye pour réclamer au TSL des documents qui doivent lui permettre de rouvrir le fameux « dossier sur les faux témoins », les greffes de ce tribunal lui ont remis plus de mille documents, ce qui n'aurait pas été fait s'il faisait l'objet du moindre soupçon.
De surcroît, l'avocat parisien rappelle que M. Sayyed a été accueilli par le TSL en tant que « Distinguished Guest » et qu'il a été accompagné lors de sa visite avec toute la courtoisie due à un invité de marque.


L'épisode Jamil Sayyed fera probablement encore des vagues à l'Unesco et pourrait inciter la directrice générale, Irina Bokova, réélue il y a juste quelques mois pour un deuxième mandat de quatre ans, à devenir plus vigilante lorsqu'il s'agira désormais d'accréditer de nouveaux ambassadeurs « atypiques », c'est-à-dire des représentants portant des nationalités de pays tiers.

 

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