La naissance du nouveau gouvernement devait attendre le retour du président Michel Sleiman de Tunisie samedi, mais les choses se sont compliquées hier après que les forces du 8 Mars, et Walid Joumblatt, ont resserré leurs rangs, quémandant le report de la création du prochain cabinet à la semaine prochaine, afin de régler les obstacles qui entravent toujours sa formation, notamment les revendications du général Michel Aoun, toujours attaché aux portefeuilles des Télécoms et de l'Énergie et refusant le principe de rotation imposé par Tammam Salam. En effet, si Michel Aoun a été « laissé » à son propre sort pendant quelques jours par ses alliés du 8 Mars, ceux-ci savent qu'ils ont besoin de lui comme « couverture chrétienne » et ils ont brisé hier leur silence en annonçant clairement que leurs huit ministres démissionneront d'un gouvernement où le général Aoun ne serait pas entièrement satisfait. Une démission qui n'aura pas l'effet voulu si Walid Joumblatt, dont les ministres devraient faire partie des huit centristes, ne se retirait pas lui aussi du cabinet nouvellement formé. Désireux de se dérober à la question de savoir si oui ou non il comptait soutenir le 8 Mars dans une telle démarche, Walid Joumblatt a préféré demander le report de la naissance du cabinet en attendant de régler « l'obstacle aouniste », qui semble en tout cas ne pas être le dernier des obstacles face à Tammam Salam, un autre problème venant gêner la mission de ce dernier.
En effet, une autre difficulté se profile à l'horizon, celle de la répartition des portefeuilles au sein même du 14 Mars, où les composantes chrétiennes demandent que soit prise en considération « la situation des chrétiens au sein du nouveau cabinet », surtout après la décision des Forces libanaises de rester à l'écart et les revendications de Michel Aoun laissées sans réponse.
Par ailleurs, le 8 Mars revendique un portefeuille sécuritaire, soit la Défense, soit l'Intérieur, et refuse que le général Achraf Rifi, proposé par le courant du Futur, devienne ministre de l'Intérieur. Un refus qui a failli saper tous les efforts de Tammam Salam dans la nuit de mercredi, les forces du 14 Mars menaçant de réclamer à nouveau un cabinet neutre et technocrate « si les composantes du 8 Mars comptaient intervenir dans le choix des ministres du 14 Mars ». De son côté, le président Michel Sleiman désire se réserver le ministère de la Défense, en vue de s'assurer que le don saoudien à l'armée sera utilisé à bon escient.
Sur un autre plan, des sources autorisées estiment que le tandem Amal-Hezbollah a tenté de faire une manœuvre en acceptant un gouvernement des 3 huit, pour faire croire à l'opinion publique qu'il n'est pas responsable de l'absence d'un nouveau gouvernement, en laissant délibérément le général Aoun à l'écart, pour qu'il fasse chuter, lui, le cabinet Salam. Le député Ahmad Fatfat a ainsi appelé hier à la formation d'un cabinet « avec ceux qui veulent bien y participer », estimant que « le Hezbollah ne désire pas la formation d'un gouvernement, mais c'est le Courant patriotique libre que l'on fait passer pour fauteur de troubles ».
Le président Sleiman serait-il conscient d'une telle manœuvre et soutiendrait-il un accouchement au forceps du nouveau cabinet après avoir donné largement le temps au 14 et au 8 Mars pour régler leurs différends ? Tout est possible, même si le président a affirmé devant ses visiteurs qu'« il ne souhaite pas clôturer son mandat par une crise politique, en formant un cabinet mort-né ».
Sur ce plan, des sources proches du Hezbollah affirment qu'il faut oublier la formation d'un nouveau cabinet pour l'instant et attendre la première semaine de mars pour reprendre les négociations à la lumière des concertations de Genève 2, qui reprendront à partir du 10 février, et des résultats de la visite du président américain Barack Obama en Arabie saoudite, début mars. S'il est vrai que la naissance d'un gouvernement est étroitement liée aux changements régionaux, la charte de Bkerké rendue publique mercredi pourrait bien s'avérer inutile, même si elle a été saluée hier par le président Sleiman, les Kataëb, M. Salam, qui a contacté le patriarche maronite, et par Walid Joumblatt, qui a délégué le ministre Waël Abou Faour à Bkerké pour exprimer son approbation concernant la teneur de la charte, qui est pourtant restée vaguement floue au niveau des détails qui rendent impossible la naissance du cabinet Salam. Des sources haut placées ont en outre rapporté que Waël Abou Faour aurait demandé hier au patriarche maronite de convaincre soit les Forces libanaises soit le courant aouniste de participer au cabinet activement et d'y rester, pour y sauvegarder un certain équilibre confessionnel.
Chrétiens réfractaires
Mais il semble que les Forces libanaises ne sont pas prêtes de changer d'avis. Hier, le député Fadi Karam a rappelé que « l'insistance de certaines factions pour la mise en place d'un gouvernement politique rassembleur comporte de nombreux dangers car il pourrait courir le risque de l'implosion ». « Toute participation de notre part pourrait par ailleurs être interprétée comme une caution au Hezbollah », a-t-il martelé.
Du côté du CPL, si le ministre démissionnaire Gebran Bassil affirme encore que son courant n'a pas été délaissé par son allié chiite, comme l'attestent certains, « mais il a toujours été au cœur des concertations gouvernementales », le député Alain Aoun a estimé hier que « nos relations sont bonnes avec tous, mais nous avons des points de divergence même avec nos alliés et cela n'induit pas forcément une concordance sur tous les points ».
Justifiant l'attachement du CPL au portefeuille de l'Énergie, Alain Aoun a déclaré que « le bras de fer autour de la formation du cabinet ne se résume pas à un simple tiraillement autour d'un portefeuille, même si cela en a l'air ». « Nous cherchons juste à être des partenaires incontournables du gouvernement sur des décisions plus que jamais d'actualité. Il est certain qu'aucun portefeuille n'est l'exclusivité d'une communauté, mais je crois que l'idée est qu'en ce moment précis où le dossier du gaz est d'actualité, il est essentiel que les chrétiens soient des partenaires importants dans un dossier aussi vital pour l'avenir du pays, surtout qu'ils sont les plus qualifiés pour jouer un rôle de médiateur entre les deux camps opposés », a-t-il affirmé.
Des affirmations vite contestées par le député Fouad el-Saad, qui a déclaré clairement sur ce plan : « Le partenariat entre les composantes au Liban ne se mesure pas par le grand sourire du général Aoun ni par son froncement de sourcils. Ce partenariat ne se réalise pas, par ailleurs, par le poids du général au sein du cabinet. Le président Sleiman est tout aussi chrétien et représente par ses positions la majorité des chrétiens. Retarder le cabinet en attendant la bénédiction de Michel Aoun est en soi une diminution de la représentativité chrétienne de Michel Sleiman et de celle de toutes les personnes qui se chargeront de portefeuilles ministériels . »
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" J'AI RÊVÉ CETTE NUIT QUE JE PARLAIS AU NOUVEAU PREMIER MINISTRE " MONSIEUR TAMMAM SALAM, VOUS FAITES QUOI LÀ AVEC CETTE MARMITE DE CAILLOUX ? JE VEUX SAVOIR QUI VOUS ÊTES EN RÉALITÉ. TU N'AS PAS REMARQUÉ ENCORE QUE LES GENS SONT FATIGUÉS D'ATTENDRE DANS LE VIDE DEPUIS ? TU DOIS LEUR PARLER. TU AS L'IMAGE D'UN HOMME MODÉRÉ. "EN MARIONNETTE OU EN SAGESSE ?" TOUT LE MONDE A COMPRIS SAUF TOI QUE CE N'EST PLUS POSSIBLE DE TRAVAILLER AVEC CES MERCENAIRES. TU ESPÈRES VRAIMENT DOMINER L'IRAN, L'ARABIE SAOUDITE ET ISRAEL VIA LEURS MERCENAIRES ? BIEN SUR QUE NON. À TA PLACE JE PRÉPARE UNE LISTE COMPOSÉE DES GENS COMPÉTENTS ET LIBRES, DIEU SAIT QU'IL Y EN A AU LIBAN BEAUCOUP PLUS QUE TU IMAGINES. PUIS JE FAIS APPEL À UNE CONFÉRENCE DE PRESSE À UNE HEURE DE GRANDE ÉCOUTE. JE RACONTE AUX GENS CE QUE J'AI VÉCU À CE SUJET. PUIS JE LES INFORMES QU'IL Y A ENTRE MES MAINS UNE LISTE PRÈTE DES GENS COMPÉTENTS POUR FORMER CE GOUVERNEMENT NATIONAL. JE VEUX VOIR TOUT LE MONDE DANS LA RUE CE DIMANCHE À MIDI EN UNE MANIFESTATION PACIFIQUE POUR ME SOUTENIR. SI NON JE DÉMISSIONNE ET JE VOUS LAISSE À VOTRE DESTIN ENTRE LES DENS DES CROCODILES. VIVE LE LIBAN LIBRE. MALHEUREUSEMENT, JE VIENS DE ME RÉVEILLER ET JE RÉALISE QUE CE N'ÉTAIT QU'UN BEAU RÊVE.
15 h 10, le 07 février 2014