
Un agent de sécurité inspectant les dommages causés par une frappe israélienne sur un bâtiment de Wadi Jilo, à l’est de Tyr, le 6 juin 2024. Mahmoud Zayyat/AFP
Le Hezbollah va (de nouveau) un peu plus loin. Jeudi, pour la première fois, le Hezbollah a annoncé avoir « lancé des missiles sol-air en direction d’avions de guerre israéliens qui ont violé l’espace aérien libanais », parvenant à les repousser. Un développement inquiétant pour Israël, dont la stratégie militaire repose en grande partie sur la supériorité aérienne et qui a l’habitude de violer l’espace souverain libanais sans encombres. Contacté par L’Orient-Le Jour, le bureau de presse du parti chiite a confirmé qu’il s’agissait de la première fois que ses combattants lancent des missiles contre des avions de chasse israéliens. Le Hezbollah a déjà utilisé des missiles sol-air, mais pour cibler des drones israéliens. « La distance des avions de guerre, leur taille et leur rapidité sont différentes que celles des drones. Alors évidemment, il s’agit aussi de différents missiles que ceux lancés contre des drones », a expliqué la porte-parole de la formation.
Autre développement notoire : dans la nuit de mercredi à jeudi, une attaque de drone lancée par le Hezbollah contre la localité de Hurfeish, à cinq kilomètres de la ligne bleue, a tué un soldat israélien et blessé neuf autres. Cela a fait grimper à 15 le nombre de soldats israéliens qui ont perdu la vie dans cette bataille, auxquels il faut ajouter la mort de 9 civils, selon les autorités de Tel-Aviv. Au total, le Hezbollah a revendiqué pas moins de sept attaques jeudi, visant notamment la caserne israélienne de Zebdine, dans les fermes contestées de Chebaa, ainsi que la position israélienne d’al-Baghdadi, en face du village libanais de Meïs el-Jabal. Il dit également avoir pris pour cible du « matériel d’espionnage » dans la localité israélienne de Metula. De son côté, Israël a ciblé, via une frappe de drone, une moto à Aïtaroun, ont confirmé une source médicale et des résidents à notre correspondant dans le Sud, Mountasser Abdallah. Peu après cette frappe, le Hezbollah a annoncé la mort d’un de ses combattants, Hussein Hourani, né en 1988 et originaire de Bint Jbeil. Selon les informations de notre correspondant, il s’agit bien de la victime de la frappe à Aïtaroun. Depuis le 8 octobre, 331 membres du Hezbollah ont été tués dans des frappes israéliennes au Liban et en Syrie, selon notre décompte, en plus de 69 civils et 20 secouristes.
« Dix minutes » avant la frappe
Dans la nuit de mercredi à jeudi, Israël a également bombardé le village de Wadi Jilo, dans le caza de Tyr. L’aviation israélienne y a ciblé une maison de trois étages, qui a été totalement détruite. Des habitations proches ont également été sévèrement endommagées et ont pris feu, notamment un bâtiment abritant une fabrique de produits d’entretien. Quatre blessés ont été évacués de ce bâtiment. Lors des opérations d’extinction des incendies à Wadi Jilo, deux secouristes de la Défense civile libanaise ont été blessés. Quelques minutes avant cette frappe, qui a également détruit un entrepôt d’une société d’électroménager, plusieurs habitants ont reçu des messages d’avertissement sur leur téléphone. « Bonsoir. Ici Ibrahim. J’ai des nouvelles urgentes et importantes. Le bâtiment de deux étages situé en face de la pharmacie de Ali à Wadi Jilo sera pris pour cible dans quelques instants, il est sur le point de sauter, évacuez tout le monde immédiatement ! » peut-on lire sur ce message écrit en arabe et envoyé par un numéro anonyme commençant par +45, l’indicatif téléphonique du Danemark. « Lorsque j’ai reçu le message à 3h27, je l’ai pris au sérieux car nous entendions déjà le bruit des avions au-dessus de nous, raconte Hussein Hijazi à notre correspondant. J’ai immédiatement évacué ma famille lorsque nous avons entendu une explosion près de nous, un projectile tiré par un avion israélien en guise d’avertissement. Puis, environ dix minutes après la réception du message, l’attaque a eu lieu »,
raconte-t-il. Il ajoute que plusieurs habitants des maisons environnantes ont également reçu des messages similaires ou encore des appels téléphoniques.La société propriétaire du bâtiment, une entreprise d’électroménager du nom de Jaber, a déploré dans un communiqué la perte de « centaines de milliers de dollars » de produits dans ce bombardement. Le texte remercie par ailleurs le travail des équipes de secours et d’ambulanciers qui ont éteint l’incendie et déblayé les décombres.De son côté, l’armée israélienne, par l’intermédiaire de son porte-parole arabophone Avichay Adraee, a affirmé dans un communiqué publié sur son compte X avoir ciblé « des sites militaires du Hezbollah pendant la nuit, notamment un dépôt d’armes à Wadi Jilo et deux autres sites près de la région de Aadchit ». Cette frappe contre le village de Aadchit, dans le caza de Nabatiyé, a fait trois blessés légers. Plus tard, un autre bâtiment de trois étages a été ciblé par un nouveau raid de l’aviation israélienne à Aïtaroun, faisant deux autres blessés.
Élargissement de la guerre : « une erreur », selon des experts en Israël
En l’absence d’avancées diplomatiques, les affrontements entre l’armée israélienne et le Hezbollah se sont intensifiés ces derniers jours, faisant craindre une extension du conflit. D’influents responsables israéliens ont dans ce cadre appelé le gouvernement à lancer une opération militaire pour repousser le Hezbollah loin de la frontière. Dans la presse, certains experts israéliens ont partagé leurs analyses sur un éventuel élargissement du conflit. Joel D. Parker, chercheur au Centre Moshe Dayan d’études sur le Moyen-Orient et l’Afrique, a exprimé son inquiétude dans le Haaretz, qualifiant une offensive israélienne au Liban d’« erreur désastreuse ». Il en va de même pour l’analyste israélien Ori Goldberg, interviewé par Arab News, qui estime qu’« Israël ne peut pas se permettre une guerre sur deux fronts ».
M. Parker considère qu’Israël a mal géré la communication publique, la diplomatie et l’aide humanitaire pendant les huit mois de guerre à Gaza, entravant ainsi ses objectifs militaires. « Israël doit convaincre ses alliés qu’un cessez-le-feu avec le Hezbollah est le but final, affirme ce dernier, et que ses objectifs doivent être réalistes, pas comme celui d’éradiquer totalement le Hamas de Gaza », note-t-il. Israël doit fixer un « objectif clair et communicable » à la communauté internationale. Une guerre au Liban sans respect des droits humanitaires, comme à Gaza, entraînerait une couverture médiatique mondiale négative et une probable censure de l’ONU, souligne l’expert. De plus, les États-Unis ne soutiendraient pas une telle offensive. Dans son commentaire au Haaretz, M. Parker propose ainsi des alternatives et insiste sur des mesures plus raisonnables, telles que « contraindre le Hezbollah à un désarmement important », qui pourrait selon lui être soutenu par l’État libanais. En revanche, dans les propos de M. Goldberg à Arab News, si le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu présente la guerre au Liban comme la seule option viable pour permettre aux Israéliens déplacés de rentrer chez eux, alors « il est fort possible qu’il puisse rallier suffisamment de soutien », estime-t-il. « Dans cette guerre, il n’y a pas de place pour l’erreur », conclut l’expert Joel D. Parker.
Washington a mis en garde contre une offensive au Liban, selon Axios
L’administration américaine a mis en garde Israël ces dernières semaines contre l’idée d’une « guerre limitée » au Liban qui pourrait pousser l’Iran à intervenir, rapporte jeudi le site d’information Axios citant deux responsables américains et un israélien, tous anonymes. Cette information a fuité dans les médias alors que l’État hébreu affirmait avoir achevé les préparatifs d’une offensive le long de la frontière avec le Liban, comme l’a confirmé jeudi le chef du commandement nord de l’armée israélienne, Ori Gordin, lors d’une cérémonie marquant les 18 ans de la guerre de 2006 qui avait opposé le Hezbollah à l’armée israélienne, des propos rapportés par le quotidien Haaretz. Les sources contactées par Axios ont plus précisément indiqué que l’administration Biden avait fait savoir au gouvernement de Benjamin Netanyahu qu’elle ne pensait pas qu’une « guerre limitée » au Liban ou une « petite guerre régionale » soient des options réalistes parce qu’il serait difficile d’empêcher qu’elles s’étendent et deviennent incontrôlables. Elle a aussi indiqué que le fait que ces opérations se concentraient sur des zones proches de la frontière entre le Liban-Sud et le nord d’Israël ne fermerait pas la porte à une intervention iranienne. « L’un des scénarios évoqués par l’administration avec Israël est que le Liban pourrait être submergé par des militants des milices pro-iraniennes de Syrie, d’Irak et même du Yémen qui voudraient rejoindre les combats », a encore écrit Axios, sur la base des informations obtenues par ses sources.
Le haut responsable de l’armée israélienne contacté par Axios a déclaré que la situation s’est aggravée depuis le mois de mai parce que le Hezbollah a mené des attaques de drone plus réussies contre des cibles israéliennes, que l’armée de l’État hébreu n’a pas pu intercepter. Il a souligné que, depuis le 7 octobre, les dirigeants politiques ont donné pour instruction à l’armée de se concentrer sur la défaite du Hamas à Gaza et d’éviter la guerre au Liban. Il considère en outre qu’un changement de cette politique pourrait avoir des conséquences considérables. Selon lui, une guerre avec le Hezbollah ou une opération limitée au Liban auraient « d’énormes implications pour Israël » et, après avoir coûté des vies et épuisé les ressources, aboutirait probablement à un accord similaire à celui qui est actuellement recherché entre Israël et le Liban. « Nous devons comprendre cela avant de prendre des décisions », a-t-il déclaré à Axios.
Ils ont repoussé mon c… oui! Soit ils les ont abattu, ce qui n’est pas le cas, soit ils les ont raté. Il me semble que c’est l’explication la plus plausible. En guerre, un avion ayant la tech d’interception de missiles comme Israël en a, n’arrête pas une attaque. Or si le Hezbollah a tiré, comme aucun avion n’a chuté et puisqu’Israël a la tech d’interception, il a donc raté ses cibles et quand les avions ont terminé leur mission ils sont rentrés. Comme toujours le Hezbollah s’arroge desdites victoires à la pyrrhus pour exciter sa galerie.
18 h 14, le 08 juin 2024