En s'impliquant dans la guerre civile syrienne, en envoyant ses hommes combattre aux côtés des forces du régime de Bachar el-Assad, le Hezbollah avait allégué que son objectif premier était d'empêcher les jihadistes, ou les « takfiristes » comme il les appelle, de s'infiltrer au Liban pour y installer leurs réseaux terroristes. « Les Libanais devraient nous remercier pour l'action entreprise, pour les sacrifices consentis », clamaient alors les caciques du parti tout étonnés que l'initiative n'ait pas recueilli une approbation unanime.
De longs mois plus tard, des dizaines de milliers de morts plus tard, le terrorisme ne frappe plus à nos portes, il les a carrément défoncées et c'est sur le sol libanais que les « takfiristes » viennent réclamer des comptes au Hezbollah, c'est sur le sol libanais qu'ils s'acharnent à lui faire rendre gorge pour tous les forfaits commis en Syrie. Merci donc au parti de Hassan Nasrallah d'avoir réussi aussi brillamment à protéger le Liban des méfaits du jihadisme, mille fois merci pour avoir prouvé, une fois de plus, qu'en matière de stratégie ses experts sont imbattables, sont les plus chevronnés.
Des voitures piégées, des kamikazes malades de leur soif de vengeance, des obus qui s'abattent sur des localités paisibles et des Libanais, la peur aux tripes, qui désertent les lieux publics : voilà le tableau d'un quotidien qu'on prétendait vouloir protéger et qui est ouvert aujourd'hui à tous les vents, à toutes les conspirations porteuses de haines et de discordes.
Les monstres sont parmi nous, ils nous narguent tous les jours, nous menacent de mille apocalypses, veulent éliminer le « chiisme hérétique », entraîner les sunnites dans leur folie meurtrière et trucider les nouveaux « croisés chrétiens ». Les monstres sont parmi nous et c'est le Hezb par sa folle équipée en Syrie qui leur a ouvert le chemin menant au désastre collectif.
Redisons-le une fois pour toutes, sans mettre de gants : tout comme en juillet 2006 lorsque le rapt de soldats israéliens a fourni à l'État juif le prétexte tant attendu pour entreprendre son agression meurtrière contre le Liban, le parti de Hassan Nasrallah en intervenant aujourd'hui en Syrie dans une guerre qui ne le concerne pas a quasiment invité la Qaëda et ses sous-traitants de Daech et d'al-Nosra à le rejoindre sur le ring libanais, celui de tous les règlements de comptes...
Mais la véritable proie n'est pas celle que l'on pense : ce sont les sunnites modérés qui sont surtout dans la ligne de mire de la Qaëda, ce sont les sunnites du Liban que les jihadistes veulent embrigader dans leur croisade contre les chiites. Saad Hariri ne s'y est d'ailleurs pas trompé, invitant rapidement ses coreligionnaires à ne pas tomber dans le piège, à rester sourds aux appels à la « guerre sainte » lancés par la nouvelle internationale terroriste.
Il n'en reste pas moins que le danger est réel : tant que la guerre se poursuivra en Syrie, tant que le Hezbollah y sera enlisé jusqu'au cou, tant que Bachar el-Assad s'accrochera à son siège présidentiel, les jihadistes n'arrêteront pas de progresser, d'étendre les tentacules de la terreur jusqu'au Liban.
Et Genève 2 ? Une toute petite lumière dans un long tunnel, un point de départ pour un parcours marathonien. Bachar el-Assad, lui, mise plus que jamais sur la « menace takfiriste » pour bétonner son régime... et prolonger du même coup l'agonie de son peuple.
Le ring libanais le plus faible parmi les pays arabes , restera ainsi celui de tous les règlements de comptes tant que les libanais seront toujours divisés entre rites et confessions . Triste .
13 h 17, le 27 janvier 2014