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À La Une - Turquie

2014: une année cruciale pour Erdogan, dont le départ fait rêver les éditorialistes

L'année écoulée a été marquée par une mobilisation inédite contre le gouvernement de l'AKP.

"Neptune en mars, c'est la guerre, le sang, les opérations chirurgicales", prévient une astrologue réputée sur l'avenir du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan en 2014. REUTERS/Umit Bektas

"Je souhaite pour cette nouvelle année une poussée démocratique, un changement politique." A Istanbul, Süleyman n'est pas le seul à rêver d'un changement. Comme lui, de nombreux éditorialistes espèrent voir partir en 2014 le leader turc contesté, Recep Tayyip Erdogan.

"Peut-être que cette année, on viendra à bout de l'AKP", espère Süleyman, 65 ans, concierge d'un immeuble à Istanbul, qui vote depuis toujours pour le Parti républicain du peuple (CHP).
"Je préfère me souhaiter de l'amour en 2014...", dit, rêveuse, Tugba, 20 ans, étudiante, qui "ne (se) fait pas beaucoup d'illusions sur la vie politique". "2014 ne changera rien, tranche-t-elle. La situation dans notre pays est critique mais Erdogan gagnera quand même les élections."


L'année écoulée a été marquée par une mobilisation inédite contre le gouvernement du Parti de la justice et du développement (AKP, issu de la mouvance islamiste), qui règne sans partage sur le pays depuis onze ans.
La contestation née en juin contre un projet urbain, symbolisée par la défense du parc Gezi près de la place emblématique de Taksim, à Istanbul, s'est rapidement muée en un vaste mouvement de contestation contre son gouvernement.
Et depuis quinze jours, le pouvoir est dans la tourmente dévastatrice d'une enquête anti-corruption sans pareil qui a révélé les fragilités de M. Erdogan, qui reste l'homme politique le plus populaire de Turquie.
Ces révélations ont entraîné l'incarcération d'une vingtaine de personnalités proches du pouvoir, la démission de trois ministres clé et un large remaniement ministériel, sans cependant vraiment étouffer la crise.

 

"Il est temps de prier"
Le calendrier électoral qui s'annonce, avec des élections municipales en mars et la première présidentielle au suffrage universel direct en août, cristallise les passions.


"2013 a été la pire année qu'a pu connaître l'AKP depuis qu'elle est au pouvoir", mais "2014 va être encore plus difficile", prévient de son côté Ismet Berkan, éditorialiste dans le journal à gros tirage Hürriyet.
"Il est temps de prier", écrit son collègue Yilmaz Özdil dans le même quotidien: "Pour la jeunesse de ce pays, je souhaite des années à venir sans Tayyip Erdogan".
Une brève que beaucoup d'internautes se sont amusés à abondamment partager sur les réseaux sociaux.
"En 2013, sa santé psychologique s'est franchement détériorée; en 2014 il va beaucoup regretter l'an écoulé", pense Emin Cölasan, un journaliste connu et farouche opposant de M. Erdogan dans Sözcü. Le Premier ministre va "se dire: +en fait je n'ai pas su profiter de ma chance avant+".

 

Gare aux "problèmes de santé"
"Neptune en mars, c'est la guerre, le sang, les opérations chirurgicales", prévient une astrologue réputée sur l'avenir du Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan en 2014. "Cette année a été très difficile pour le Premier ministre", souligne  Rezzan Kiraz, qui tient une chronique dans le journal Sözcü. "Même si ces évènements ont mis à mal son moral, il n'a pas été tant affecté que cela", juge-t-elle. En revanche, le mois de mars "sera très négatif". "Une trop grande nervosité pourrait causer des problèmes de santé à Recep Tayyip Erdogan", avertit-elle encore, avant de conclure : "Il devra être plus tolérant s'il veut vivre des jours meilleurs".


M. Erdogan qui va bientôt fêter ses 60 ans, a subi en 2012 deux interventions chirurgicales au colon qui l'ont obligé à se reposer pendant plusieurs semaines. Il avait balayé à l'époque les interrogations insistantes qui planaient sur sa santé, démentant être atteint d'un cancer.


Dans ses voeux, le Premier ministre a de nouveau dénoncé mardi soir le "complot" ourdi contre son gouvernement. Il a longuement rappelé les projets économiques du gouvernement dans les années à venir, se projetant jusqu'en 2023. "Saturne allié au soleil lui donnera en 2014 encore une grande fermeté", prévient d'ailleurs Rezzan Kiraz.

 

Le président turc, Abdullah Gül, a, pour sa part, lancé mardi soir un appel pressant au respect de l'Etat de droit en Turquie alors que le gouvernement est engagé dans un bras de fer avec le pouvoir judiciaire.

Lors de son traditionnel voeux du nouvel an, le chef de l'Etat turc a mis l'accent sur l'union et la fraternité.
"Nous devons nous abstenir de toutes positions et comportements pouvant nuire à notre état de droit démocratique, à notre union et prospérité ainsi qu'à la stabilité politique et à l'atmosphère de confiance économique", a affirmé le président Gül dans un message publié tard mardi.

Des procureurs ont lancé une enquête pour corruption qui éclabousse l'entourage de M. Erdogan qui, de son côté, a sanctionné l'acharnement de la police en procédant à une purge dans ses rangs.
La magistrature, où une puissante confrérie musulmane, dirigée par Fetullah Gülen, qui était son allié avant de lui déclarer la guerre, est très influente, est aussi dans la ligne de mire du gouvernement qui souhaite la mettre au pas.
Le gouvernement a tenté de modifier les pouvoirs de la police de façon à empêcher de nouvelles enquêtes mais sa démarche a été bloquée par la justice.

"La démocratie est le régime des règles, avec des institutions qui reposent sur la séparation des pouvoirs", a averti M. Gül. M. Gül est un compagnon de route du Premier ministre dans l'islam politique, avant d'être élu à la magistrature suprême en 2007. Il a cependant adopté une position nettement plus modérée que M. Erdogan lors de la fronde anti-gouvernementale de juin.
Les deux hommes pourraient devenir de futurs adversaires politiques même s'ils n'ont pas pour l'instant dévoilé leur intention de se présenter à la présidentielle d'automne prochain, qui sera pour la première fois tenue au suffrage universel.

 

 

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