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À La Une - Liban - Consommation

« Le problème n’est pas le ramadan, mais la situation politique »

Commerçants et consommateurs libanais font les frais d’une année économiquement difficile.

Malgré les soldes drastiques affichés, les clients se font rares dans un contexte économique difficile.

Comme le reste de l’année, le flot de voitures ne tarit pas à l’entrée de la rue Hamra. En cette heure de pointe, même les motards ont du mal à se frayer un chemin entre les véhicules indisciplinés. Pourtant, à peine passé l’immeuble de la Fransabank, le trafic se fluidifie. Une fois n’est pas coutume, la rue habituellement bouillonnante de la capitale tourne bel et bien au ralenti. Sur les trottoirs, les terrasses des cafés se font pratiquement vides tandis que les rares passants pressent le pas sans même se retourner sur les 70 à 80 % de soldes affichés sur les vitrines. Cela faisait bien longtemps que la rue Hamra ne s’était pas endormie.


Il faut dire que tous les ingrédients sont réunis pour paralyser l’activité économique. La saison estivale, déjà plombée par les événements sécuritaires à répétition, n’a pas bénéficié de son lot habituel de touristes. En effet, sur les six premiers mois de l’année, le nombre de visiteurs au Liban a diminué de 12,7 % pour atteindre son plus bas niveau en cinq ans. Pour la première fois, les touristes arabes n’ont pas constitué la part la plus importante du nombre total de visiteurs. Or, le boycott du pays par les monarchies du Golfe a coûté cher au Liban. Les ressortissants arabes qui représentent habituellement 45 % des dépenses détaxées remplissaient les hôtels et restaurants libanais en période estivale. Cette année, les professionnels ne peuvent désormais compter que sur la clientèle locale, les Libanais de la diaspora ayant eux aussi déserté le pays.


Accoudée derrière son comptoir, Maria, commerçante dans un magasin de confiseries, semble ravie de rompre sa solitude pour répondre aux questions de L’Orient-Le Jour. « Plus qu’un mauvais ramadan, c’est une très mauvaise année, se désole-t-elle. Du mois d’avril à juin, les clients se faisaient déjà très rares, mais avec le ramadan, c’est encore pire. Les touristes arabes ne sont plus là et les Libanais ont tendance à se serrer la ceinture, vu les difficultés économiques. »


Un peu plus loin, dans un magasin de chaussures de la même rue, Saïd, le responsable du magasin, dresse le même constat. « Depuis trois ans, les choses vont de mal en pire, explique-t-il, évoquant les mêmes raisons. Mais le problème n’est pas le ramadan, c’est la situation politique ! », s’insurge-t-il. « Il n’y a plus de touristes, donc moins de consommateurs, et les choses ne sont pas près de s’améliorer. Les Libanais, eux, n’ont pas les moyens de dépenser autant que les touristes. »


Observant timidement la vitrine d’une célèbre enseigne de vêtements, c’est effectivement ce que confie Maïssa, 33 ans. « Je n’achète que ce dont j’ai besoin, je ne me permets plus d’extras. Depuis deux ans, la situation économique est devenue si difficile que je suis obligée de faire attention, explique-t-elle. Je préfère garder mon budget pour l’alimentaire, payer l’école de ma fille ou encore d’éventuels frais médicaux. Les vêtements ne sont plus aujourd’hui une priorité. » Si à l’intérieur du magasin, Wafa’, 28 ans, a elle décidé de se faire plaisir, son constat est le même : « Les prix ne cessent de grimper et cela ne se justifie pas. » « J’habitais à Dubaï où les salaires sont trois fois plus élevés, et pourtant les prix étaient les mêmes qu’ici, que ce soit en matière d’habillement, d’alimentaire ou de loisirs ! Nous allons entrer en récession, il faut que les choses changent ! », s’indigne-t-elle.


Le tableau n’est pas plus rose dans la restauration. « C’est le pire ramadan que nous ayons jamais connu depuis 2006 », confie le responsable d’une célèbre chaîne de restauration rapide. Les explications sont toujours les mêmes : la crise économique, l’absence de touristes, le ramadan n’étant qu’un facteur minime. « Ce n’est pas le jeûne le problème, mais la situation politico-sécuritaire. Les touristes représentent tout de même 30 % de nos consommateurs en saison estivale », poursuit-il. Mais si les tables sont pratiquement vides pour le déjeuner, au moment de l’iftar, l’établissement affiche complet.


Du côté des professionnels comme des consommateurs, l’heure n’est ainsi pas à la fête. Tous sont victimes de la conjoncture économique, elle-même soumise aux caprices politiques incessants.

 

 

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