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À La Une - Eclairage

En dépendant de l’Iran, Assad risque de devenir un pion

En vertu d'une configuration nouvelle, le Hezbollah et l’Iran sont directement impliqués dans les structures de commandement des forces syriennes.

Le Guide suprême iranien, Ali Khamenei, et le président syrien, Bachar el-Assad. Archives AFP

Le soutien militaire de l’Iran et du Hezbollah a donné un nouvel élan au régime de Bachar el-Assad dans sa lutte contre l’insurrection, mais cet appui a un prix. En effet, le président Assad risque aujourd’hui de perdre une bonne partie de son autonomie vis-à-vis de Téhéran et de devenir un pion sur l’échiquier régional, dans une lutte d’influence bien plus large entre sunnites et chiites, qui ne prendra peut-être même pas fin s’il est contraint à la démission, estiment experts militaires et diplomates en poste dans la région.

 

Ayant perdu des milliers d’hommes issus de sa communauté alaouite (une branche du chiisme), alors que la guerre civile est dans sa troisième année, et soucieux de préserver ses unités d’élite, Bachar el-Assad se repose progressivement sur le Hezbollah et d’autres milices chiites alliées à l’Iran pour inverser la tendance. Les unités alaouites de l’armée syrienne, avec leur important arsenal de missiles et de pièces d’artillerie, sont en retrait actuellement dans les combats. Elles utilisent leurs armes pour ouvrir des brèches dans le dispositif des insurgés, dans lesquelles s’engouffrent ensuite les miliciens syriens formés par les Iraniens et par le Hezbollah. Dans certains cas, ce sont des hommes du Hezbollah, organisation soutenue par l’Iran, qui livrent les combats de rue, selon des chefs insurgés et d’autres sources proches de l’opposition.


En vertu de cette configuration nouvelle, le Hezbollah et l’Iran sont donc directement impliqués dans les structures de commandement des forces d’Assad, ce qui entame l’autorité du régime et la base du pouvoir alaouite sur laquelle repose le pouvoir de la famille Assad depuis une quarantaine d’années.

 


Avantage de courte durée ?
Contrairement aux chiites d’Irak, d’Iran et du Liban, les alaouites de Syrie sont plutôt des laïcs, dénués du zèle religieux qui a persuadé plusieurs milliers de miliciens chiites de venir combattre en Syrie aux côtés du régime de Damas. De source proche des services de sécurité dans la région, on estime qu’environ 15 000 combattants chiites venus du Liban et d’Irak se trouvent en Syrie. Ils ont contribué aux victoires remportées récemment par le régime, qui a renversé la tendance aux dépens des insurgés après deux années de combats. Lorsque les insurgés se sont retrouvés dans des secteurs confinés, comme la ville frontière de Qousseir, ils ont été en situation de grand désavantage. Qousseir a été reconquise par le régime avec l’aide du Hezbollah début juin. Les quartiers sunnites de la grande ville de Homs sont, eux, durement bombardés, et les banlieues de Damas aux mains de l’insurrection sont assiégées.


Toutefois, l’avantage militaire retrouvé récemment par Assad pourrait bien n’être que de courte durée, malgré la pression grandissante exercée sur les insurgés, estiment experts militaires et diplomates. La chute de Qousseir et la rhétorique triomphaliste du Hezbollah ont poussé l’Arabie saoudite, sunnite, à agir. Le royaume, dit-on dans les milieux diplomatiques, assume le rôle principal dans le soutien aux insurgés, en coordination avec les États-Unis. Les signes d’un regain de soutien pour l’opposition sont également visibles à Alep, dans le nord de la Syrie, où l’offensive gouvernementale appuyée par le Hezbollah est pour l’heure bloquée, selon l’opposition. Même si Assad reconquiert Homs, conserve Damas et emporte les faubourgs jusqu’alors aux mains des rebelles, comme Jobar, Barazeh et Qaboun, il ne dirigera qu’une part considérablement réduite du pays.

Difficile reconquête du pays
De leur côté, les combattants kurdes renforcent leur emprise sur une région de facto autonome, dans la province céréalière et pétrolière de Hassaka dans le nord-est du pays. Des islamistes purs et durs dominent la majeure partie de deux provinces à l’est de Hassaka et ils sont massivement présents à Alep. Assad ne conserve, pour l’essentiel, que Damas et un corridor reliant la capitale à Homs, aux bases militaires de la côte méditerranéenne, bastion alaouite, et aux bastions du Hezbollah au Liban. Pour Andrew Terrill, chercheur à l’école militaire de l’armée américaine, les insurgés « tiendront » car Assad a perdu un trop grand nombre de régions. « Remporter des batailles n’a rien à voir avec remporter la guerre, car ceux qui subissent les offensives s’en remettront dans une certaine mesure. Les insurgés restent armés et à même de frapper le régime », estime-t-il. « Assad pourrait l’emporter dans le sens où il pourrait se maintenir au pouvoir et ne pas être évincé directement, mais je n’imagine pas qu’il pacifie le pays parce qu’il y a à mon sens trop d’insurgés et trop de résistance », analyse-t-il.


De nouvelles armes devraient par ailleurs parvenir aux insurgés d’Arabie pour rééquilibrer les forces, mais aussi des armes américaines. Salim Idriss, chef de l’Armée syrienne libre (ASL), est attendu cette semaine aux États-Unis où il va plaider en faveur de la livraison rapide d’armes américaines. L’Iran, pour sa part, continue d’apporter une aide militaire au régime Assad, mais aussi une aide financière de l’ordre de 500 millions de dollars par mois, selon des sources de l’opposition.

 

 

Pétition

« Le salut de la Syrie réside dans le renversement de ce régime »

 

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