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Lifestyle - Une Libanaise à Paris

Le Liban au fond de la mémoire

Je n’ai jamais connu la guerre parce que Joseph Safieddine a toujours vécu à Paris... Jusqu’en 2006, lorsque sa famille se retrouve coincée dans ce qu’on a appelé la seconde guerre du Liban. Les bombardements, il les a vécus de très loin ; mais ne pas savoir si les siens étaient vivants fut traumatisant. De cet épisode tragique, ses neurones de scénariste ont saisi et composé des dialogues débordants de vie avec néanmoins beaucoup de non-dits. Il insiste pour dire que la BD raconte avant tout une histoire d’amour. Son personnage principal, Darius, est libanais, la quarantaine « bien entretenue » sous tous les aspects, séducteur, bon vivant, mais complètement névrosé par cette guerre. Il a du mal à saisir l’instant présent, « il se construit des petites digues pour survivre » à ce qu’il a vécu... Effectivement, le Liban est évoqué en filigrane dans l’histoire et Darius, comme beaucoup d’entre nous, a des angoisses et il est à la recherche du temps perdu.
Comme la psychiatrie ou l’industrie pharmaceutique qui médicalisent nos émotions, Darius utilise son métier pour vendre du rêve. Il crée des souvenirs factices, vendus, sous forme injectable, à des clients en mal de sensations fortes. Sauf que lorsqu’il se défonce, ce n’est pas pour faire la tournée des Rolling Stones : il s’injecte des souvenirs simples entouré de sa famille, taquinant sa petite sœur lors d’une grande tablée ou fumant le narguilé sur une place de Beyrouth... Il devient ainsi très vite dépendant de ces injections de bonheur qui, inéluctablement, intoxiquent son réel. C’est une vie factice qu’il s’invente avec ses piqûres. Lorsqu’il croise, dans sa vraie vie, ses amis de longue date, des souvenirs plus douloureux refont surface. Plus de légèreté, d’humour graveleux, Darius plonge dans les cauchemars de sa mémoire.
Après Les Lumières de Tyr où des superhéros actionnent les disjoncteurs des générateurs d’électricité pour permettre aux gens d’avoir des ventilateurs qui fonctionnent la nuit, Joseph Safieddine fend la carapace de Darius le séducteur hâbleur et examine avec beaucoup de finesse la très riche question de ce qu’on fait de notre mémoire.

Je n’ai jamais connu la guerre de Joseph Safieddine, mise en images par Maud Begon. Aux éditions Casterman.
Je n’ai jamais connu la guerre parce que Joseph Safieddine a toujours vécu à Paris... Jusqu’en 2006, lorsque sa famille se retrouve coincée dans ce qu’on a appelé la seconde guerre du Liban. Les bombardements, il les a vécus de très loin ; mais ne pas savoir si les siens étaient vivants fut traumatisant. De cet épisode tragique, ses neurones de scénariste ont saisi et composé des...

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