L’armée syrienne s’apprête à lancer une offensive sur Alep après avoir reconquis Qousseir avec l’appui du Hezbollah, d’après un responsable des services de sécurité syriens.
L’appui du Hezbollah a été déterminant dans la bataille de Qousseir, remportée par le régime à l’issue de deux semaines de bombardements et de combats. D’ailleurs, la chaîne télévisée du Hezb, al-Manar, a diffusé hier des images de Syriens célébrant la reprise de la ville. Selon des experts, le régime, fort de son succès à Qousseir, se prépare à attaquer d’autres régions qui échappent à son contrôle. Pour le quotidien el-Watan, proche du pouvoir, l’armée a « commencé à se déployer à grande échelle dans la province d’Alep, en préparation à une bataille qui sera livrée à l’intérieur de la ville et dans sa périphérie ». La question qui se pose aujourd’hui est d’une grande évidence : le Hezbollah réitérera-t-il l’expérience de Qousseir et ira-t-il combattre pour Alep aux côtés des hommes de Bachar el-Assad ? Pour l’instant, tout laisse à croire que oui...
Les rebelles avaient lancé la bataille d’Alep il y a près d’un an et depuis, des combats et des bombardements quotidiens secouent l’ex-capitale économique de Syrie. L’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH), qui s’appuie sur un réseau de militants et de sources médicales, avait déjà rapporté vendredi que l’armée massait des « milliers » de soldats dans la région d’Alep, et que le Hezbollah avait envoyé « des dizaines de ses cadres pour former des centaines de Syriens chiites au combat ».
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Autres fronts
Depuis samedi, des combats se déroulaient aussi sur d’autres fronts, en particulier à Alep et Hama. Ces violences ont fait au moins 68 morts samedi dans le pays, selon un bilan provisoire de l’OSDH, qui s’appuie sur un réseau de militants et de sources médicales. Après l’annonce de la prise de Boueida el-Charqiya, dernier fief rebelle de la région de Qousseir, l’OSDH s’est inquiété du sort des rebelles et des civils qui s’y étaient réfugiés. « Où sont les centaines de civils et de blessés qui ont fui Qousseir pour se réfugier à Boueida ? On n’a aucune nouvelle d’eux », a affirmé Rami Abdel Rahmane, directeur de l’OSDH.
Hier, l’ONG a aussi rapporté qu’un groupe de rebelles islamistes avaient abattu un adolescent de 15 ans après l’avoir entendu utiliser une expression qu’ils ont considérée comme blasphématoire, dans un quartier d’Alep tenu par les insurgés. L’adolescent a été tué de deux balles, l’une dans la bouche, l’autre dans la nuque, devant ses parents et ses frères et sœurs, a précisé M. Abdel Rahmane. Selon lui, il s’agissait probablement d’un groupe de jihadistes étrangers. « Ils parlaient l’arabe classique, pas le dialecte syrien », a-t-il expliqué. L’OSDH a condamné cette exécution comme « un acte criminel et un cadeau » à Bachar el-Assad, dans la mesure où « ce type de criminalité est exactement ce qui fait que les gens en Syrie craignent la chute du régime ». L’organisation a exigé l’arrestation des meurtriers, en assurant « travailler à les identifier ».
Portes fermées...
Sur le plan diplomatique, la situation en Syrie a été au menu d’un entretien téléphonique entre le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et le président russe Vladimir Poutine, après l’offre de Moscou de remplacer le contingent autrichien sur le Golan. « Nous avons parlé de sujets liés à la Syrie où la situation est chaque jour un peu plus complexe », a déclaré M. Netanyahu dans un communiqué. Jeudi, des heurts avaient opposé rebelles et troupes syriennes pour le contrôle de Kuneitra, poste de passage dans la zone démilitarisée entre la Syrie et Israël.
Dans ce contexte, l’opposition syrienne a redit samedi son hostilité à la conférence de paix voulue par Washington et Moscou, dite Genève 2, après la prise de Qousseir. « Ce qui se passe aujourd’hui en Syrie ferme totalement les portes à toute discussion sur des conférences internationales et initiatives politiques car la guerre déclarée par le régime et ses alliés à la région a atteint un niveau qu’on ne peut ignorer », a dit le président par intérim de la Coalition nationale de l’opposition, Georges Sabra, dans une conférence de presse à Istanbul. Le peuple syrien « ne pense qu’à une seule chose : épargner la mort à nos enfants », a-t-il ajouté, en affirmant que l’opposition refusait d’être entraînée dans un « conflit confessionnel » voulu selon lui par le Hezbollah ainsi que l’Irak et l’Iran, pays à majorité chiite, face aux rebelles en majorité sunnite. Déjà le 30 mai, M. Sabra avait assuré que l’opposition ne participerait pas à une conférence internationale, pour laquelle aucune date précise n’a été fixée, tant que « l’Iran » et le Hezbollah soutiendraient sur le terrain le régime de Bachar el-Assad.
Le secrétaire général de la Coalition nationale, Moustapha Sabbagh, a pour sa part réitéré l’appel aux pays soutenant les rebelles à leur envoyer des armes pour faire face à la puissance de feu du régime. « Nous avons répondu à toutes les craintes des amis, mais tout ce que nous avons eu en échange ne sont que des promesses dont peu a été honoré face à la machine de guerre de l’Iran et du parti de Satan et à la poursuite de l’envoi de l’armement russe au régime fini », a-t-il affirmé à Istanbul.
Eclairage
« Au cours des six à sept mois à venir, ce sera le début de la fin »
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