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Liban

« Impossible d’évaluer le taux de destruction en cas de grand séisme », souligne le CNRS

Suite à notre dossier paru dans notre édition du lundi 25 mars et intitulé « Comment rester debout face à un grand séisme ? », Alexandre Sursock, directeur du Centre de géophysique du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS), nous envoie les précisions suivantes. Rappelons que dans ce dossier, un des experts interrogés, Loutfallah el-Hajj, ancien secrétaire aux finances de l’ordre des ingénieurs et ancien professeur, avait dit craindre « la destruction d’environ 70 % du Grand Beyrouth » en cas de séisme majeur. Une assertion fortement nuancée par M. Sursock dans le texte suivant :


« Le reportage paru dans L’OLJ (du lundi 25 mars) sous le titre “Comment rester debout face à un grand séisme ?” a le mérite d’attirer l’attention sur les problèmes socio-économiques et techniques qui sont associés à la gestion d’un tel événement. C’est une préoccupation qui nourrit la réflexion de plusieurs groupes de travail, commissions publiques et chercheurs scientifiques.


Cependant, l’assertion de destructions considérables dans le Grand Beyrouth, évaluées à 70 %, mérite peut-être d’être explicitée. Nous pensons qu’elle a besoin d’être fortement nuancée.
Le temps géologique n’est pas le temps de l’activité humaine. En quatre mille ans d’histoire, le site de Beyrouth n’a subi qu’un seul grand séisme attesté, celui de 551 de notre ère. Si les destructions qui en résultèrent ont été, sans aucun doute, considérables pour les communautés humaines d’alors, il n’est pas évident de s’inspirer de cet événement pour construire un scénario plausible pour notre époque : il n’est pas possible de faire un parallèle entre les moyens techniques et l’organisation de nos sociétés d’hier et d’aujourd’hui. Ainsi, cette science qu’est l’archéosismologie peine à évaluer les magnitudes des grands tremblements de terre historiques et leur temps de retour.


Cela étant dit, quand on avance un tel chiffre, on brandit la menace de l’apocalypse. Il serait donc prudent de préciser 70 % de quoi au juste. Du nombre de bâtiments ou de la valeur du patrimoine en immeubles et en équipements ? On peut inférer du contexte de l’article que les bâtiments anciens sont davantage exposés et qu’ils font l’essentiel de ces 70 %. Même réduite à cette catégorie, l’estimation est considérablement excessive à nos yeux ainsi que nous l’enseigne le plus récent événement de cet ordre, le séisme du 16 mars 1956.


Cet événement, de magnitude 6, avait son épicentre à quelque 30 km au sud de Beyrouth. En dehors de la panique qu’il a suscité au sein de la population, on n’a observé à Beyrouth que lézardes et dommages mineurs. On ne peut pas dire que l’agglomération urbaine de Beyrouth en a souffert. Restent les dommages importants subis par différents villages répartis à travers le pays, dommages ayant essentiellement touché les constructions traditionnelles en adobe, ou celles qui étaient pauvrement construites.


Quelle est alors la proportion de bâtiments de cette qualité dans le tissu urbain beyrouthin ? À notre avis, elle est très faible, étant donné le taux de renouvellement du patrimoine de notre ville et son accélération actuelle.
Beyrouth est essentiellement un promontoire rocheux offrant de solides fondations aux ingénieurs civils. Là où le rocher est absent, des solutions techniques nouvelles ont été utilisées. En disant cela, nous ne cherchons pas à minimiser le risque, mais seulement à ne pas l’amplifier en déclarations à l’emporte-pièce.


Les travaux actuels des chercheurs au CNRS tendent à quantifier ce risque. D’autres chercheurs universitaires, notamment à l’AUB et à l’USJ, s’en préoccupent. Ils ne peuvent confirmer le fameux chiffre. Ces études sont nécessaires pour soutenir l’action des ingénieurs et des assureurs. Cependant, l’homme de la rue s’en soucie peu et n’incite pas les autorités à financer la recherche dans ce domaine.


L’action péremptoirement nécessaire serait d’encourager la prise de conscience de la société civile à notre exposition au risque sismique : il faut que tout un chacun sache, par l’éducation dans les écoles ou par des campagnes publiques d’éveil, que notre pays est en bordure d’une zone géologique active qui peut être frappée par un événement majeur tous les quelques millénaires. C’est ainsi seulement qu’on réduira notre fragilité éventuelle. Libre à cette société de choisir les moyens de l’affronter immédiatement ou de laisser ce soin aux générations futures. »

Alex SURSOCK
Directeur du Centre de géophysique CNRS Liban

Suite à notre dossier paru dans notre édition du lundi 25 mars et intitulé « Comment rester debout face à un grand séisme ? », Alexandre Sursock, directeur du Centre de géophysique du Conseil national de la recherche scientifique (CNRS), nous envoie les précisions suivantes. Rappelons que dans ce dossier, un des experts interrogés, Loutfallah el-Hajj, ancien secrétaire aux finances...
commentaires (1)

Pourtant, il existe une façon. SEUL, Celui qui ne sera pas dans sa maison et sera hors de la ville, après le séisme, il pourrait évaluer les dommages... Image trop exagérée ? Peut-être ! Souhaitons qu'il en soit ainsi !

SAKR LEBNAN

08 h 28, le 28 mars 2013

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Commentaires (1)

  • Pourtant, il existe une façon. SEUL, Celui qui ne sera pas dans sa maison et sera hors de la ville, après le séisme, il pourrait évaluer les dommages... Image trop exagérée ? Peut-être ! Souhaitons qu'il en soit ainsi !

    SAKR LEBNAN

    08 h 28, le 28 mars 2013

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