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Jean qui pleure, Jean qui rit

Qui de l’homme politique ou du simple citoyen est le plus coupable ? Qui du chef suprême ou du militant inconditionnel est le plus critiquable ? Le Libanais d’en haut qui se croit tout permis et veut convaincre son petit monde que les vessies son bien des lanternes, ou le Libanais d’en bas qui gobe tout ce qu’on lui raconte et qui marche à tous les coups dès que ses instincts les plus primaires sont titillés ?
Interrogation légitime à l’aune de l’incroyable manipulation qui a secoué la scène politique, une « performance », très peu orthodoxe, qui a ouvert la voie aux plus absurdes des surenchères, brouillé toutes les cartes et entraîné des parties, jusque-là réfractaires à toute compromission, dans le sillage de ceux-là mêmes qu’elles accusaient de soumission aux volontés d’autrui.
Pour être clair, il a suffi que Michel Aoun lève l’étendard de la défense des droits des chrétiens, dans la perspective des prochaines élections législatives, pour que les Forces libanaises et les Kataëb foncent dans la brèche communautaire largement ouverte, en oublient quasiment leur alliance passée avec le courant du Futur et la lutte commune menée avec la composante sunnite du pays. Une communauté qui s’estime d’autant plus flouée qu’elle s’était mobilisée, depuis la mort de Rafic Hariri, sous le fanion d’une libanité inconditionnelle, sous le slogan « Liban d’abord », base constituante du mouvement du 14 Mars.
Ingratitude, erreur de calcul ? Non, mais juste la peur panique de voir le Courant patriotique libre rafler la mise, verrouiller l’électorat commun et se poser en seul défenseur des valeurs chrétiennes. Ce qui, le jour des élections, risquerait de se traduire par un tsunami aouniste qui effacerait des mémoires l’aberration du pacte conclu entre le CPL et le Hezbollah, un document d’entente qui a donné au parti chiite la possibilité de se prévaloir d’une couverture chrétienne pour bétonner son OPA sur l’État.
Entre grincements de dents, remises en question et rectification tardive du tir, l’ardoise est déjà lourde et les conséquences se révèlent désastreuses : crise de confiance au sein du 14 Mars, résurgence aiguë d’un communautarisme préjudiciable à la paix civile et échange d’accusations de nature à créer de nouvelles ruptures.
Le projet orthodoxe ne passera évidemment pas, pour la simple raison qu’il est en contradiction avec l’essence même de la Constitution. Mais le seul fait qu’il ait pu recueillir le ralliement d’autant de parties, même celles qui y ont été amenées pour des raisons strictement électoralistes, est révélateur de la duplicité des uns et de la frilosité des autres.
Le résultat en a été un bouleversement dans l’échelle des pertes et profits : Aoun, hier en net recul dans les sondages, se retrouve ragaillardi, intronisé « grand manitou » de la cause chrétienne, le sunnisme extrémiste reprend du poil de la bête, n’hésite plus à prendre possession de la rue, et le Hezbollah, qui hier encore était en position défensive, cible de toutes les critiques, récolte tranquillement les dividendes de la partie de poker menteur jouée par ses adversaires...
Certains se frottent les mains de joie, d’autres se mordent les doigts de dépit, il y a un Jean qui pleure et un Jean qui rit. Et il y a le dindon de la farce : le citoyen invité à exercer son droit électoral.
Ailleurs dans le monde, dans les démocraties exemplaires, ce droit est une bénédiction, au Liban, les dinosaures du communautarisme l’ont transformé en malédiction !
Qui de l’homme politique ou du simple citoyen est le plus coupable ? Qui du chef suprême ou du militant inconditionnel est le plus critiquable ? Le Libanais d’en haut qui se croit tout permis et veut convaincre son petit monde que les vessies son bien des lanternes, ou le Libanais d’en bas qui gobe tout ce qu’on lui raconte et qui marche à tous les coups dès que ses instincts les plus...
commentaires (4)

Jean suie ...profession ramoneur ...!

M.V.

10 h 59, le 25 février 2013

Tous les commentaires

Commentaires (4)

  • Jean suie ...profession ramoneur ...!

    M.V.

    10 h 59, le 25 février 2013

  • Pour éviter de vivre cette formule Jean qui pleure et un Jean qui rit, le plus court chemin serait de reporter donc sine die les élections dans un pays ou tout traine . Antoine Sabbagha

    Sabbagha Antoine

    08 h 35, le 25 février 2013

  • Pris entre le marteau Ikhwano-Salafiste et l'enclume Fakihiste, l'élément chrétien nage dans l'appréhension et la crainte de son devenir. Le projet dit Orthodoxe est comme une perche qu'on tend au nauffragé. Le Généralissime, fin limier, lâché par et au service de ses séides, la tient et la tend. Les nauffragés, Tous les nauffragés, veulent s'y accrocher et monter sur la barque du Salut ; d'où l'apparition des autres perches et des autres barques. Puis, accourent les prétendus sauveurs avec les filets de sauvetage... plus de trous que de filet... et ça a créé une tornade dans laquelle se débattent SAUVEURS ET NAUFFRAGÉS... perches, barques et filets troués... Qu'attend-on ? Comme d'habitude... LA GHALEB OU LA MAGHLOUB ! Et tous les cinq, dix, quinze ou vingt ans l'histoire se répètera... JUSQU'A QUAND ???

    SAKR LEBNAN

    03 h 09, le 25 février 2013

  • Il faut être vraiment assez primaire pour juger qu'un projet de loi électorale, nettement oeuvre de laquais des "moukhabarat" baassistes de Damas et de leurs associés de wilayet el-faqih, puisse constituer un instrument de "défense des droits des chrétiens". Ledit projet dynamite littéralement la Constitution et les fondements du Liban exposant ce pays aux pires aventures. Ledit projet est une supercherie très dangereuse, visant tout particulièrement les chrétiens par le projet irano-syrien au Liban. Même avant son adoption, est évoquée maintenant du côté sunnite, outre le côté Mollahs d'Iran et leur bras au Liban, la division du pouvoir en trois tiers, sunnites-chiites-chrétiens. Preuve en est la déclaration hier du mufti du Mont-Liban, Mohammad Ali Jouzou. Les partis des Kataeb et des Forces libanaises n'ont pas su se dégager d'une aventure risquée et irrresponsable.

    Halim Abou Chacra

    22 h 45, le 24 février 2013

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