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À La Une - religion

France : radicalisation, suicide, guerre... Les aumôniers musulmans hyper-sollicités

"On leur demande de régler les problèmes que l’État n'arrive pas à gérer seul".

L'islam est la deuxième religion de France avec 2,1 millions de fidèles "déclarés". Reuters/Benoit Tessier

Encore peu nombreux en France, les aumôniers musulmans sont de plus en plus sollicités dans les prisons, l'armée ou les hôpitaux par les fidèles mais aussi par l’État, ce qui pose des problèmes d'effectifs et de formation.


Les croyants attendent un soutien face à la détention, la maladie ou la guerre, mais "les pouvoirs publics sont également très demandeurs", souligne l'historienne de la laïcité Valentine Zuber. "Ils demandent aux aumôniers musulmans de régler les problèmes que l’État n'arrive pas à gérer seul, comme la radicalisation ou les suicides en prison", ajoute-t-elle.


Dans l'armée, en cas d'opération en terre musulmane, les aumôniers doivent faciliter les rapports avec la population. C'est notamment le cas en Afghanistan, où ils conseillent le commandement sur les traditions locales.
Dans les hôpitaux, ils sont parfois sollicités pour pacifier les relations quand des musulmans ne veulent pas être auscultés par un médecin du sexe opposé.


La loi de 1905 sur la laïcité, qui organise la séparation des Églises et de l’État, interdit à la République de salarier des religieux mais organise une exception, les aumôneries, pour "garantir la liberté de culte" dans les milieux fermés (prison, hôpitaux, internat...).
Près d'un siècle plus tard, aucune aumônerie musulmane n'a émergé bien que l'islam soit devenu la deuxième religion de France avec 2,1 millions de fidèles "déclarés", selon l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee).


En 2003, un rapport officiel sur la laïcité recommandait de recruter des aumôniers musulmans dans les prisons et l'armée. La même année, la création du Conseil français du culte musulman (CFCM) donnait un interlocuteur à l’État et permettait de nommer en 2005 les premiers aumôniers nationaux aux armées et aux prisons, puis aux hôpitaux en 2006.

40% des détenus font le ramadan
Les progrès ont ensuite été rapides. Il y a actuellement 152 aumôniers musulmans salariés dans les prisons et 30 postes supplémentaires sont annoncés d'ici fin 2014. L'armée en emploie 38 et l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP) douze, mais seulement trois à temps plein.


"On devrait être trois fois plus", estime toutefois Abdelhak Eddouk, aumônier musulman à la maison d'arrêt de Fleury-Mérogis, près de Paris, en rappelant que selon le contrôleur général des prisons, 40% des détenus font le ramadan.
"Il ne faut pas se précipiter pour rattraper notre retard", ajoute-t-il néanmoins, soulignant l'importance de recruter des aumôniers dotés d'une formation solide.
"Pour lutter contre la radicalité, il faut connaître la théologie mais aussi la langue, l'histoire et les lois de la France", dit-il.


Actuellement, il n'existe qu'une formation pour les aumôniers musulmans, répartie entre l'Institut al-Ghazali de la Mosquée de Paris et l'Institut Catholique de Paris.
Mohammed Azizi, aumônier à l'AP-HP, a suivi ce cursus. Il voudrait continuer à se former sur les enjeux spécifiques à l'hôpital "pour comprendre les règles d'hygiène, la psychologie de l'écoute, les enjeux des dons d'organes...".


De leur côté, les aumôniers militaires sont en train d'organiser une formation continue en interne, précise Mohamed Ali Bouharb, aumônier en chef adjoint à l'armée de terre.
Pour lui, les aumôniers de l'armée ont la structure la plus organisée. "L'armée a créé une forme de cléricat musulman: on a un chef, rattaché à l'état-major, quatre adjoints pour chaque corps, des aumôniers régionaux par zones de défense." "Nous sommes une expérimentation pour les pouvoirs publics", dit-il. "Nous pourrions baliser les moyens d'encadrer l'islam de France."

 

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