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À La Une - Spectacle

« L’extraordinaire » Pierre Dulaine émaille le plateau de « Dancing with the Stars »

Le champion du monde de danse de salon, auteur de la méthode d’enseignement qui porte son nom, en révèle le secret à « L’Orient-Le Jour ».

Le jury de « Dancing with the Stars » avec la chanteuse Naya. Les « stars choisies » sont soit des figures émergentes, soit des célébrités en déclin.

Dans la manière de danser de Pierre Dulaine, les valeurs de vie s’expriment : immuables, mais si subtilement incorporées à la cadence volatile du mouvement qu’elles deviennent l’expression du bonheur.


De passage au Liban la semaine dernière, en tant que juré invité au 4e épisode du programme « Dancing with the Stars », produit par la chaîne MTV, le danseur et instructeur de 68 ans a charmé la dolce vita du plateau, aménagé au Forum de Beyrouth. Assis sur sa chaise de juré, le dos parfaitement droit, que valorise son gilet-chemise classique, rehaussé d’une cravate jaune pâle, le quadruple champion du monde de danse de salon se délecte aux passages successifs des « stars » et de leur compagnon de danse, lors des répétitions qui précèdent la diffusion directe du programme dimanche. Son humilité, imprégnée d’humour et de spontanéité, fait presque fi de la rigueur technique, « difficile à acquérir en moins d’une semaine d’entraînement ».

L’identité réinventée, sitôt retrouvée
C’est surtout l’édition libanaise de ce programme qui le touche. « Je vois se produire la danse de salon, qui est toute mon existence, dans une région du monde jadis peu sensible à ce genre d’activités », confie-t-il. « Je reprends contact avec mes racines », confie-t-il, se remémorant la période difficile de son adolescence, de père irlandais et de mère palestinienne, dans le Londres des années 57-58, où la présence des Arabes était peu tolérée. Suivant les pas de sa mère, qui utilisait son prénom « Georgette » comme gage d’une prétendue appartenance française, Boutros a réinventé son nom de toutes pièces et affiché une nationalité qui n’était pas sienne. Pourtant, c’est à la même époque qu’il prenait contact pour la première fois avec lui-même, grâce à la danse.


« Je me suis (re)trouvé dans la danse. » L’adolescent timide d’alors, à la dentition déformée par une incisive cassée, le cœur resté à Haïfa (en Palestine, à l’époque où il était né), accumulant avec une passion acharnée de petits boulots pour se payer ses cours de danse, et plus tard le loyer d’un quatre mètres carrés, a appris à « devenir ce que je suis ».


Et la méthode Pierre Dulaine en est l’essence : fondée sur « le respect et la compassion », elle incite à danser pour « montrer la vérité ». Une philosophie stimulée par « le contact physique » des partenaires. Le toucher entretient une écoute infatigable de l’autre, entièrement vouée à l’instant présent. Dès lors, l’audience est conviée non pas à applaudir le spectacle, mais « à répondre à l’invitation d’entrer dans la sphère des acteurs de performance ».

L’impression de s’envoler
Le langage corporel devient, même en dehors de la performance, celui de l’ouverture. Pierre Dulaine le portera comme une seconde peau tout au long de son parcours, dans ses passages successifs, comme de furtives lumières de bohème, dans les cabarets du monde, jusqu’à sa découverte de New York en 1973, qu’il ne quittera plus. Yvonne Marceau devient sa partenaire de danse à partir de 1976. La grâce d’Yvonne, puisée dans des années de ballet, cette « musique visuelle », épousera la délicatesse de Pierre Dulaine.


Le perfectionnisme de la technique devient celui de la fluidité, « des mouvements circulaires, dont on ne discerne ni le début ni la fin ». « Yvonne est la pulpe de l’orange et moi la peau qui l’enveloppe et la protège », explique Pierre Dulaine. Dans la danse, le corps se mue dans un espace infini, qui paraît se condenser dans le microcosme du mouvement humain. C’est là que s’exaltent, comme une revivification, les nuances musicales. Le prolongement naturel de cette dynamique est le mouvement du lift (le port de la partenaire) introduit par Pierre Dulaine lui-même en 1966.

« Donner une voix » aux autistes et aux démunis
Son apport à la danse s’est exalté dans l’enseignement, d’abord à travers sa propre école, The American Ballroom Theater Company (la Compagnie américaine de danse de salon). C’est un défi différent qu’il relèvera en 1994 en introduisant dans les écoles publiques « Les classes dansantes » (Dancing Classrooms), destinées aux élèves de 10-11 ans. « Les enfants détectent les artifices. » Il tente donc de consolider en eux « les bases de la civilité, dans un monde qui en manque de plus en plus ». L’expérience des classes dansantes, retranscrite dans une production cinématographique, Take the Lead, en 2006, où Antonio Banderas incarne le rôle de Pierre Dulaine, s’est étendue à 33 villes et cinq pays (dont la Jordanie). L’instructeur, qualifié d’ « extraordinaire » par le New York Times, a réédité l’expérience dans l’État de l’Arizona avec des enfants autistes et dans un centre de SDF. Tous (re)deviennent des ladies et des gentlemen.


Pierre Dulaine a reproduit l’expérience avec les enfants israéliens et palestiniens à Haïfa. La même expérience sera entamée le 25 février prochain à Belfast dans quatre écoles, deux protestantes et deux catholiques.
« Oui, je suis vraiment heureux », conclut Pierre Dulaine, révélant au passage qu’il a vendu son domicile au sud de la France (plan de la Tour) qui avait été son havre de sérénité pendant 28 ans. « Tout change », même le bonheur ne saurait se figer. Ses joues écarlates accentuent la lueur de ses yeux, légèrement bridés, qui se referment dans une sérénité presque enfantine, comme si tous les projecteurs du plateau de « Dancing with the Stars » s’étaient réfugiés dans ses prunelles.

Dans la manière de danser de Pierre Dulaine, les valeurs de vie s’expriment : immuables, mais si subtilement incorporées à la cadence volatile du mouvement qu’elles deviennent l’expression du bonheur.
De passage au Liban la semaine dernière, en tant que juré invité au 4e épisode du programme « Dancing with the Stars », produit par la chaîne MTV, le danseur et instructeur de 68...
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