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À La Une - Reportage

Un touriste japonais tue l'ennui sur les lignes de front syriennes

Le temps d'une semaine, Toshifumi Fujimoto arpente les quartiers d'Alep, armé de deux appareils photos et d'une caméra.

"Chaque matin je me rends sur une ligne de front", raconte Toshifumi Fujimoto, camionneur japonais, qui tue l'ennui sur les lignes de front syriennes. Photo prise le 27 décembre 2012. AFP/Stringer

Dans le courant, Toshifumi Fujimoto est un chauffeur de poids-lourds japonais. Mais Toshifumi Fujimoto a un problème : ses navettes quotidiennes entre Osaka, Tokyo et Nagasaki l'ennuient terriblement.

 

Pour casser la routine, le camionneur a décidé de s'offrir des vacances, mais pas n'importe quelles vacances : un voyage à haute teneur en adrénaline. Quelques jours durant, il tue l'ennui en risquant sa vie pour visiter les lignes de front du conflit en Syrie.

 

"Chaque matin je me rends sur une ligne de front", assure-t-il, avant de poser aux côtés de combattants rebelles dans la vieille ville d'Alep, dans le nord de la Syrie, secouée par des combats particulièrement féroces depuis plus de six mois.

"J'y vais seul car aucun guide ne veut aller au front, et moi je veux y aller tous les jours. C'est très excitant et le pic d'adrénaline est incomparable", estime ce barbu de 45 ans, père et divorcé, qui dit mener au Japon une vie solitaire et monotone.

 

Le temps d'une semaine, il arpente les quartiers les plus meurtris de la métropole du Nord, armé de deux appareils photos et d'une caméra, vêtu d'un uniforme militaire, "celui de l'armée japonaise". Il est devenu une attraction locale.

Il parle à peine anglais, encore moins arabe, et ne peut se faire comprendre que grâce au logiciel de traduction Google translate.

 

Toshifumi Fujimoto en action, le 30 décembre 2012 dans le quartier

aleppin Seif al-Dawlah, le 30 décembre 2012. AFP/Stringer

 

 

"Je vais en première ligne, avec des soldats de l'Armée syrienne libre", force d'opposition armée. "Je suis touriste en zone de conflit", résume le Japonais, qui conduit d'ordinaire un camion citerne chargé de gasoil, d'eau ou de chocolat.

 

La Syrie n'est pas sa première destination vacances d'un genre particulier. Si certains amateurs de sensations fortes trouvent leur bonheur en sautant dans le vide ou en chassant le requin, M. Fujimoto consacre en effet son temps libre à sillonner les points chauds du Moyen-Orient, caméra au poing, publiant sur les réseaux sociaux les films et photos de ses vacances en enfer.

  

Il dit être allé au Yémen en septembre 2012, lors de heurts meurtriers autour de l'ambassade américaine, au Caire l'année précédente pendant la période agitée qui a suivi le renversement de Hosni Moubarak, ainsi qu'à Homs, dans le centre de la Syrie, fin 2011, où il a défilé contre le régime aux cris de "Allah Akbar". Et programme déjà un séjour avec les Talibans en Afghanistan.

 

A Alep, il se déplace sans casque ni gilet pare-balles, "trop lourds pour courir". Le Japonais prend le temps de cadrer ses clichés, alors que les rebelles autour de lui hurlent : "cours, cours, il y a des snipers". "Je ne suis pas une cible pour les tireurs embusqués, car je suis un touriste, pas comme vous, les journalistes", assure-t-il. "Et je n'ai pas peur qu'il me tirent dessus ou me tuent. Je suis un mélange de samouraï et de kamikaze".

 

 

Le "touriste" japonais dans la vieille ville d'Alep. AFP/Stringer

 

 

Il met ses photos en ligne "pour que mes amis les voient", affirmant ne pas les vendre.

 

Mais cet amateur de pêche et de chasse a raconté à ses chefs qu'il partait en vacances en Turquie, "sinon ils m'auraient dit que je suis fou".

 

Il a déboursé 2.500 dollars (1.900 euros) pour venir en Turquie, d'où il est entré clandestinement en Syrie, et verse 25 dollars par jour à un Syrien qui le loge et lui permet d'utiliser internet pour télécharger ses clichés.

 

Père de trois filles, il a perdu tout contact avec elles "depuis plus de cinq ans. Ni par Facebook, ni par internet, rien de rien..." C'est la seule chose qui fasse trembler sa voix et couler quelques larmes sur son treillis.

 

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