L'ancien Premier ministre libanais Saad Hariri accuse le Hezbollah d'envoyer des combattants en Syrie, dans une interview au journal Le Monde parue mercredi.
Interrogé sur une implication du parti chiite libanais dans la répression de la révolte syrienne, le chef du Bloc du futur, principal parti d'opposition libanais, répond : "Oui, et de toutes les manières possibles". "Même s'il s'en défend, je pense qu'il envoie des Libanais en Syrie", ajoute M. Hariri.
Depuis plus de 40 ans, le régime syrien s'appuie fortement sur les Alaouites, tenants d'une branche de l'islam chiite. L'ancien président Hafez el-Assad, tout comme son fils, l'actuel président Bachar el-Assad, appartiennent à cette minorité dans un pays majoritairement sunnite. L'Iran, le régime syrien et le Hezbollah libanais entretiennent des liens privilégiés. Observateurs et experts estiment que le Hezbollah joue un rôle clef à la frontière entre le Liban et la Syrie.
Selon Saad Hariri, le régime de Bachar el-Assad va certainement tomber à l'issue du conflit. "L'important, c'est qu'on l'empêche de poursuivre le génocide qu'il mène contre son peuple. Plus sa chute prendra du temps, plus il y aura des dégâts et plus la réconciliation sera longue", ajoute le leader sunnite.
M. Hariri appelle également la communauté internationale à fournir des armes aux rebelles. "Aujourd'hui, il y a un équilibre des forces entre le gouvernement et l'opposition, alors que cette dernière n'a pas d'armes sophistiquées. Si on lui donne les armes dont elle a besoin, l'opposition pourra gagner facilement", estime l'ancien Premier ministre.
Pour lui, la France a un rôle très important à jouer dans la crise syrienne : "Aujourd'hui, il y a un débat sur les zones protégées (safe zones) dont on dit qu'elles ne peuvent pas se faire sans l'accord de l'ONU. Si la France encourage ses alliés à donner à l'opposition syrienne ce dont elle a besoin, cette opposition pourra établir elle-même des zones protégées", dit M. Hariri.
Le chef de l'opposition libanaise écarte néanmoins l'éventualité d'une guerre civile en Syrie. "Personne n'a intérêt à une guerre civile, sauf peut-être l'Iran, qui veut une Syrie instable – comme l'Irak – pour y garder de l'influence", juge-t-il.
Commentant la dernière interview donnée par Bachar el-Assad, Saad Hariri déclare : "Ça m'a fait mal au ventre. C'est un homme qui voit son peuple se faire tuer et qui réagit comme s'il ne se passait rien. Il traite enfants, femmes et vieillards comme des terroristes pour la seule raison qu'ils n'ont pas la même opinion que lui. Tout ce qu'il veut, c'est le pouvoir et l'argent. Un tel homme doit payer un jour un prix."
Sur la scène libanaise
Interrogé sur la possibilité d'une contagion du Liban par le conflit syrien, Saad Hariri assure ne pas craindre une guerre civile, "car aucun parti libanais n'en veut". "Plus le régime syrien s'affaiblira, plus il s'efforcera de nous emporter dans sa chute. On l'a vu avec l'affaire Samaha, qui est un acte de guerre", prévient-il toutefois.
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L'ancien ministre Michel Samaha a été arrêté manu militari le 9 août par les services de renseignement des Forces de sécurité intérieure (FSI). Il est accusé, ainsi que de hauts responsables sécuritaires syriens, d'avoir préparé des attentats au Liban dans le but de provoquer des dissensions confessionnelles.
Commentant la politique de distanciation vis-à-vis de la crise syrienne adoptée par le gouvernement de Najib Mikati, Saad Hariri déclare : "Être sage, c'est bien, mais il ne faut pas être soumis".
Installé à Paris, Saad Hariri dit vivre "hors du Liban pour des raisons de sécurité". "Ces derniers mois, deux dirigeants du mouvement du 14 Mars (rassemblement de partis libanais antisyriens), Samir Geagea et Boutros Harb, ont été la cible de tentatives d'assassinat. Mais je rentrerai, bien sûr", assure-t-il. "Je participerai aux prochaines élections législatives et je les gagnerai, pour autant que le scrutin ne soit pas truqué", dit-il.
Saad Hariri est le fils de l'ex-Premier ministre Rafic Hariri assassiné le 14 février 2005 à Beyrouth, un meurtre pour lequel le Tribunal spécial pour le Liban (TSL) entend juger par contumace quatre suspects, qui sont membres du Hezbollah.
Interrogé sur le procès attendu, Saad Hariri assure : "Le jour où le régime syrien tombera, beaucoup de gens viendront parler au TSL. Je suis persuadé que le procès se tiendra un jour."
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commentaires (5)
Au lieu qu'ils s'assoient, tous les deux, et discutent comment tirer ce Pauvre Pays de ses infortunes et de l'insécurité qui y sévit, ils s'entre-accusent de fouler le nez, tous les deux, dans ce qui ne les regarde pas. Réveillez-vous, ho ! ho ! il y a le Liban à sauver. On s'en fout de tous les voisins. Charité bien ordonnée commence par soi-même !
SAKR LEBNAN
09 h 49, le 12 septembre 2012