Le quotidien des affaires Handelsblatt s’est demandé si le patron de la Bundesbank était « la voix de la raison » ou un « opportuniste » qui n’a « pas de solution alternative à offrir ». Sa voix ne pèse en effet pas plus lourd qu’une autre au sein du conseil des gouverneurs, l’organe de décision de la BCE. Il réunit les gouverneurs nationaux et le directoire, l’exécutif permanent de la banque, composé de six membres.
L’ancien économiste en chef de la BCE, l’Allemand Jürgen Stark, a fustigé « les mesures sentant la panique » de l’institution de Francfort, tandis qu’un responsable du parti conservateur bavarois CSU, en perte de vitesse politiquement, a assimilé M. Draghi à « un faux-monnayeur ».
La chancelière conservatrice Angela Merkel a été plus mesurée, déclarant dimanche qu’elle trouvait « bien que Jens Weidmann rappelle sans cesse ce qu’est la politique » de l’Allemagne. Sauf que cela n’est pas si simple. L’Allemagne est en effet représentée à la BCE par M. Weidmann, mais aussi par Jörg Asmussen, membre du directoire. Or, ce dernier se distingue par une ligne plus proche de celle de M. Draghi, déclarant que la BCE agit « dans le cadre de son mandat » et qu’il ne voit « aucun danger pour les épargnants allemands ».
« Le jeu joué par Asmussen et Weidmann fonctionne bien, d’un côté le pragmatique, de l’autre celui qui rassure la population allemande. Au bout du compte cela fait les affaires d’Angela Merkel, qui est elle-même une pragmatique », assure Ansgar Belke, professeur d’économie à l’université de Duisburg-Essen.
L’opposition entre les deux hommes a un aspect presque cocasse. En 2009, alors que Mme Merkel dirigeait déjà un gouvernement de coalition, la riposte de l’Allemagne face à la crise économique avait en effet été élaborée en grande partie par un tandem de l’ombre : le secrétaire d’État aux finances social-démocrate d’alors, Jörg Asmussen, et le conseiller de la chancelière de l’époque, Jens Weidmann.
M. Belke rappelle par ailleurs que contrairement à ses prédécesseurs, Mario Draghi a choisi de révéler publiquement les rapports de force au sein de l’institution et notamment l’opposition de la Bundesbank aux rachats d’obligations, « ce qui renationalise le débat ».
(Source : AFP)
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