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Nos Lecteurs ont la Parole

L’équilibre Russie-USA et le monde multipolaire

Par Joseph W. ZOGHBI
La crise syrienne a démontré, contrairement à la crise libyenne, qu’il est nécessaire d’avoir un pouvoir et un contre-pouvoir mondial pour trouver des solutions plus équilibrés aux grandes crises. Dans la crise libyenne, la Russie et la Chine ont été prises de court par les pays de l’OTAN et leur ont donné carte blanche pour, soi-disant, arrêter les massacres que l’ancien régime avait « l’intention » de commettre contre les habitants de Benghazi.
Les pays du pacte atlantique ont dépassé le mandat qui leur a été donné pour arriver à leur but ultime : se débarrasser de Kadhafi qui leur avait mené la vie dure avec ses attentats contre les avions de l’UTA et de la Pan Am. Le résultat fut une guerre meurtrière où des dizaines de milliers de morts sont tombés sous les bombes de l’OTAN et des insurgés ainsi que de leurs alliés qataris, dont les objectifs sont totalement différents puisque visant à installer un régime islamique. D’ailleurs la première déclaration faite par le Conseil national libyen fut de déclarer que la charia serait la source des lois sous le nouveau régime. L’une des images les plus infamantes était ce lynchage en direct de l’ancien dictateur. Image qui n’est pas digne de la cause que l’Occident voulait défendre dans ce pays.
Les victimes tombées sous les bombes n’étaient pas le seul résultat dramatique de cette guerre car il y a aussi le chaos le plus total dans ce pays qui risquait tous les jours de se désintégrer en ses trois provinces, la Tripolitaine, le Cyrénaïque et le Fezzan. D’ailleurs, les déclarations d’autonomie ne se sont pas fait attendre ni les guerres tribales qui continuent de faire rage avec leurs cortèges de nettoyages ethniques. En voulant servir une « bonne cause », l’OTAN et ses alliés ont aussi ouvert les magasins d’armes bien fournis de Kadhafi où el-Qaëda et ses alliés se sont servis pour poursuivre leurs actions terroristes dans l’Afrique de l’Ouest, comme le prouve la désintégration du Mali et la destruction du patrimoine mondial à Tombouctou.
Des élections ont bien eu lieu en Libye ; reste à attendre si la démocratie sera viable dans cette ambiance de violence.
Cette guerre a eu lieu parce qu’il n’y avait pas de contre-pouvoir. La crise syrienne est d’un tout autre ordre. Quelles que soient les origines de la crise, la Russie et la Chine, pour diverses raisons stratégiques, n’ont pas voulu laisser le champ libre à l’OTAN et à ses alliés arabo-turcs dans leur entreprise de « libyanisation » de la Syrie. Non seulement ce ne sont pas les mêmes enjeux, puisque la « Sainte Russie » a la seule base marine de la Méditerranée à Tartous et l’une des plus grandes communautés orthodoxes au Proche-Orient, mais elle a trouvé bon de se redresser pour reprendre un terrain que l’Union soviétique avait perdu au début des années 1990. Forte par ses alliés du BRICS, surtout de la Chine, elle a mis un frein à l’hégémonie américaine en commençant par la crise syrienne, avec, à l’horizon, la crise iranienne. L’on retrouve maintenant le monde multipolaire que l’on avait perdu il y a presque vingt ans.
L’avantage certain de ce nouvel ordre mondial qui se dessine est qu’il y a actuellement une possibilité d’arriver à des compromis concernant les crises, plutôt que de laisser une seule partie en décider. Ce n’est pas vraiment une guerre froide, comme certains veulent le croire, puisque le monde a changé et la mondialisation est en marche. De plus, ce n’est plus l’Union soviétique, avec tout son bloc derrière le « rideau de fer » qui suit ses seuls intérêts, mais ce sont les intérêts plus larges, ceux du BRICS notamment qui se dessinent.
L’avantage pour la Syrie, c’est que la crise ne débouchera pas sur une intervention militaire désastreuse, qui avait été le lot de la Libye et dont les impacts seraient encore plus dévastateurs sur les pays environnants, Liban, Turquie, Jordanie, Irak, Israël/Palestine.
Le monde multipolaire est né, et ce n’est pas plus mal.
La crise syrienne a démontré, contrairement à la crise libyenne, qu’il est nécessaire d’avoir un pouvoir et un contre-pouvoir mondial pour trouver des solutions plus équilibrés aux grandes crises. Dans la crise libyenne, la Russie et la Chine ont été prises de court par les pays de l’OTAN et leur ont donné carte blanche pour, soi-disant, arrêter les massacres que...

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