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À quand une loi libanaise sur le statut personnel ? - Loi nationale sur le statut personnel - Liban

Pour ou contre ? Les chefs de communauté se prononcent

Les adeptes d’une loi nationale sur le statut personnel sont formels : ce sont les communautés religieuses qui bloquent la promulgation de la loi.
Les réserves des chefs religieux sont principalement liées au mariage civil, pourtant si revendiqué par la jeunesse libanaise, qui enlèverait aux communautés un pouvoir qu’elles s’efforcent de préserver. Le mariage civil donnerait aussi à la femme l’égalité des droits avec son conjoint. Une égalité qu’aucune communauté religieuse libanaise ne semble prête à lui accorder, malgré certains propos dans ce sens du patriarche maronite, Béchara Raï, qu’on pourrait qualifier de politiquement corrects, mais qui n’ont jamais abouti à la moindre avancée.
Les déclarations officielles de chefs religieux des trois grandes communautés libanaises, sunnite, chiite et maronite, donnent une idée de la situation. Des déclarations décortiquées et expliquées par l’avocat Carlos Daoud, également commentées par le coordinateur des jeunes du Renouveau démocratique, Ayman Mhanna.
C’est à l’occasion de l’inauguration du site Web des tribunaux sunnites chériés que le président de ces tribunaux, le cheikh et juge Abdellatif Derian, a publié le refus catégorique de la communauté sunnite de l’instauration du mariage civil au Liban. Ce refus est lié à trois raisons, considère-t-il. Tout d’abord, dans l’islam, le mariage n’est pas un sacrement, mais un contrat régi par la loi du Coran, autrement dit par la charia. De plus, la polygamie n’est pas contraire aux préceptes de l’islam. Enfin, le divorce est autorisé dans la loi musulmane conformément au Coran. Toutefois, les conditions du divorce dans la loi civile pourraient ne pas être en harmonie avec les conditions prônées par le Coran. Se basant sur l’article 9 de la Constitution libanaise qui accorde aux communautés religieuses la latitude de faire leurs lois sur le statut personnel, le cheikh Derian estime qu’en votant une loi nationale sur le statut personnel, l’État saperait l’autorité et le pouvoir de ces communautés.

Le patriarche maronite crée la surprise
Même opposition au statut personnel civil de la part des instances supérieures chiites. Une opposition exprimée en 2011 par le secrétaire général adjoint du Hezbollah, cheikh Naïm Kassem, et réitérée par le président de la commission chériée au sein du parti de Dieu, cheikh Mohammad Yazbeck. Naïm Kassem s’est ainsi prononcé « contre la laïcisation du statut personnel, ce dernier relevant respectivement de chaque communauté ». Il a observé que le statut personnel chez les musulmans « ne constitue pas une idée matérielle, mais fait partie intégrante de la foi, de la croyance, de la religion et de l’engagement ». « Toute tentative d’aller à l’encontre de ce statut est religieusement interdite (haram) », a-t-il tranché. De son côté, Mohammad Yazbeck a observé que la solution n’est pas, comme le proclament certains, « de séparer l’État de la religion ».
La surprise a été créée par le chef de l’Église maronite, le patriarche Béchara Raï, qui s’est prononcé en novembre 2011 en faveur du « mariage civil obligatoire pour tous les Libanais », à Bkerké, devant 650 écoliers. Il a souligné que « le sacrement du mariage viendrait par la suite et serait l’expression de la conviction religieuse des mariés ».
Selon Me Carlos Daoud, « le patriarche maronite est responsable de ses propos ». Il juge impensable que ces paroles aient été lancées en l’air. « Le patriarche fait de la surenchère, estime de son côté, le militant Ayman Mhanna, car il a déclaré être opposé au mariage civil optionnel, mais en faveur du mariage civil obligatoire. » « Il met ainsi les musulmans dans une position délicate, car ils se sont déclarés contre le mariage civil », explique le jeune homme. « Ce n’est qu’une fuite en avant afin que le mariage civil ne soit pas adopté », constate-t-il encore. « C’est une façon pour le patriarche Raï de dire non, en rejetant la balle dans le camp musulman, tout en faisant montre d’ouverture. » « Autrement, pourquoi n’accepterait-il pas le mariage civil facultatif ? » ne peut-il s’empêcher de demander...
Autant de questions qui restent, pour le moment, sans réponse.

A.-M.H.
Les réserves des chefs religieux sont principalement liées au mariage civil, pourtant si revendiqué par la jeunesse libanaise, qui enlèverait aux communautés un pouvoir qu’elles s’efforcent de préserver. Le mariage civil donnerait aussi à la femme l’égalité des droits avec son conjoint. Une égalité qu’aucune communauté religieuse libanaise ne semble prête à lui accorder,...