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Couverture spéciale de la révolte en Libye - Reportage

Vivre sous les roquettes à Kekla, dans l’Ouest libyen libéré

Dans le village déserté par ses habitants, ne subsistent que les femmes et les enfants des rebelles partis au combat.

Des rebelles libyens courent se mettre à l’abri près du village de Kekla, bombardé quotidiennement par les forces loyales à Kadhafi. Marco Longari/AFP

À première vue, le village de Kekla, tout prêt de la ligne de front dans le Djebel Nefoussa, a l’air déserté. Mais dans les maisons se terrent les femmes et les enfants des rebelles partis au combat. Tous les jours, des roquettes tirées par les kadhafistes s’abattent sur eux.
C’est un bourg qui s’étale de haut en bas de la montagne dorée, juste en face des forces loyalistes. À l’entrée, sur un mur, un tag proclame « Free Libya ». Mais les rues sont vides. Une poignée d’hommes seulement aux postes de contrôle et quelques voitures qui passent en trombe devant les magasins fermés, aux volets verts si typiques de la Libye de Mouammar Kadhafi. La plupart des habitants sont partis se mettre à l’abri à Zenten, centre névralgique de la rébellion dans l’Ouest libyen, dans les villages berbères plus proches de la frontière ou en Tunisie, explique Raduan Alqadi, responsable du centre pour les médias qui vient d’être bombardé.
Mais dans les maisons, elles sont là, avec leurs enfants et un homme pour les protéger. Les femmes, les sœurs, les mères des combattants partis au front à quelques kilomètres de là. « C’est terrifiant, c’est vraiment dangereux. On ne sait jamais quand cela va commencer, combien de temps cela va durer. Chaque jour, je pense que je vais mourir. Mais nos frères se battent, nous ne pouvons pas partir », explique Amina, 27 ans, qui préfère taire son nom de famille pour des raisons de sécurité. Avec ses sœurs, sa mère de 60 ans qui ne peut plus marcher, trois enfants et quatre autres familles, elle vit au creux de la montagne, entre figuiers et oliviers, au bout d’une passe construite par les Italiens. Là où les bombardements sont les plus intenses. Lundi soir, cinq roquettes sont tombées juste à côté. Elles étaient assises sur la terrasse lorsqu’elles ont vu l’éclat blanc à leur passage et le rouge de l’explosion.
En réalité, il n’y a d’endroit sûr nulle part à Kekla, à part peut-être un peu dans les maisons troglodytes. Lundi, une roquette s’est abattue sur une habitation justement en haut de la montagne. Un jeune homme a été légèrement blessé pendant qu’il prenait son petit déjeuner. « Il n’y a pas beaucoup de rebelles ici, on prie Dieu de nous protéger, mais ils tirent des Grad et on ne peut pas répliquer », explique une autre sœur, Halima. À chaque fois, c’est la panique. « On reste assises, on dit Allah Akbar. Les enfants crient, pleurent, on les prend dans les bras pour essayer de les calmer. Le petit, il a sept ans, il fait des cauchemars », poursuit-elle.
À Kekla, il n’y a pas d’essence, l’électricité est coupée la plupart du temps et le réseau téléphonique ne fonctionne plus. Les habitants font des stocks de nourriture, et la nuit, ils ne dorment que d’un œil. Quand ils ne sont pas au front, les hommes viennent se mettre aux postes de contrôle pour protéger le village. Les femmes, elles, cuisinent pour les combattants. « Nous sommes fières d’eux. Nous ne pouvons pas les abandonner », répète Halima.
(© AFP)
À première vue, le village de Kekla, tout prêt de la ligne de front dans le Djebel Nefoussa, a l’air déserté. Mais dans les maisons se terrent les femmes et les enfants des rebelles partis au combat. Tous les jours, des roquettes tirées par les kadhafistes s’abattent sur eux.C’est un bourg qui s’étale de haut en bas de la montagne dorée, juste en face des forces loyalistes. À...