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Déconfiture

Merci les confiseurs : on leur doit toujours des trêves inespérées, un moment de calme auquel on s'accroche parce que toujours annonciateur de violences renouvelées. Des guerres entrecoupées de trêves, des délires oratoires, plus meurtriers que des engins de mort, suivis de silences suspects lourds de menaces, ainsi va le cycle de vie à la libanaise.
Une mauvaise raclée, puis une pause pour panser les blessures ; une violence verbale dans le genre « vous obéissez sinon on vous coupe la main, on vous fracasse le crâne », puis une pilule dorée, avalée de force, pour persuader les derniers des incrédules que les vessies sont bien des lanternes.
Un miracle de plus à mettre au crédit des porteurs de la parole divine, un pied de nez, un bras d'honneur à l'adresse des nostalgiques d'une raison que la déraison a enterré six pieds sous terre.
Merci les confiseurs, les fossoyeurs de la république vous doivent une fière chandelle : l'espace d'une fête, le temps d'une trêve, que d'armes affûtées, de bombes minutées, que de scénarios ourdis comme autant de complots tramés dans les chambres noires des conspirateurs de l'ombre !
Couper des mains, fracasser des crânes : on se croirait revenu à l'âge du Neandertal, aux temps barbares où les hommes n'entendaient raison qu'à coups de massues...
Mais le drame, la vraie tragédie, est ailleurs et se joue à un autre niveau. Si la force et la contrainte sont souvent persuasives, sont utilisées comme arguments convaincants, il est une autre méthode, plus pernicieuse, pour arriver au but recherché : le lavage des cerveaux à grandes eaux, un fleuve d'intoxication dont on a déjà vu les conséquences dans le long cours de l'histoire, de la Première à la Seconde Guerre mondiale, de la Russie soviétique à l'Allemagne nazie.
Démagogie plus totalitarisme : c'est la fleur au bout du fusil que les jeunes et moins jeunes s'en allaient guerroyer, défendre des causes dont ils ne savaient fichtre rien. Des dizaines de millions de victimes plus tard, ils ont fini par réaliser que la guerre est loin d'être une promenade, loin d'être parée de panache et de gloire...
Les Libanais, 200 000 morts plus tard, ont-ils retenu la leçon ? Difficile de le croire : les voilà, en effet, pris dans l'engrenage des doigts accusateurs et des mensonges, bernés par les paroles divines, par les campagnes purificatrices. Purification ! Ah le terrible mot...
Guerres intestines, intercommunautaires ou au sein d'une même communauté, guerres externes liées les unes aux autres : il suffit d'allumer la mèche, de mettre le feu aux poudres et vas-y que je te règle ton compte, que je libère un quartier ou un territoire, que je prenne ma revanche sur l'histoire... Et basta les négociations, les recours aux instances internationales !
Des guerres qui commencent par des slogans complètement fous, par des menaces insensées et au terme du parcours sanglant un remake de ce que le Liban a déjà vécu : des dizaines de milliers de victimes, des handicapés à vie, mutilés, défigurés, des veuves et des orphelins, des maisons détruites, des lieux de culte profanés.
C'est ça les guerres, c'est ça le résultat des lavages de cerveaux, des bourrages de crâne, du poison distillé comme une drogue salutaire. Attention danger : cela fait des mois, de longs mois, des années que les haines sont répandues, incrustées dans les esprits, enracinées dans les cœurs. Si le moteur s'enclenche, rien ni personne ne pourrait l'arrêter.
« Faites l'amour, pas la guerre », hurlaient les pacifistes à l'époque de la guerre du Vietnam. Mais ce n'était que paroles en l'air, puérils, inaudibles face aux terribles machines de guerre.
Les décideurs, les preneurs d'otages, dans les heures sombres de l'histoire, ne carburent, eux, qu'aux bains de sang, ne prennent leur pied que dans la violence, dans les massacres collectifs.
Tous les confiseurs du monde n'y pourront rien ! 
Merci les confiseurs : on leur doit toujours des trêves inespérées, un moment de calme auquel on s'accroche parce que toujours annonciateur de violences renouvelées. Des guerres entrecoupées de trêves, des délires oratoires, plus meurtriers que des engins de mort, suivis de silences suspects lourds de menaces, ainsi va le cycle de vie à...
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