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Jusqu’à la lie

Clamer haut et fort que les responsables, les vrais et les pseudos, se payent la tête des gens, c'est peu dire. L'affirmation est largement en deçà de la réalité, celle que les divers protagonistes s'évertuent à « lifter » au gré des humeurs du moment.
Une danse de Saint-Guy sur un volcan : la formule sied parfaitement à la situation que vivent les Libanais, encore qu'assis sur des chaises que ne renierait pas Ionesco, ils seraient naturellement plus à l'aise dans un théâtre de marionnettes où l'absurdité le disputerait à la démence, le délire à l'imposture.
Les flagrants délits se suivent et se ressemblent étrangement, le dernier en date n'étant pas le moins significatif. Mardi 24 août, 19h30, Hassan Nasrallah, en direct, rassure les Libanais : le Hezbollah n'a rien à voir avec les violentes manifestations liées au problème de l'électricité. Même si le Parti voulait faire chuter le gouvernement, il ne se cacherait pas derrière la rue et irait directement au Parlement.
Au même moment, alors que le Sayyed tenait ces propos lénifiants, Ahbache et Hezbollahis s'étripaient dans les venelles et ruelles tortueuses de Beyrouth-Ouest. Flagrant délit ? Pire, la preuve par trois morts, des destructions massives et une nuit d'épouvante, qu'entre les intentions affichées et les réalités du terrain le fossé est très large, la marge de manœuvre importante.
« Un incident isolé, individuel », s'est-on empressé de proclamer, comme pour couvrir l'énormité de la duplicité, du mensonge. Que se serait-il alors passé si l'incident n'avait pas été « individuel » ? Un scénario à l'irakienne ? Des razzias de quartier en quartier ? Des attentats-suicide pour aller plus vite au paradis ?
Qu'ils arrêtent donc de prendre les Libanais pour des imbéciles : le Liban d'en bas, les habitants de Bourj Abi Haïdar, de Basta, de Mazraa, ont appris, depuis bien longtemps, à ne plus prendre les propos d'ordre divin pour paroles d'Évangile, les vessies pour des lanternes, depuis, précisément, ce fameux 7 mai 2008, cette triste journée des dupes, lorsque les masques sont tombés, lorsque les « protecteurs de la cité » ont été pris la main dans le sac...
Le Grand-Beyrouth démilitarisé ? La belle affaire ! Que les forces de sécurité essayent donc de perquisitionner les quartiers de la banlieue sud, qu'ils tentent de faire entendre raison aux récalcitrants, aux détenteurs de RPG, B7 et autres roquettes de moyen ou grand calibre !
Les Libanais ne sont pas prêts d'oublier les tragiques accrochages de Mar Mikhayel-Chiah du 27 janvier 2008 lorsque les soldats ont été quasiment pris en otages par des éléments armés largement couverts par leurs directions politico-sécuritaires, un « dimanche noir » qui ne pouvait qu'aboutir à des dérapages sanglants neutralisant un peu plus une armée contrainte de composer avec ses agresseurs.
Ne nous leurrons pas : la démilitarisation du Grand-Beyrouth ne peut être obtenue par des plans sécuritaires élaborés à la va-vite, elle ne peut être que le résultat d'une décision politique prise au plus haut niveau et imposée à toutes les parties en présence, le Hezbollah en tête. Elle ne doit constituer qu'une première étape sur la voie d'une pacification de tout le pays sous l'égide des seules forces légales appelées à exercer leur autorité sur l'ensemble du territoire.
Vœu pieux ? Il faut bien le craindre dans les circonstances actuelles, notamment à la lumière des tiraillements irano-américains, des menaces israéliennes et, surtout, des intentions prêtées au Tribunal spécial pour le Liban, et du niet systématique affiché par le Hezbollah.
27 janvier 2008-7 mai 2008-24 août 2010 : d'avertissements musclés en « répétition générale », d'escarmouches en guerres de rues, les Libanais sont condamnés, de toute évidence, à boire le calice jusqu'à la lie...
Clamer haut et fort que les responsables, les vrais et les pseudos, se payent la tête des gens, c'est peu dire. L'affirmation est largement en deçà de la réalité, celle que les divers protagonistes s'évertuent à « lifter » au gré des humeurs du moment.Une danse de Saint-Guy sur un volcan : la formule sied...
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