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Santé - Environnement

La forte pollution à Beyrouth contribue à l’exacerbation des maladies cardio-pulmonaires

Une étude récente sur la pollution atmosphérique à Beyrouth montre que la population locale est exposée à de forts taux de polluants nocifs, dont la concentration dans l’air dépasse largement les normes internationales. Une situation déplorable qui représente un réel danger pour la santé.

Une étude sur la pollution atmosphérique à Beyrouth conclut à des taux alarmants de polluants nocifs dans l’air. Photo meanews.net

Quelle est la qualité de l’air que nous respirons ? Déplorable et néfaste pour la santé de nos poumons, selon les résultats récents d’une étude sur la pollution atmosphérique à Beyrouth.
Conduite par une équipe conjointe de chercheurs de l’Université Saint-Joseph (USJ) et de l’Université américaine de Beyrouth, sous l’égide du Conseil national pour la recherche scientifique et grâce à un financement de la région Île-de-France, l’étude, menée entre 2008 et 2010, conclut en fait à des taux alarmants de polluants nocifs dans l’air.
L’étude montre ainsi qu’en moyenne annuelle, « la concentration de dioxyde d’azote (NO2) dans l’air a dépassé les 53 microgrammes par mètre cube en 2009 et 58 µg/m3 en 2010, sachant que la teneur maximale admise par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) est de 40 µg/m3 », explique Maher Abboud, professeur de chimie à l’USJ et membre de l’équipe de recherche.
Les chercheurs se sont également penchés sur les particules microscopiques en suspension ou PM, qui émanent « des pots d’échappements, de la poussière des rues, des freinages, du frottement des pneus sur l’asphalte ou de la combustion incomplète du fuel ». L’étude montre ainsi que le taux de ces PM est décuplé. En effet, selon l’OMS, le taux admis pour les PM10 est de 20 µg/m3. « En 2009 et 2010, nous avons mesuré des taux de PM 10 allant de 55 à 75 µg/m3, soit 175 à 275 % supérieurs aux taux admis par l’OMS, s’exclame Maher Abboud. En ce qui concerne les PM2,5, l’OMS signale que leur taux ne doit pas dépasser les 10 µg/m3. Or nous avons mesuré 20 µg/m3. »
La source de la pollution atmosphérique dans la capitale reste essentiellement le trafic routier, plus de 800 000 voitures circulant au quotidien dans la capitale. « Un grand nombre de ces voitures est vétuste et ne répond pas aux normes internationales pour la préservation de l’environnement, indique Maher Abboud. À cela s’ajoute le manque d’urbanisme. La concentration du NO2 dans l’atmosphère diminue grâce à une bonne ventilation. Or Beyrouth est truffée de hautes tours édifiées dans des rues étroites créant ainsi un “effet canyon” qui favorise la stagnation des polluants. Si la tendance actuelle se poursuit et qu’aucune mesure sérieuse n’est prise, les taux de pollution vont encore décupler d’ici à 2015. »

Visites plus fréquentes aux urgences
En plus de l’impact sur l’environnement, la pollution atmosphérique à Beyrouth a des répercussions graves sur la santé. Chef du service de pneumologie à l’hôpital Rizk, le Dr Marie-Louise Coussa-Koninski explique ainsi que la pollution exacerbe les maladies cardio-pulmonaires.
« Nous savons que la mortalité journalière hausse avec le degré de pollution, souligne-t-elle. En effet, les personnes qui ont déjà des problèmes respiratoires ou cardiaques et qui sont exposées à un taux de pollution majoré ont plus de risques de décès ce jour-là que les autres personnes. C’est la raison pour laquelle dans les pays développés, le taux de pollution est affiché dans les rues pour que les personnes asthmatiques puissent en tenir compte. De plus, il est connu que le jour où la pollution est élevée, le nombre de consultations chez le médecin et dans les urgences augmente. »
Sur le long terme, les effets de la pollution sont plus difficiles à étudier, « le facteur temps jouant un rôle important à ce niveau ». Se référant à une étude suisse menée sur vingt ans, le Dr Coussa-Koninski indique que « les enfants qui habitent à proximité de rues très passantes ont une plus grande fréquence d’asthme et d’infections respiratoires que les enfants qui vivent dans des endroits bien aérés ». « Nous savons aussi que la pollution aggrave un asthme qui existe, favorise l’apparition de la maladie et augmente la fréquence des infections respiratoires chez les enfants », poursuit-elle.
Chez les adultes, la situation n’est pas meilleure. « L’exposition à des taux élevés de pollution peut exacerber un asthme et des bronchopathies (inflammation des bronches) chroniques chez l’adulte, note le Dr Coussa-Koninski. Elle peut aussi favoriser l’apparition d’un asthme. Selon l’étude suisse, qui est pionnière dans le domaine parce qu’elle est assez avancée dans la durée de l’observation, le taux de mortalité des suites des maladies cardio-pulmonaires est plus élevé au sein des communautés vivant dans des endroits pollués. »

Stress oxydatif
Comment agit la pollution sur l’organisme ? « Elle déclenche un stress oxydatif, répond le Dr Coussa-Koninski. En ce sens que la pollution va irriter les cellules qui tapissent les poumons, qui se mettent à sécréter des substances inflammatoires. Celles-ci vont agir d’abord au niveau des poumons, mais elles vont aussi s’introduire dans le sang, entraînant une augmentation des problèmes cardiaques, mais aussi du nombre de cancers. » Et de préciser : « Les effets neurologiques de la pollution commencent à être constatés. Nous ne pouvons pas toutefois nous prononcer, puisque les études menées en ce sens sont encore à leur début. »
Rappelant que les conclusions de l’étude sur la pollution atmosphérique à Beyrouth ont fait l’objet d’une session dans le cadre du congrès annuel de la Société libanaise de pneumologie (SLP), le Dr Coussa-Koninski explique que la SLP s’intéresse à cette étude pour mener une campagne de sensibilisation aux dangers de la pollution sur la santé, d’autant que la pollution « influe sur toutes sortes de maladies pulmonaires (asthme, le COPD, pneumonies, toux, rhinite, infections, cancer) et maladies cardio-vasculaires... ».
« Malheureusement, au Liban, nous sommes très peu concernés par l’environnement, déplore-t-elle. Nous avons peu de lois d’urbanisme et de circulation, l’état des routes est lamentable et les voitures que nous recevons ne correspondent pas aux normes internationales pour la protection de l’environnement... autant de facteurs qui contribuent à l’augmentation des taux de pollution. Nous pouvons encore inverser cette tendance si les décisions gouvernementales adéquates sont prises rapidement. L’étude suisse l’a démontré. Ce qui nous manque, c’est la volonté de le faire. »
Quelle est la qualité de l’air que nous respirons ? Déplorable et néfaste pour la santé de nos poumons, selon les résultats récents d’une étude sur la pollution atmosphérique à Beyrouth.Conduite par une équipe conjointe de chercheurs de l’Université Saint-Joseph (USJ) et de l’Université américaine de Beyrouth, sous l’égide du Conseil national pour la recherche scientifique...

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