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Nos Lecteurs ont la Parole

Rira bien qui rira le dernier

Par Georges TYAN
On prête à Victor Hugo cette phrase : « Nos plus belles années sont celles que nous n'avons pas encore vécues. » Le Premier ministre désigné, au train où vont les choses, risque quant à lui d'attendre encore fort longtemps, et nous avec, sans doute, jusqu'à nous faire de vieux os.
Plus de 90 jours que le nouveau gouvernement se fait attendre, et chaque jour qui passe nous ramène à la case départ. Ce n'est plus une farce, même pas une comédie qui tourne à la tragédie, c'est de l'inconscience à tous les niveaux de la décision.
Combien réel est le ras-le-bol populaire avec le prix de l'essence qui s'envole, l'électricité et l'eau rationnés, le renchérissement du coût de la vie, les soins médicaux, les scolarités, la gabegie à tous les étages, l'occupation sauvage des terrains domaniaux, et j'en passe.
Par manque de création d'emplois, notre jeunesse fait de nouveau le pied de grue devant les ambassades ; des menaces pèsent sur nos émigrés. Bref, nous assistons à l'appauvrissement galopant du pays, et les responsables, eux, sont aux abonnés absents, se chamaillant pour un maroquin.
Comme si ce qui se passe dans la région avait pour théâtre la Lune ou une autre planète. Deraa, Douma, Banias, c'est à nos portes ; la Libye, le Yémen, pas très loin de chez nous ; la Tunisie et l'Égypte également. Le Liban est membre, tout comme eux, de la Ligue arabe, leurs secousses trouvent leurs répliques dans nos murs.
Sans gouvernement, comment faire barrage et déjouer les tentatives de déstabilisation que le chef d'orchestre de ces soi-disant révoltes populaires impromptues nous réserverait ?
Je ne suis pas oiseau de mauvais augure, mais au cours des quatre décennies passées, nous avons tellement bavé que je ne crois pas que le malheur des autres puisse faire notre bonheur. Bien que, pour être honnête, il faut souligner que le contraire s'avéra vrai, en ce qui nous concerne.
Ils en ont ri hier, nous en rions aujourd'hui, certains jaune, rira bien qui rira le dernier. Pourvu que nous n'en pleurions pas, car sans être stratège ou politologue, je doute fort que les soutiens étoilés du régime damascène le laisseront choir, comme ils nous ont toujours abandonnés.
Dans ce genre de situation, il y a toujours des éclaboussures, des retours de bâton. Il est fort à craindre que cet effet domino qu'on a décrit en long et en large ne soit qu'un effet boomerang que nous recevrons, si nous n'y prenons garde, en pleine figure.
Crier au loup ne rime à rien, mais il n'est plus loin, et avant la conclusion des palabres sur le sexe des anges, ou de savoir que mettre avant, la charrue ou les bœufs, la porte cherrera, le loup, qui a déjà une patte dans la bergerie, s'y introduira de toute sa néfaste superbe. Ce sera la débandade, le sauve-qui-peut, et advienne que pourra !
Cela ressemble à du déjà-vu, l'histoire étant un éternel recommencement, mais pourquoi faut-il que les moments de laideur et de tristesse reviennent, et non ceux qui fleurent bon la joie et le bonheur ?
Imaginez un instant un vrai gouvernement qui rassure et assume ses responsabilités envers ces millions de touristes détournés de Tunisie, d'Égypte et même de Syrie ; quel bonheur de les regarder déambuler dans nos cités, Baalbeck, Byblos, Cana, nos hôtels pleins à craquer, nos centres commerciaux pris d'assaut, les commerçants faisant tourner leurs stocks.
Rêvons d'un État où l'armée et la gendarmerie sont l'unique garant de la paix civile, de l'application des lois, de la justice sociale, de l'ordre, des faibles contre les fiers-à-bras. Rêvons d'un Liban à l'abri de toute ingérence, sa culture, sa diversité, son climat, en faisant le porte-drapeau de la civilisation dans sa région.
Hautement poétique, bassement vénal, rétorqueront les esprits lucides. Beaucoup préfèrent être premiers de leurs villages que seconds à Rome - déjà qu'il y a encombrement au goulot des communautés. À mon sens, c'est un choix plus que discutable s'agissant de l'avenir et de la pérennité du pays, qu'il n'est pas question de morceler pour satisfaire aux ambitions de chacun d'eux.
À cette douche écossaise s'ajoutent toutes les causes de monde, auxquelles le Liban sert de caisse de résonance. Mais à quelque chose malheur est bon, le metteur en scène étant occupé ailleurs par son scénario régional, et n'étant plus donc dans son champ de vision, j'invite toutes les parties à profiter de l'aubaine, à s'unir, à faire échec aux plans qu'il nous concocte et qui, pour sûr, ne sont pas à l'eau de rose.
Il n'est plus possible de se taire, de faire l'autruche. La situation économique du point de vue régional devient pesante ; elle peut à tout moment déborder et influer sur nous. Que chacun prenne ses responsabilités. Et que la comédie des chaises musicales cesse.
On prête à Victor Hugo cette phrase : « Nos plus belles années sont celles que nous n'avons pas encore vécues. » Le Premier ministre désigné, au train où vont les choses, risque quant à lui d'attendre encore fort longtemps, et nous avec, sans doute, jusqu'à nous faire de vieux os.Plus de 90 jours que le nouveau gouvernement se fait attendre, et chaque jour qui passe nous ramène à...

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