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Municipales 2010 : les résultats

Une dizaine de batailles politiques livrées au Batroun

Dans le caza du Batroun, qui compte 24 municipalités, une dizaine de batailles politiques ont opposé les Forces du 14 Mars à celles du 8 Mars sur fond de dissensions familiales, alors que neuf municipalités avaient été élues d'office.
Une constatation s'impose, d'emblée, dans le caza du Batroun : les villages du jurd soutiennent les choix du député Boutros Harb, les villages d'altitude moyenne votent traditionnellement en faveur des Kataëb et des Forces libanaises, alors que le littoral rassemble les voix du CPL depuis 2005. Il faut également compter avec les électeurs des Marada et du PSNS dans plusieurs villages du caza.
Sur le plan de la composition des listes, force est de noter que dans plusieurs villages où des batailles ont eu lieu, le CPL était divisé. La base s'était alliée aux Forces du 14 Mars et/ou aux familles alors que le directoire du CPL soutenait des listes présentant des candidats CPL, PSNS et Marada. C'était particulièrement le cas à Ibrine, à Hamate et à Kobba.
À Batroun, chef-lieu du caza, le ministre CPL Gebran Bassil, originaire de la localité, livrait « sa » bataille ; le CPL et les Marada ont choisi de soutenir la liste de l'actuel président du conseil municipal Marcelino Hark, un self-made- man, ayant quitté Batroun pour les États-Unis à l'âge de 17 ans et qui est rentré au pays pour aider son village. La semaine dernière, l'ancien député Sayed Akl l'avait qualifié « d'homme ordinaire », un slogan sur lequel Hark a basé sa campagne.
Sur les quinze membres de la liste de Marcelino Hark, on compte plusieurs supporteurs du CPL sans qu'ils ne soient pour autant membres à part entière du mouvement. C'est notamment le cas, par exemple, de Sayed Fayad et de Takla Assal, dont l'époux Albert avait péri dans le crash d'Éthiopian Airlines, en janvier dernier.
Face à cette liste, il y avait celle soutenue par le 14 Mars et qui se présentait comme la liste des familles. Elle avait à sa tête l'ancien député Sayed Akl et comptait parmi ses membres Zeina Georges Daou, épouse d'un notable de la localité.
Dès le matin, hier, les partisans du CPL et les supporteurs de la liste présidée par Hark se sont préparés à la bataille. Ils étaient très nombreux à sillonner la ville, habillés de la couleur orange du CPL, bien sûr, ou mauve de la liste Hark.
Hier également, à Batroun, on notait la présence de divers députés ou anciens ministres aounistes, notamment Mario Aoun.
Sous les applaudissements et les you-yous, Gebran Bassil - qui a voté dans sa ville natale accompagné de son épouse Chantal, fille du chef du CPL, le général Michel Aoun - a indiqué aux journalistes que Batroun franchira une nouvelle étape à la fin de ces élections. Dans la matinée d'hier, Sayed Fayad, avocat et candidat de la liste soutenue par le CPL, a rappelé que lors des élections législatives de 2009, Gebran Bassil, qui n'avait pas été élu député, avait remporté 2 300 des 3 170 voix de la ville.
Il a également mis l'accent sur les projets de développement effectués par l'équipe de l'actuel conseil municipal présidé par Hark. Parmi ces projets, la mise en place d'un réseau d'égouts et d'une station d'épuration des eaux usées ainsi que la restauration de vieilles demeures et d'une partie du vieux souk de la ville. « En 1998, les caisses de la municipalité comptaient 600 millions de livres, aujourd'hui nous en sommes à 3 milliards », dit Sayed Fayad, fier.
D'autres électeurs de Batroun dénonçaient, de leur côté, des abus de pouvoir exercés par Marcelino Hark, concernant notamment des biens fonciers.
Francine Akl, fille de l'ancien député Sayed Akl, a mis l'accent sur le fait que la liste présidée par son père représente toutes les familles de la ville et a rappelé que le ministre Gebran Bassil a, à deux reprises, en 1998 et 2004, échoué aux élections municipales et qu'il n'a pas remporté non plus les élections législatives lors des scrutins de 2005 et de 2009.
La fille de Sayed Akl a aussi noté que si Gebran Bassil avait remporté la majorité des voix des électeurs de Batroun-ville lors des législatives, c'est parce que son père ne s'était pas présenté aux élections. Elle a également indiqué que c'est grâce à son père que Marcelino Hark est devenu président du conseil municipal de Batroun.
En soirée, hier, le taux de participation avait atteint 40 % dans la ville. Sur 6 500 électeurs, environ 3 000 se sont présentés aux urnes. Ces électeurs sont formés à 80 % de maronites, de grecs-catholiques, d'arméniens et de minorités chrétiennes, à 14 % de grecs-orthodoxes et à 6 % de musulmans appartenant aux communautés sunnite, chiite et alaouite.

Kour et Chekka, une histoire entachée de sang
Sur les hauteurs de Batroun, à Kour, une autre bataille opposant les électeurs du 14 Mars à ceux du 8 Mars était livrée.
En 1976, Kour avait été témoin d'une bataille entre l'armée syrienne et les habitants du village. Une douzaine de personnes originaires de ce village, exclusivement maronite, avaient été tuées. Quelques mois plus tard, à l'issue de l'assassinat de Tony Frangié, les Marada avaient chassé des habitants de Kour de chez eux.
Hier, donc, deux listes s'affrontaient à Kour, l'une soutenue par les Kataëb et les Forces libanaises, et l'autre par les Marada et le CPL.
Ce même cas de figure se présentait à Béchéhleh, Bekesmaya et à Douma où deux listes, l'une soutenue par les Forces du 14 Mars et l'autre par celles du 8 Mars s'affrontaient. Il faut signaler la présence à Douma de deux candidats indépendants dont Mazen Abboud.
Sur le littoral, Chekka est l'une des plus importantes municipalités du caza du Batroun, notamment sur le plan économique, grâce aux usines de la localité. Chekka constitue également une zone importante pour les Marada, vitale pour leur prolongement sur le littoral. Chekka aussi est une ville symbole pour les Kataëb et les Forces libanaises qui ont perdu en 1976 près de 170 martyrs dans des massacres perpétrés par l'armée syrienne. Les partisans Kataëb se sont vus obligés de quitter leur village avec le massacre de Tony Frangié, en 1978, pour ne plus rentrer qu'avec l'adoption des accords de Taëf, après 1990.
La localité compte 15 000 habitants, 4 800 électeurs dont 2 800 environ se présentent aux urnes. Sur le plan communautaire, les habitants sont composés, en gros, à 70 % de maronites, 20 % d'orthodoxes et 10 % de chiites et de sunnites.
Hier, la bataille était rude à Chekka où deux listes complètes de quinze membres s'opposaient. L'une ayant à sa tête l'actuel président du conseil municipal Farjallah Kfouri, soutenue par le CPL, les Marada, le PSNS et les communistes. L'autre présidée par Michel Khoury, conseiller du leader des Kataëb Amine Gemayel, était soutenue par les Kataëb, les Forces libanaises, la Gauche démocratique et le Courant du futur.

Divisions aounistes dans plusieurs villages
Dans divers villages du Batroun, des aounistes s'étaient présentés sur des listes opposées. Il s'agissait en fait de personnes qui n'avaient pas été soutenues par la direction du parti qui avait opté de s'allier aux Marada et au PSNS. C'était notamment le cas à Ibrine, Hamate et Kobba.
À Ibrine, trois listes, dont l'une incomplète, s'affrontaient. L'une complète, de douze membres, était présidée par Farès Tannous et soutenue par les Kataëb et les Forces libanaises, la deuxième, complète également, présidée par Camille Roks était soutenue par le CPL (direction du mouvement) et les Marada. Une troisième liste incomplète, comptant dix membres, était présidée par un candidat communiste, Semaan Bou Moussa, et présentait des candidats CPL, dont Saïdé Elkouba, qui disait ne pas comprendre pourquoi le mouvement aouniste était divisé dans son village.
Hamate, surplombant le littoral, est une localité qui avait abrité un aéroport militaire utilisé au début de la guerre par les Kataëb et les Forces libanaises en tant qu'importante base dans la région. Il a été ensuite occupé jusqu'en 2003 par l'armée syrienne. Elle compte environ 1 000 électeurs grecs-orthodoxes se présentant aux urnes.
Hamate compte aussi bien des Forces du 14 Mars que du 8 Mars. Hier, deux listes complètes de 12 membres s'affrontaient dans ce village. L'une des listes, présidée par l'actuel président du conseil municipal, Mezher Karam, comprenait des candidats FL, Kataëb ainsi que trois candidats aounistes. Mais la direction du CPL soutenait officiellement la liste opposée qui comprenait des candidats CPL, PSNS et communistes.
Kobba est un petit village du littoral, limitrophe de Batroun, chef-lieu du caza. Dans ce village majoritairement grec-orthodoxe, qui compte 450 électeurs, deux listes s'affrontaient dans une ambiance bon enfant. L'une était soutenue par les Forces libanaises, les Kataëb ainsi que par la base aouniste, présentant un candidat du CPL, Élie Nader, qui s'était détaché de Gebran Bassil. La deuxième liste, présidée par Georges Daaboul, était soutenue par le ministre CPL.

Le 14 Mars majoritaire dans le caza
Dans la grande permanence des Forces libanaises de Bejdarfel, le député FL Antoine Zahra, a souligné dans un entretien avec L'Orient- Le Jour que sur les 24 municipalités du Batroun, neuf ont été élues d'office. Dans ces neuf municipalités, on compte 72 membres appartenant au 14 Mars et 21 au 8 Mars.
Il a noté également que dans les localités où des batailles sont livrées, la balance pourrait pencher en faveur du 14 Mars. Il s'est aussi demandé pourquoi le CPL présente la bataille de Batroun-ville comme étant la mère des batailles, surtout que la ville ne compte pas le plus grand nombre d'électeurs du caza et que sa municipalité n'est pas la plus riche de la zone.
Une constatation s'impose, d'emblée, dans le caza du Batroun : les villages du jurd soutiennent les choix du député Boutros Harb, les villages d'altitude moyenne votent traditionnellement en faveur des Kataëb et des Forces libanaises, alors que le littoral rassemble les voix du CPL depuis 2005. Il faut également compter avec les électeurs des...