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Nos Lecteurs ont la Parole

Cotonougate, vous en souvenez-vous ?

Par Youssef MOUAWAD
Le 25 décembre 2003, un Boeing 727 (UTA) effectuant un vol à destination de Beyrouth fait escale à Cotonou. « Au cours du décollage, l'avion surchargé de façon anarchique n'arrive pas à prendre sa pente normale de montée » (sic). À bord, 10 membres d'équipage et 150 passagers, dont  8 enfants et 6 bébés. Le Boeing percute un bâtiment situé à cent mètres dans le prolongement de la piste et s'écrase sur la plage. Bilan de l'accident : 141 morts dont 87 Libanais.
Le responsable du crash, le patron de la compagnie aérienne qui, comme par hasard, avait pris place dans le cockpit, est  rapatrié au Liban. Il disparaît de l'hôpital où il se remettait de ses blessures avant de comparaître devant le juge d'instruction. En l'espèce, les complicités de son évasion ne furent jamais établies. Et pour cause ! Or nos autorités portuaires  avaient donné l'autorisation aux avions de la compagnie UTA (dont l'acronyme est en tout état de cause trompeur) de se poser sur le tarmacadam libanais, alors que son capital social ne dépassait pas 20 000 dollars US (de quoi s'acheter un pneu de secours !) Notre administration, si diligente et tatillonne par ailleurs, n'aurait-elle pas pu interdire ou suspendre cette ligne aérienne à haut risque ?
Récidive, le 25 janvier 2010 : un avion d'Ethiopian Airlines s'abîme au large de Damour-Jiyeh, quelques minutes après son décollage, à quelques kilomètres de l'aéroport Rafic Hariri. À bord, 83 passagers et 7 membres d'équipage.
À ce stade, on ne peut préjuger des raisons du crash ; ce peut être les intempéries, une erreur humaine, « l'absence de structure de sécurité des vols en mesure de corriger les dérives ou insuffisances éventuelles », une négligence équipollente au dol, etc. Mais depuis que les cieux sont libres en vertu de la globalisation à outrance, on casse les prix, on lésine sur la qualité et on prend des risques. Or un vol n'est pas une loterie, le hasard ne doit pas y avoir sa place et peut-être bien que les calculs des experts vont démontrer que ce vol n'aurait jamais dû être tenté par le temps qu'il faisait.
Il y a eu Cotonougate, souhaitons qu'il n'y ait pas de Beyrouthgate et que les responsabilités soient établies même si elles sont diffuses ou dispersées*.
Or le président de la commission parlementaire des Travaux publics, M.  Mohammad Kabbani, vient nous assurer qu'il n'y a aucune commune mesure entre ces deux tragédies humaines. D'après ses propres termes, le scandale de Cotonougate est dû à la corruption de la classe politique libanaise qui couvre les agissements des « puissants » (ashab al-mal wal-jah) ainsi qu'à  « certains tribunaux qui se soumettent parfois aux pressions ».
Libanais, si vous saviez ! Libanais, si Monsieur le Député  Kabbani  se mettait à nous dire ce qu'il cache par excès de pudeur ! Suffit-il  encore de déclamer qu'il y a quelque chose de pourri dans le royaume du Liban ? Non, il s'agit, en l'espèce, de réclamer des têtes, si couronnées soient-elles, et de les faire rouler!

Youssef MOUAWAD
Avocat des familles des victimes du crash de Cotonou

* D'après l'euphémisme désormais célèbre du rapport du BEA (Bureau d'enquêtes et d'analyses pour la sécurité de l'Aviation civile), aéroport du Bourget, officiellement chargé d'enquêter sur Cotonougate et désormais sur Beyrouthgate.

Le 25 décembre 2003, un Boeing 727 (UTA) effectuant un vol à destination de Beyrouth fait escale à Cotonou. « Au cours du décollage, l'avion surchargé de façon anarchique n'arrive pas à prendre sa pente normale de montée » (sic). À bord, 10 membres d'équipage et 150 passagers, dont  8...

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