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Droits de la femme, protection de l’enfance… ou morale religieuse : les dilemmes de l’avortement

Dans l’ordre des choses…

Marie, 22 ans, est puéricultrice. Elle s'occupe des enfants des autres, mais ne souhaite pas avoir les siens tout de suite : elle n'en a pas les moyens financiers, elle n'est pas mariée et elle n'a pas encore rencontré l'homme qu'elle veut épouser. Elle vit avec ses parents dans la banlieue de Beyrouth, où elle a sa bande d'amis. Il y a quelques mois, elle est sortie avec un garçon du quartier, qui a le même âge qu'elle. Ils ont fait l'amour plusieurs fois et n'ont utilisé un préservatif que le premier soir. « J'ai pris confiance, je pensais seulement aux maladies, pas aux bébés », dit-elle.
Quelques semaines plus tard, elle s'est rendu compte qu'elle était enceinte, et son médecin le lui a confirmé. Après plusieurs jours d'angoisse, elle en a parlé à son ami, qui lui a proposé de l'épouser pour l'élever ensemble. « Je ne savais pas quoi faire, raconte-t-elle. Je ne voulais pas me marier avec lui, mais j'avais peur de me faire rejeter par tout le monde avec ce bébé. Ensuite, je me suis dit que ce n'était pas encore un bébé, que c'était encore possible de tout arrêter, de faire comme s'il ne s'était rien passé. Je suis retournée voir mon médecin. »
Celui-ci a consacré beaucoup de temps à discuter avec elle pour lui permettre d'envisager les différentes options qui se présentaient à elle. Il a finalement accepté de la rediriger vers un confrère spécialisé dans l'interruption volontaire de grossesse. Ils se sont parlé au téléphone pour prendre rendez-vous, et elle y est allée seule.
« C'était dans un appartement à Beyrouth, comme un cabinet de médecin, raconte-t-elle. J'ai parlé au médecin, qui m'a dit que je devrais me marier avec mon ami et garder l'enfant. Il savait que ma décision était prise, et il a pourtant continué à me faire la morale tout en me préparant à l'opération. J'ai eu mal, à l'extérieur et à l'intérieur. Avec tout ce qu'il me disait, j'avais l'impression d'être une criminelle. »
Marie n'a parlé de son opération à personne, ou presque. Elle ne l'a dit à son ami qu'après en avoir terminé. « Je me sentais coupable, ça aurait été son enfant aussi. Mais il ne l'a pas mal pris. Il a eu l'air triste puis tout est redevenu comme avant, comme si c'était dans l'ordre des choses. »
Cependant, les conditions dans lesquelles Marie a été opérée ne lui ont pas vraiment permis de vivre cette expérience « dans l'ordre des choses ». Elle affirme garder un sentiment de culpabilité, de blessure, et ne sait pas à qui attribuer les responsabilités. « Je n'ai pas envie de penser avoir des enfants maintenant. Ça me semble tellement irréel après tout cela. »

G. A.
Marie, 22 ans, est puéricultrice. Elle s'occupe des enfants des autres, mais ne souhaite pas avoir les siens tout de suite : elle n'en a pas les moyens financiers, elle n'est pas mariée et elle n'a pas encore rencontré l'homme qu'elle veut épouser. Elle vit avec ses parents dans la banlieue de Beyrouth, où elle a sa bande d'amis. Il y a quelques...