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Diaspora - Hommage

Gilbert Aoun, le souvenir d’un diplomate qui a beaucoup œuvré pour les émigrés

Dans l'histoire d'un pays, il existe des figures dont le souvenir demeure dans la mémoire des hommes. Parmi elles, nous nous souvenons de l'éminent diplomate libanais, l'ambassadeur Gilbert Aoun, né en 1940, originaire de Damour et décédé subitement d'une crise cardiaque le 19 mai dernier.
Gilbert Aoun était un homme diplomate et communicatif, qui a servi le Liban avec humanité et imposé un respect mutuel entre les pays, soucieux des conditions des émigrés et œuvrant à la formation de communautés libanaises solides dans les pays d'émigration.
Il était marié à Vera Saliba et père de deux filles. Il avait poursuivi des études en sciences politiques et obtenu un doctorat en droit international public. Sa  carrière diplomatique a démarré en 1972, et il a été chargé de nombreuses missions diplomatiques :
- 1973-78, secrétaire à Londres
- 1978-80, secrétaire à Buenos Aires, en Argentine
- 1982-83, conseiller à Londres
- 1983-85, consul général à Marseille
- 1985-90, consul général à Sydney, en Australie
- 1994-99, ambassadeur à Lagos, au Nigeria, et 2003-2004, ambassadeur en Serbie-et-Monténégro.
Il avait également occupé plusieurs fonctions au ministère des Affaires étrangères, dont celle de directeur général des services juridiques, et avait participé à plusieurs conférences internationales à travers le monde.
Son collègue et ami, l'ambassadeur William Habib, secrétaire général p.i. du ministère des Affaires étrangères, apporte à son sujet le témoignage suivant : « Gilbert était un grand ambassadeur qui alliait l'intellectuel au social, un homme profond mais ouvert et communicatif. Dans les pays où il a représenté le Liban, il a su gagner l'estime des hauts responsables et leur amitié, mais surtout la confiance des émigrés libanais, unis, grâce à lui, pour une même cause, celle d'un Liban au-dessus de toute mêlée partisane. Modéré dans ses positions, ferme dans ses convictions, Gilbert faisait partie d'une race de diplomates dont on a besoin actuellement, celle qui réunit l'intelligence et la culture, le charisme, l'intégrité et la noblesse, et qui répand le message de sa patrie avec la conviction d'un soldat, d'un missionnaire. Ce qui m'a le plus touché, c'est de voir combien ses étudiants étaient émus par son décès, et ses collègues et amis affligés par la perte subite d'un homme d'action, authentique et sincère, qui a dédié sa vie et sa carrière au service d'un idéal. Gilbert était aussi un époux attentionné et un père affectueux. Sa perte a été durement vécue par tous. »
Après de longues années au service du Liban à l'étranger comme diplomate, l'ambassadeur Aoun a pris sa « retraite » en 2004 et est devenu professeur de droit international public à l'Institut des sciences politiques de l'Université Saint-Joseph (USJ). Il a poursuivi ses conférences sur des sujets-clés, entre autres une conférence sur « L'impact des résolutions internationales sur la vie politique » au Liban et dans la région, en 2005. Il était ouvert à toute collaboration quand celle-ci profitait à un Liban uni et à ses émigrés en Europe, en Afrique, en Océanie et autres. Son interview au journal This day (le 4 juin 1996) a eu un grand retentissement : il y affirmait en effet qu'« un Nigérien pourrait être un homme blanc », en référence au grand nombre de Nigériens de père ou de mère libanaise, dont le mixage renforce leur citoyenneté dans ce pays où ils sont installés avec leur famille depuis plus de 120 ans, travaillant pour son développement.

Un homme d'action
L'ambassadeur Aoun visitait régulièrement le Centre des études sur l'émigration libanaise (LERC) de l'Université Notre Dame (NDU). Il était devenu un ami et un conseiller de cette institution. La directrice du LERC, Guita Hourani, souligne que « l'ambassadeur Gilbert Aoun était un grand partisan du LERC. Il avait assisté à de nombreuses conférences sur des événements liés à la migration libanaise, donnant des avis sur les questions juridiques relatives à la situation des émigrés libanais, qui ont souvent utilisé son propre capital social et ses liens pour faciliter l'accès aux personnes et aux documents de recherche ».
Et de poursuivre : « Il a tellement cru en la mission du LERC comme centre de recherches, en ses archives et son musée, qu'il a commencé à l'enrichir de sa bibliothèque privée. Le matériel confié à la NDU comprend des lettres officielles et des correspondances, des médailles commémoratives, des interviews, des vidéos, des journaux et des magazines. L'ambassadeur Aoun assurait des contacts utiles pour nos recherches sur l'acquisition et la perte de la nationalité libanaise. Ses conseils et son soutien nous manqueront. »
L'ambassadeur Aoun était aussi, durant les deux dernières années de sa vie, directeur du protocole à la présidence du Conseil, durant le mandat du Premier ministre Fouad Siniora. C'était un homme toujours actif pour le Liban et confiant en l'avenir de son pays. Dans l'une de ses dernières interviews, il a commenté ses impressions sur les élections législatives du Liban avec confiance : « Nous parlons de l'Orient, les surprises sont toujours à l'affût. En Occident, l'évolution de la politique s'est faite sur quatre siècles, quatre siècles d'expérience... Mais si nous comparons le petit Liban à d'autres pays de la région, nous pouvons être fiers de notre capacité à exiger une liberté de la presse, une liberté d'expression, une liberté de scrutin, une possibilité pour tous les candidats de s'exprimer librement, en toute sécurité. C'est une atmosphère toute particulière en Orient. Malgré toutes les faiblesses du système libanais, l'État fait de son mieux pour appliquer la neutralité dans l'exercice de la liberté d'expression » (iloubnan.info, 22 avril 2009).
Tous ceux qui ont connu l'ambassadeur Aoun ont vu en lui un grand travailleur pour le Liban, à l'instinct diplomatique inné, ayant de vastes connaissances. Toutes ces qualités ont fait de lui un grand observateur dont la flamme demeurera vive dans le cœur de ses amis.
Gilbert Aoun était un homme diplomate et communicatif, qui a servi le Liban avec humanité et imposé un respect mutuel entre les pays, soucieux des conditions des émigrés et œuvrant à la formation de communautés libanaises solides dans les pays d'émigration. Il était marié à Vera Saliba et père de...