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Nos Lecteurs ont la Parole

Pourquoi je ne peux pas voter Aoun

Samira LYANN
Comme beaucoup de Libanaises et de Libanais, j'ai été séduite, en 1988 - 1989, par l'attitude en apparence souverainiste et courageuse du général Aoun lorsqu'il a entrepris sa guerre de libération du territoire libanais de l'emprise syrienne. Je dis bien en apparence parce que, finalement, je n'ai pas tardé à être déçue en constatant combien ce qu'il disait - et surtout ce qu'il faisait - s'est avéré catastrophique non seulement pour les chrétiens, mais aussi pour le pays tout entier. Et depuis, ma déception n'a pas cessé de grandir en découvrant les caractéristiques suivantes du général :
1- C'est un homme irascible, coléreux, incapable de se contrôler. Tout le monde a pu le voir réagir d'une manière impulsive lorsque, lors des conférences de presse, il s'irritait des journalistes qui ne faisaient que leur métier ; tout le monde a pu le voir lorsque, sur la chaîne al-Jazira, il a quitté brusquement le plateau parce qu'il n'était plus maître de ses nerfs. Et j'en passe.
2- C'est un homme qui cède à la violence, privilégiant l'instinct à la raison. Lorsqu'en 1989 il a voulu chasser les Syriens, nous nous disions qu'il ne pouvait entreprendre une telle guerre s'il ne bénéficiait pas d'appuis diplomatiques forts, de moyens militaires et financiers suffisants pour remporter la victoire. Force a été de constater qu'il n'obéissait qu'à ses impulsions sans aucune stratégie réfléchie pour le sauvetage du pays. Il n'a fait qu'entraîner le Liban vers une de ses pires périodes destructrices. Cela s'est répété tout aussi tragiquement en 1990.
3- C'est un spécialiste du retournement de veste. C'est bien lui qui, à une chaîne de télévision française, déclarait avec assurance que c'était bien la Syrie qui avait assassiné Rafic Hariri puis qui l'a blanchie de tout méfait. C'est lui l'un des inspirateurs du Syria Accountability Act voté par le Congrès américain pour sanctionner la Syrie et qui maintenant s'allie à elle. C'est lui qui déclarait que le Hezbollah ne devait pas garder ses armes et qui maintenant est devenu le défenseur de son droit non seulement à rester en possession d'un arsenal et d'une armée plus puissante que celle de l'État mais qui légitime en plus son existence d'État phagocytant toutes les structures étatiques existantes.
4- Lui qui s'élève contre la corruption et le féodalisme, il n'hésite pas à placer les membres de sa famille à des postes-clés, sources de tous les enrichissements.
5- C'est un homme intolérant et autoritaire qui ne peut accepter la contradiction : c'est sa parole qui prime. Il veut imposer son opinion : il a raison et tout le monde a tort. Il exige des membres de son parti et des candidats sur ses listes électorales la soumission totale à ses vues et l'aval, à l'avance, de toutes ses actions futures. Il ne tolère pas la liberté de pensée puisqu'il menace de couper la langue et les bras à tous ceux qui ne partagent pas sa pensée unique. Sans mentionner ses diatribes régulières contre les journaux qui osent contester sa politique.
6- En 1990, il s'est réfugié dans l'enceinte de l'ambassade de France alors que la veille même, il affirmait haut et fort qu'il ne quitterait pas Baabda, qu'il mourrait sur les lieux de son combat. Aujourd'hui, il tire toute sa force et sa protection des armes et de la puissance acquise de son allié, le Hezbollah, qui le téléguide tout en privilégiant le parti Amal et les autres alliés à ses dépens.
Je me contenterai de cette description rapide, mais ô combien peu rassurante pour justifier mes raisons de ne pas voter pour le général Aoun. Car comment puis-je accorder ma confiance à un homme qui s'est avéré ne possédant pas les qualités élémentaires de pondération, de stabilité, de défenseur authentique de l'indépendance et de la souveraineté, de tolérance, de maîtrise de soi, et j'en passe, toutes qualités indispensables pour se conduire en véritable homme d'État ?

Samira LYANN
Comme beaucoup de Libanaises et de Libanais, j'ai été séduite, en 1988 - 1989, par l'attitude en apparence souverainiste et courageuse du général Aoun lorsqu'il a entrepris sa guerre de libération du territoire libanais de l'emprise syrienne. Je dis bien en apparence parce que, finalement, je n'ai pas tardé à être...

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