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Nos Lecteurs ont la Parole

Un petit tour à Beyrouth

Par Khalil CHÉHADÉ
Beyrouth, pendant la journée, c'est à voir ! Les travaux partout qui bloquent les principales routes - faire des travaux sur la principale autoroute de notre pays un lundi matin alors que des milliers de gens vont à leur travail, mais quelle idée de génie ! -, les conducteurs qui garent n'importe où et qui bloquent les routes... Toute une cacophonie d'irrationalités et d'idées folles font de Beyrouth une ville de rêve. J'ai aujourd'hui 24 ans, et de mon vivant je ne me rappelle jamais avoir vu l'autoroute de Dora... sans travaux ! Mais qui fait un petit tour à Beyrouth se rend compte aussi du grand nombre de ses mendiants.
Par une belle journée d'avril, j'étais coincé dans un embouteillage monstre à Hamra (probablement des travaux ou une personnalité fort respectable qui a garé sa voiture au milieu de la rue). Une vieille dame, péniblement debout au milieu de la rue, lourdement appuyée sur sa canne, mendiait. Elle semblait aller si mal que chaque conducteur avait le sentiment qu'elle pourrait s'écrouler devant sa voiture. Quand je lui donne un peu d'argent, elle me raconte qu'elle veut acheter un médicament car elle souffre terriblement d'une maladie indéfinissable...
Je me rends ensuite au centre-ville, à Bab-Edriss. Ici, une autre souffrance humaine s'étale sous les yeux des passants. Vous savez, au centre-ville, il y a ces arbres, méticuleusement alignés à égale distance sur les trottoirs. Et bien sachez que les trous qui abritent les racines des arbres sont en fait creusés par des enfants d'une dizaine d'années. J'ai pu m'en rendre compte de mes propres yeux puisqu'à peine l'épisode de la vieille dame de Hamra terminé, c'est un tout petit garçon que je vois au fond du trou en train de creuser !
Je peux continuer des heures et des heures à parler des mendiants et des enfants de Beyrouth employés aux tâches les plus diverses. Beaucoup d'entre vous connaissent probablement le vieil homme de Tabaris qui vend du chewing-gum, ou encore celui qui est là tous les soirs à la rue Gemmayzé, à côté du bar Porto. Vous connaissez probablement, vous aussi, beaucoup d'autres cas. Décrire ces pauvres gens, ou à la rigueur fournir quelques informations qui vous permettraient de les identifier dans la rue, est ma manière de leur donner une sorte d'identité et d'attirer l'attention de qui veut bien m'entendre sur leur pénible sort.
Faut-il revenir sur le thème « Mais que fait donc l'État ? ». Ou encore sur le sujet des valeurs que défend notre pays ? Ou alors, l'absence totale de toute couverture sociale pour nos plus pauvres serait-elle un atout dont nous sommes fiers ?
En attendant, nous sommes confrontés au même dilemme. En voyant un mendiant dans la rue, nous avons deux options. La première, c'est de lui donner de l'argent au risque de voir ce mendiant, surtout si c'est un enfant, le donner au monstre qui lui vole son enfance et le fait travailler dans la rue. La deuxième option consiste à faire semblant de ne pas voir le mendiant, de poursuivre son chemin comme si de rien n'était. Ce qui revient en quelque sorte à mettre de côté, pour un moment, ce qui différencie fondamentalement l'être humain de l'animal, à savoir les principes de l'humanité. Tel semble être le choix de notre État, qui brille par son absence.
Pour l'instant, priorité aux travaux publics et aux projets à entreprendre sur l'autoroute de Dora dans les trente ans à venir...
Beyrouth, pendant la journée, c'est à voir ! Les travaux partout qui bloquent les principales routes - faire des travaux sur la principale autoroute de notre pays un lundi matin alors que des milliers de gens vont à leur travail, mais quelle idée de génie ! -, les conducteurs qui garent n'importe où et qui bloquent les routes... Toute une...

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