D'autre part, la DGA a fait un relevé au « laser scanning en 3D » des thermes romains découverts à proximité de l'église Saint-Maron, sur la parcelle 616 de Saifi Crown. Cette technologie, explique Assaad Seif, permet de prendre les mesures exactes des vestiges et de restituer avec précision leur volume lorsqu'ils seront démontés pour être remontés au rez-de-chaussée du projet immobilier. Il s'agit, rappelons-le, d'une mosaïque de 12m x 28 qui tapissait le sol du « Tepidarium » et d'un grand fragment du « Caldarium » au sein duquel les archéologues avaient déterré un « labrum » (grande vasque qui servait à s'enduire d'huile). Deux entrées sont prévues pour le bâtiment : l'une privée et l'autre publique donnant accès directement aux ruines. Pour permettre aux résidents et visiteurs de Saifi Crown une vue sur les vestiges, les deux entrées seront séparées par un simple vitrage.
Du nouveau aussi côté Akkaoui, où, rappelons-le, des tombes souterraines, creusées au IIIe siècle de notre ère dans la paroi rocheuse et scellées avec des murs de pierres, avaient été découvertes dans le sous-sol du parking de Sofil. En poussant plus loin leurs fouilles, les archéologues ont fait dernièrement une « découverte majeure » : des installations (poterie et structures d'habitation) datant du milieu du IVe millénaire avant J.-C. « Nous savions que Beyrouth était peuplée depuis 14 000 ans ; les fouilles réalisées rue de Damas sur la parcelle de l'Université Saint-Joseph nous l'ont confirmé. Mais c'est la première fois que nous avons des indices du quatrième millénaire », signale Assaad Seif, ajoutant que « vu la nature de cette archéologie et son état de détérioration, elle est irrécupérable, mais l'information scientifique recueillie est très importante. Elle remet en question l'hypothèse selon laquelle à la période cananéenne et phénicienne, les hommes préféraient s'installer sur les promontoires (tell) qui bordent la mer, plutôt qu'à l'intérieur des terres. »
Toujours à Achrafieh, mais cette fois à Badaoui (entre l'EDL et l'ancienne gare de Mar Mikhaël), une dizaine de sarcophages romains en terre cuite et bois (désintégré) datant du Ier et IIIe siècle avant J.-C. ont été déterrés. Les travaux de fouilles, qui n'ont couvert que 200 m2 de la parcelle du terrain, vont continuer. Ce site, ajouté à ceux découverts ces dernières années dans les secteurs de Gemmayzé, Akkaoui, Mar Mitr, Saint-Nicolas, Ghandour el-Saad et la rue du Liban, donne une idée de « l'extension de la nécropole de Beyrouth ».
À Gemmayzé, sur la parcelle où se posera l'immeuble Convivium VI, les archéologues ont mis au jour les vestiges d'habitations remontant à la fin de l'époque hellénistique. « Là aussi, l'indice est nouveau et intéressant parce que jusque-là, nous croyions que cette zone était agricole et funéraire. Les chantiers en perspective à Saïfi et Rmeil, archéologiquement parlant secteurs très importants, vont petit à petit permettre de clarifier la topographie historique de Beyrouth », a encore souligné le directeur des fouilles à la DGA.
Au centre-ville, place Riad el-Solh, les premières excavations menées sur le terrain du projet « Millénium » ont dévoilé « des fragments de la muraille médiévale dont la structure a été modifiée plusieurs fois au cours des siècles », signale Seif, ajoutant que les archéologues procèdent actuellement à des sondages « pour connaître la chronologie du site et établir le programme des grandes fouilles ».
Par ailleurs, une nécropole romaine a été mise au jour alors qu'une pelleteuse était à l'œuvre dans un chantier pour la construction d'un complexe touristique (bien-fonds n° 492). Cette nécropole est une prolongation de celle qui a été découverte, il y a cinq ans, lors des travaux de construction de la Byblos Bank. Les fouilles se poursuivent sur ce site, mais aussi à Batroun où des sondages menés sur un terrain privé ont révélé des installations funéraires.
Côté Sud-Liban, les fondations de la muraille hellénistique et une partie de la nécropole romaine ont été découvertes, place des Martyrs, à Saïda. De même, la route antique de l'entrée sud de Sidon et une partie de son dallage datant des Ier et IIe siècles avant J.-C. ont été repérées. La DGA est en négociation avec les propriétaires du terrain et ceux des parcelles mitoyennes en vue d'une opération d'expropriation.
Signalons que les fouilles sont menées par des archéologues appartenant aux différentes universités libanaises. « Des problèmes se posent toutefois au niveau de l'effectif humain, dit Assaad Seif. En raison de l'essor donné à la construction, toutes nos équipes sont souvent occupées à des chantiers et il arrive qu'aucune ne soit disponible pour entamer de nouvelles investigations, ce qui retarde l'opération de construction. Mais le problème ne peut être uniquement attribué à la DGA. Pour éviter les conflits d'intérêts, nous demandons depuis un an à la municipalité de nous informer lorsqu'un promoteur dépose sa demande de permis de construction. En attendant l'obtention du permis, nous aurons ainsi le temps d'intervenir sur le terrain de manière à éviter aux promoteurs d'attendre l'intervention archéologique puisque nous disposerons d'un délai de 18 à 20 mois pour faire des sondages ou entreprendre des excavations. On n'a jamais reçu de réponse de la municipalité. Aucune coopération n'a pu être établie avec elle. Avouez que cette attitude est surprenante. »