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Actualités - OPINION

A posteriori Culture pédestre De Colette KHALAF

Un journaliste lançant sa chaussure à la tête de George Bush, l’« événement » survenu la semaine dernière et faisant intervenir un accessoire vestimentaire a soudain ravivé la mémoire et rappelé combien la chaussure a été, au fil des époques et des âges, un élément d’ordre sociologique, mais également culturel. C’est en passant par la Lorraine avec ses sabots que la gentille « damoiselle » a été appelée vilaine par trois capitaines. Mais c’est avec ces mêmes sabots « dondaine » que le fils du roi va la choisir et l’aimer. Les sabots deviennent ainsi, dans cette comptine bien française, un élément de séduction. Séduction toujours quelques siècles plus tard, lorsque le King du rock and roll fera les louanges de ses « Blue suede shoes » à la brillance étincelante. Mais qu’elle soit bottine, escarpin ou botte, la chaussure n’est pas faite seulement pour marcher comme le chantera Nancy Sinatra dans sa chanson « These boots are made for walking ». Elle se parera de différentes fonctions. « Le conte du Chat botté » de Perrault, lui, prouve combien la botte peut être objet de malice. Un récit dont la morale, ambiguë, laisse entendre que la ruse paie plus rapidement et plus sûrement que le labeur ou le talent. En effet, ce matou quelque peu paresseux n’hésitera pas à mentir au roi, à manipuler l’ogre et à corrompre les paysans pour faciliter l’ascension sociale de son jeune maître afin de pouvoir lui-même vivre oisivement par la suite. Cependant, selon une autre analyse, il est démontré que chaque action du chat ou du meunier est une étape vers la réalisation de soi et la perfection. Cette énergie, activée par la confection de bottes et la lutte contre les forces obscures dans le combat contre l’ogre, est dans la logique d’un parcours initiatique. Mais trêve de philosophie. Revenons au chausse-pied et à celui qui l’utilise avec arrogance et désinvolture. J’ai évoqué « Le Grand blond avec la chaussure noire » qui, en dépit de sa naïveté, sera perçu comme un dangereux espion. Naïveté, ruse, intelligence, mais aussi sensualité pour cette gentille Cendrillon qui perdit son escarpin au bal, ce qui devint, pour les freudiens de notre époque, signe fétichiste. Et comment oublier ce merveilleux voyage à bord d’un grand soulier magique, concocté par l’amie des enfants, Chantal Goya ? Autant de connotations à cet atout vestimentaire, devenu « cultissime » tant dans la littérature que dans les autres arts et qui, pourtant, s’est métamorphosé à l’aube du XXIe siècle en un effrayant projectile. Si donc il existait, à une certaine époque, « un Chat botté » qui a su vaincre l’ogre par sa ruse (apparemment contenue dans les souliers), il existe aujourd’hui d’autres personnes qui combattent les forces du mal sous d’autres cieux. On les appelle les journalistes bottés. Et pourquoi pas culottés ? Tant qu’à faire !
Un journaliste lançant sa chaussure à la tête de George Bush, l’« événement » survenu la semaine dernière et faisant intervenir un accessoire vestimentaire a soudain ravivé la mémoire et rappelé combien la chaussure a été, au fil des époques et des âges, un élément d’ordre sociologique, mais également culturel. C’est en passant par la Lorraine avec ses sabots...