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Société Les Britanniques se mobilisent pour sauver leurs pubs

Crise économique, consommation en baisse, pression immobilière... Chaque jour, cinq pubs ferment leurs portes au Royaume-Uni. Pour éviter la disparition d’un patrimoine et d’un véritable mode de vie, les Britanniques se mobilisent, stars en tête. Le tee-shirt n’avait rien d’un vêtement de marque, mais il a quand même trouvé le chemin des frêles épaules de la top-modèle Kate Moss. En janvier dernier, le mannequin rejoignait le défilé de stars qui ont arboré le tricot de coton blanc marqué « Save the George Tavern », après la chanteuse Amy Winehouse et avant l’Américaine Grace Jones. Le « George », c’est une institution dans l’East End londonien. Un pub existait à cet endroit dès 1654. Reconstruit en 1891, son impressionnante façade victorienne se dresse toujours comme un phare dans ce quartier déshérité. On vient siroter un whisky sur ses banquettes de cuir élimé, ou une bière fraîche à son comptoir suranné, à peine éclairé par la lumière blafarde de vieux lustres décatis. Dans les salles de concert étriquées aménagées dans ses étages, des milliers de musiciens s’y sont succédé, des Rolling Stones à Duran Duran. Mais un promoteur immobilier veut construire autour du pub classé une résidence de logements bon marché. « Ce serait comme construire un Monoprix juste à côté de la Tour de Londres », résume Deborah Coughlin, gérante adjointe. Les appartements seraient si proches que les plaintes des résidents n’auraient pas manqué d’affluer contre le bruit des concerts quotidiens qui ont lieu à la taverne, la condamnant avec certitude, estime Pauline Forster, propriétaire des lieux. Pauline a puisé dans le carnet d’adresses de ses amis artistes qui ont défilé au « George ». Elle a contacté Amy Winehouse, la diva trash de la soul, qui a eu l’idée de faire imprimer les tee-shirts marqués « Save the George Tavern ». Les célébrités se sont succédé : Kate Moss, Ian McKellen (qui a joué le rôle de Gandalf dans Lord Of The Rings) et tout récemment Grace Jones. Une pétition a été signée par 600 personnes, et en juin, les autorités locales ont refusé le permis de construire. Mais le promoteur vient de faire appel, arguant de la « nécessité de fournir des logements bon marché ». Pour le « George », le combat reprend. Pour d’autres, il ne fait que commencer. Selon l’Association britannique des pubs et de la bière (BBPA), cinq pubs ferment chaque jour au Royaume-Uni. Il en reste actuellement 57 000, contre 69 000 en 1980. La BBPA cite comme raison majeure le recul de la consommation de la bière, touchée par la baisse du pouvoir d’achat, et les changements d’habitude, les gens préférant de plus en plus rester chez eux. Mais la menace vient surtout des promoteurs immobiliers, soulignent les gérants de pubs. « Ils voulaient se débarrasser de nous pour construire une issue de secours, une putain d’issue de secours ! » : Robert Collins gère le « Nell Gwynne » depuis 11 ans. Façade rouge carmin piquée de pots de géraniums roses, cheminée carrelée où il fait bon se sécher du crachin londonien, rideaux de velours épais entourant des fenêtres à petits carreaux... le « Nell » est un bijou architectural du XVIe siècle. Mais dans les étages de l’immeuble du centre-ville dont il occupe le rez-de-chaussée, des promoteurs immobiliers voulaient construire des bureaux. Il leur fallait une issue de secours, le « Nell » devait donc disparaître. « Les gens étaient vraiment en rage », se souvient Robert. Un client a lancé une pétition en ligne et deux milliers de signatures ont été recueillies. Face au tollé, les promoteurs ont renoncé cet été au projet, accordant un nouveau bail de cinq ans au « Nell Gwynne ». Mais Robert n’ose pas se réjouir : « J’aimerais pouvoir dire qu’on ne disparaîtra jamais, mais revenez quand même dans cinq ans. »
Crise économique, consommation en baisse, pression immobilière... Chaque jour, cinq pubs ferment leurs portes au Royaume-Uni.
Pour éviter la disparition d’un patrimoine et d’un véritable mode de vie, les Britanniques se mobilisent, stars en tête. Le tee-shirt n’avait rien d’un vêtement de marque, mais il a quand même trouvé le chemin des frêles épaules de la...