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Actualités - REPORTAGE

CORRESPONDANCE Une petite lingerie sculptée, accrochée en pleine rue, ou l’histoire du sous-vêtement féminin

WASHINGTON, d’Irène MOSALLI Le linge qui sèche au soleil et qui se balance sur une corde, une vision complètement oubliée qu’a revisitée, à sa manière, l’artiste américaine Joyce Zipperer. Elle a réalisé une installation intitulée?«?À ne pas mentionner… Hier et aujourd’hui?». Sur un mince fil de fer, elle a accroché?l’évolution des sous-vêtements féminins : à commencer par la feuille de vigne pour finir avec le string, en passant par la petite culotte bouffante, celle plus corsetée, le bikini froufroutant, puis ne tenant plus que par un fil. Une composition aguichante, mais non dénuée de style et d’inventivité. La feuille de vigne est taillée dans du métal, à la manière d’un bijou, et elle est retenue par une chaîne dorée. Zipperer a sculpté les autres pièces dans un métal de différentes tonalités et travaillé en treillage fin pour un effet de transparence et de dentelle. Le square d’un quartier du centre-ville de Washington, transformé en galerie d’art à ciel ouvert, l’a invitée à étendre sa petite lingerie au su et au vu de tout le monde. Cachez cette intimité… L’accueil a été des plus mitigés. Une partie du voisinage a vu d’un bon œil cette création qui lui rappelait le bon temps où tout le monde mettait à sécher sa lessive au jardin. D’autres, notamment un bureau d’avocats, ne l’ont pas trouvée à leur goût. Cachez-leur cette intimité qu’ils ne sauraient voir?! Les responsables de l’accrochage n’ont pas demandé de suite à l’artiste d’aller se rhabiller, mais de remplacer strings et bikinis par d’autres pièces. Ne voulant pas altérer sa chronologie, Joyce Zipperer a ramassé sec son linge qui avait déjà été exposé ailleurs à Washington sans que quiconque ne lui ait demandé de le plier. Elle explique pourquoi elle a exécuté cette œuvre?: –?«? Mon travail est le résultat du grand intérêt que j’ai toujours eu pour le design de vêtements et de costumes qui, en fin de compte, devait me mener à leur donner forme en les sculptant. À travers l’histoire, les femmes ont été influencées par les différents courants de la mode, occultant souvent leur confort et leur bonne santé. Dans ce contexte, je me suis alors axée sur les sous-vêtements féminins. J’ai travaillé le métal en feuille ou en tissage, et j’ai taillé la pierre pour transmettre ces comportements qui sont en fait les reflets de notre culture passée et présente. J’ai également évoqué d’autres contraintes vestimentaires : les modèles qui étouffent les bustes et les styles de chaussures qui donnent des crampes aux pieds. » À son actif, une série de sculptures-habits que Joyce Zipperer a conçus comme de véritables œuvres d’art avant d’y glisser son message anticontrainte, antisujétion et antisouffrance au nom d’une esthétique ponctuelle qui sera sans doute suivie d’une autre puis d’une autre, aussi lourde à porter et à supporter. Et dire que Coco Chanel avait été à contre-courant en créant une mode libératrice. Aujourd’hui, les femmes sont prêtes à tout pour être hip, en sacrifiant un tant soit peu de confort et en triturant les pieds, haut perchées sur des «?stiletos?» emprisonnant les orteils dans leurs bouts on ne peut plus pointus.
WASHINGTON,
d’Irène MOSALLI

Le linge qui sèche au soleil et qui se balance sur une corde, une vision complètement oubliée qu’a revisitée, à sa manière, l’artiste américaine Joyce Zipperer. Elle a réalisé une installation intitulée?«?À ne pas mentionner… Hier et aujourd’hui?». Sur un mince fil de fer, elle a accroché?l’évolution des sous-vêtements...