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Actualités - REPORTAGE

Reportage En alerte dans le Grand Nord face aux bombardiers russes

Comme dans un remake de la guerre froide, les inquiétantes silhouettes des bombardiers stratégiques russes reviennent s’aventurer dans les cieux longtemps désertés du Grand Nord, plaçant sur le qui-vive les chasseurs de l’OTAN. Sur la base aérienne de Bodoe en Norvège, au-delà du cercle polaire, deux F-16 se tiennent en alerte opérationnelle permanente, prêts à prendre l’air en moins de 15 minutes pour aller à la rencontre des visiteurs venus de l’Est. « On constate une augmentation marquée de l’activité aérienne des Russes depuis un an », confie le commandant de la base, le général Per Egil Rygg. « Ça nous fait plus de pain sur la planche », dit-il. En 2006, les F-16 norvégiens ont effectué 13 décollages d’urgence pour aller « identifier », selon la phraséologie en vigueur, 14 appareils russes. L’année suivante, la même opération a eu lieu à 47 reprises avec pas moins de 88 avions russes « identifiés ». Une montée en puissance due à la décision de Vladimir Poutine, alors président, de reprendre les vols de bombardiers stratégiques « sur une base permanente ». Et, malgré le conflit en Géorgie, les Norvégiens disent n’avoir noté aucun ralentissement ces derniers temps. Si, à Bodoe, on qualifie le niveau d’activité de l’aviation russe de « digne de la guerre froide », on souligne aussi que l’atmosphère est aujourd’hui « bon enfant ». « Ils restent constamment dans l’espace aérien international sans violer la souveraineté norvégienne. Ils sont dans leur plein droit », affirme le général Rygg. « Nous, on marque notre territoire, mais ils ne nous posent vraiment pas de souci », ajoute-t-il. Pour Oslo, la réapparition massive des bombardiers Tu-95 « Bear » et des Tu-160 « Blackjack » sous ces latitudes est le signe d’une aisance budgétaire retrouvée qui rend possible la reprise des missions d’entraînement davantage qu’une volonté de montrer ses muscles. Difficile pourtant de ne voir qu’une coïncidence quand, comme l’an dernier, les bombardiers russes viennent lécher les espaces aériens néerlandais au moment où les Pays-Bas accueillent une importante réunion de l’OTAN, ou britannique alors que les tensions entre Londres et Moscou sont à leur comble. À quelque 600 km de la frontière russe à vol d’oiseau, Bodoe a toujours été un maillon important pour les États-Unis et leurs alliés. Le musée de l’aviation, à un jet de pierre de l’enceinte, ne manque pas de le rappeler, qui abrite un rare exemplaire d’avion espion américain U2, du même type que celui abattu au-dessus de l’URSS en 1960 au cours d’une mission clandestine qui devait s’achever à Bodoe. Sur la base, l’heure est maintenant à la détente. Passée l’entrée où un garde tout sourire se livre à une inspection distraite, le visiteur est guidé par un officier affable entre les abris en dur recouverts d’herbe qui accueillent une grosse trentaine de F-16. La bonhomie est aussi de mise chez le capitaine Jon Andersen – un pseudonyme –, l’un des pilotes de chasse chargés régulièrement de se porter à la rencontre des Russes. « On opère avec beaucoup de doigté », explique-t-il. « On arrive par l’arrière, on se tient à distance respectueuse, pas moins de 500 pieds (150 mètres) et eux, ils poursuivent leur mission comme si de rien n’était. Ils ne changent pas de cap juste parce qu’on est là », affirme l’officier de 31 ans. Pas de geste insultant à la Top Gun – un film qu’il dit avoir vu une cinquantaine de fois – lors de ces rencontres aériennes mais une confraternité respectueuse. « On peut voir leurs têtes bouger. On prend des photos les uns des autres. Des fois, on se salue même de la main », relate le pilote norvégien. Pierre-Henry DESHAYES (AFP)
Comme dans un remake de la guerre froide, les inquiétantes silhouettes des bombardiers stratégiques russes reviennent s’aventurer dans les cieux longtemps désertés du Grand Nord, plaçant sur le qui-vive les chasseurs de l’OTAN.
Sur la base aérienne de Bodoe en Norvège, au-delà du cercle polaire, deux F-16 se tiennent en alerte opérationnelle permanente, prêts à prendre...