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Actualités - CHRONOLOGIE

La maison du poète telle qu’elle fut de son vivant…

Quand l’inspiration lui venait, Élias Abou Chabké consignait, paraît-il, ses vers partout, même sur les murs de sa maison où, rentrant tard d’une virée nocturne, il ne prenait pas la peine de s’installer à son bureau devant une traditionnelle feuille blanche ! Cette histoire, narrée par un témoin visuel, en l’occurrence le poète et membre du comité du Musée Élias Abou Chabké, Henri Zogheib, n’est pas une légende même si, aujourd’hui repeints, les murs de la maison du poète à Zouk Mikaël n’en portent plus aucune trace. Sauf que dans cette ancienne demeure bourgeoise du XIXe siècle, où vécut, jusqu’à sa mort, l’auteur de L’appel du cœur et des Vipères du Paradis, les visiteurs et en particuliers les amoureux de son œuvre retrouveront désormais outre le décor de vie du poète, de nombreux documents d’archives, lettres, manuscrits, articles de presse et photographies le concernant, soigneusement présentés dans des pupitres sous vitres. Voilà plusieurs décennies que la municipalité de Zouk Mikaël et son président, Nouhad Naufal, s’attellent à faire revivre la mémoire d’une des plumes libanaises parmi les plus importantes à travers un musée qui lui est exclusivement dédié, érigé dans les murs mêmes de sa maison. Péripéties Et, à cet effet, il a fallu du souffle et de la persévérance pour, tout d’abord, sauver l’ancienne demeure en pierre de taille de la démolition en achetant la parcelle, puis la protéger de la détérioration et, durant les années de guerre, du vandalisme des occupants illégaux qui y avaient même ouvert un magasin de chaussures. À la fin de la guerre – dite civile –, Nouhad Naufal avait fait appel à une pléthore de personnalités politiques et intellectuelles pour soutenir son projet de musée en constituant un comité exclusivement dédié à cet effet. Présidé au départ par l’ancien chef de l’État Charles Hélou et aujourd’hui par Ghassan Tuéni, ce comité, qui compte parmi ses membres, entre autres, l’ancien ministre Michel Eddé et les députés Marwan Hamadé, Bahia Hariri et Nayla Mouawad, a parrainé l’entreprise de longue haleine qu’exigèrent le financement des travaux de restauration de la maison et la recherche (et notamment le rachat) de tout ce qui a pu s’y trouver et appartenir au poète. L’objectif final étant bien sûr de présenter Élias Abou Chabké aux générations nouvelles, à travers la reconstitution à l’identique (dans la mesure du possible) de son cadre de vie. En 1997, à l’occasion de la célébration du cinquantenaire de la mort d’Élias Abou Chabké, une partie du projet avait déjà été terminée. La maison aux volets gris avait été restaurée de l’extérieur. Et, à l’intérieur, les dallages en marbre croisé au salon et en tommette dans les chambres, les murs et les plafonds peints avaient déjà repris leurs tracés et leurs couleurs d’origine. Scénographie de Jean-Louis Mainguy Il restait à y importer les effets personnels et les meubles du poète. Des meubles d’origine, le comité du musée a pu retrouver surtout le mobilier de sa chambre à coucher : le lit en cuivre («?racheté auprès d’une famille à Ajaltoun?», révèle Henri Zogheib), l’armoire et la table en bois sur laquelle Abou Chabké a rédigé la majeure partie de son œuvre. Les autres pièces d’ameublement, mis à part une console, une table en bois marqueté et un miroir d’époque, ont été reconstituées à l’identique, sur base des photographies d’archives. Confiée au bureau d’études de Jean-Louis Mainguy (qui a offert sa contribution gracieusement), la scénographie de ce musée, tout en introduisant des éléments de modernité (comme les projecteurs sur rails, les grands panneaux verticaux imprimés de textes, photos et lettres du poète), respecte l’atmosphère XIXe siècle de la maison. Outre les présentoirs dans lesquels ont été consignés les manuscrits et textes d’archives – dont certaines lettres en français adressées à sa femme Olga, la fameuse Ghaloua’ de ses poèmes –, le visiteur se familiarise avec l’univers d’Élias Abou Chabké à travers les portraits et photographies agrandis de sa famille (notamment sa mère et l’une de ses sœurs, avec lesquelles il a vécu dans cette maison, même après son mariage avec Olga dont il ne partagea jamais le même toit), de ses amours (sa muse Lily el-Adem) et de ses amis et camarades de plume. À l’instar de Khalil Takieddine, al-Akhtal al-Saghir, Moustapha Farroukh (qui l’a peint de profil, en 1936, à l’aquarelle), César Gemayel, ou encore avec les patrons des trois quotidiens de l’époque, auxquels il collaborait, à savoir : Gebran Tuéni (Saout al-Ahrar), Michel Zakkour (al-Maarad) et Fouad Hobeich (al-Makchouf)… Si ce n’est pas la maison du poète, exactement telle qu’elle fut de son vivant, voici la maison du poète hantée à nouveau, outre les ombres familières, par l’assemblée d’intellectuels et de poètes qui la fréquentait. Une assemblée qui trouve naturellement sa place au sein de ce musée. Dédié à l’immortalité du verbe… Zéna ZALZAL * Musée Élias Abou Chabké, Zouk Mikaël, avenue principale, près du palais municipal. Horaires d’ouverture : tous les jours, de 9h00 à 17h00.
Quand l’inspiration lui venait, Élias Abou Chabké consignait, paraît-il, ses vers partout, même sur les murs de sa maison où, rentrant tard d’une virée nocturne, il ne prenait pas la peine de s’installer à son bureau devant une traditionnelle feuille blanche !


Cette histoire, narrée par un témoin visuel, en l’occurrence le poète et membre du comité du Musée...