Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

OPÉRA Avec Barenboïm et Chéreau, un « Tristan » de maîtres à la Scala

La Scala de Milan a ouvert sa saison 2007-2008 avec un Tristan et Isolde de Wagner attestant que l’Israélien Daniel Barenboïm est bien le nouveau « maestro » de la maison et le Français Patrice Chéreau toujours un maître de la mise en scène d’opéra. La première de cette nouvelle production a donné lieu, comme chaque 7 décembre (jour de la Saint-Ambroise, le patron de la ville), à un grand défilé de personnalités, dont le ministre italien de la Culture, Francesco Rutelli, et son homologue française Christine Albanel. Mais les yeux et les oreilles des mélomanes étaient plutôt tournés vers la réalisation de Barenboïm et Chéreau, qui présentent ensemble ce Tristan jusqu’au 2 janvier à la Scala, plus d’un quart de siècle après y avoir songé pour la première fois. Le metteur en scène a préféré attendre l’âge de la maturité (63 ans) pour aborder ce chef-d’œuvre, redoutant que cette deuxième incursion personnelle en terre wagnérienne ne reste dans l’ombre de son mythique Ring de Bayreuth (1976-1980). Il a bien fait de patienter si l’on considère le résultat, qui frappe par sa force tranquille, à même de mettre en valeur la dramaturgie musicale de l’œuvre sans jamais la détourner de son cours. Le rideau se lève, dans la brume, sur un décor à la verticalité et à la monumentalité impressionnantes : Richard Peduzzi, scénographe attitré de Chéreau, a conçu une grande embarcation d’aujourd’hui, métallique et rouillée, qui fend un mur antique comme l’Empire romain. Comme si Tristan et Isolde n’étaient ni d’une terre ni d’une époque particulières, mais deux figures universelles à la dérive entre l’amour et la mort. À l’acte II, le bateau a logiquement disparu mais pas le mur romain, entouré de cyprès dont l’un projette une belle ombre sur la tour de garde. Dans ce tableau nocturne nimbé de superbes lumières froides, le metteur en scène règle le fameux duo d’amour avec une saine économie de gestes et de regards. Le coup de théâtre guette : Tristan répond à ses pulsions morbides en se jetant sur une lance, et la parfaite adéquation entre ce qui se voit (la scène) et ce qu’on entend (la fosse) glace le sang quand le plateau est subitement plongé dans le noir. Le drame s’achève dans un port bétonné, avec sa jetée et son escalier d’accès, où Tristan livre son dernier souffle en un bouleversant tête-à-tête avec Isolde : celle-ci a les traits de la mezzo allemande Waltraud Meier, au vibrato plein d’émotion, qui s’abandonne à une mémorable « mort d’amour ». La distribution, dans l’ensemble, serait d’ailleurs prompte à faire mentir les théoriciens de la crise du chant wagnérien. Le timbre d’argent du ténor britannique Ian Storey fait le prix de son Tristan, tandis que la basse finlandaise Matti Salminen compose un roi Marke (l’oncle de Tristan) absolument souverain. La mezzo américaine Michelle de Young (la suivante d’Isolde) et le baryton allemand Gerd Grochowski (Kurwenal, l’écuyer de Tristan) font eux des débuts remarqués à la Scala. À 65 ans, Barenboïm, lui, n’en est pas à son premier Tristan – il a dirigé l’œuvre dès 1981 à Bayreuth et après 1992 à Berlin – et cela s’entend : sous sa direction très dramatique, finement ciselée, l’Orchestre de la Scala ne manque pas de charmes vénéneux ni de tendre séduction. Sous une pluie de fleurs jetées des galeries hautes, le public milanais a acclamé son nouveau « maestro scaligero » (maestro de la Scala), désormais premier chef invité de la maison sans le titre, mais avec les honneurs qui lui sont dus. Benoît FAUCHET (AFP)
La Scala de Milan a ouvert sa saison 2007-2008 avec un Tristan et Isolde de Wagner attestant que l’Israélien Daniel Barenboïm est bien le nouveau « maestro » de la maison et le Français Patrice Chéreau toujours un maître de la mise en scène d’opéra.
La première de cette nouvelle production a donné lieu, comme chaque 7 décembre (jour de la Saint-Ambroise, le patron de la ville),...