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VIENT DE PARAITRE - Sur la liste des prix Goncourt et Renaudot, « Portrait de l’écrivain en animal domestique » de Lydie Salvayre Le blues du plumitif... face au businessman

Dans la foulée d’une rentrée littéraire française plutôt grave, privilégiant les thèmes sociaux, les biographies désenchantées et les récits dramatiques, voici un livre qui fait figure de joyeuse exception. « Portrait de l’écrivain en animal domestique » de Lydie Salvayre* (éditions du Seuil, 234 pages) est une amusante satire du capitalisme à outrance, de l’abrutissement des masses par la consommation, mais surtout des liens complexes qu’entretiennent « littérateurs » et hommes d’affaires. Lorsque Tobold, « le roi du hamburger » – l’homme le plus influent de la planète, sa fortune précédant sur la liste du magasine Forbes celle de Bill Gates—, propose à la narratrice, une femme de lettres désargentée, une intellectuelle de gauche, de rédiger sa biographie contre une rétribution plus que conséquente, cette dernière n’a pas le cœur de refuser. Pour prendre des notes sur son sujet, il va lui falloir vivre à proximité du magnat – et de son chien subtilement appelé Dow Jones–, pénétrer les coulisses de son pouvoir, le suivre dans ses divagations labyrinthiques sur le libre-marché, dont il se proclame le prophète, et partager jusqu’à son intimité (tiens, cela rappelle, dans une certaine mesure quand même, la démarche de Yasmina Reza pour son ouvrage sur Sarkozy, L’aube, le soir ou la nuit, qui vient de sortir !). Une ex-ascète de l’écriture Concrètement, cela signifie qu’elle va se promener à travers le monde en jet privé, qu’elle va errer dans les 146 pièces de son appartement new-yorkais, qu’elle va bénéficier d’un traitement de faveur partout où elle se rend en sa compagnie, qu’elle va côtoyer le gratin de Hollywood, dont Robert de Niro, son « Bob », son fantasme, auquel elle fait appel par la grâce de l’imaginaire dans les moments durs. Car même ramollie par l’indescriptible luxe dans lequel elle baigne, cette jeune femme, ex-ascète de l’écriture, qui a toujours prétendu consacrer sa vie à la littérature, souffre de se complaire dans cet univers de faste et d’abondance. Oscillant de la fascination au mépris, déchirée entre dédain mental et soumission apparente, si elle éprouve envers le grossier, le cynique, l’arrogant Jim Tobold des sentiments ambigus, c’est cependant à elle-même qu’elle adresse ses plus vifs reproches. Mais attention, sur ce thème profond qu’est le reniement des hautes valeurs, la désertion de l’idéal au profit du confort, mais aussi l’écrasante domination de la contre-culture de masse, Lydie Salvayre a eu le bon goût de faire, plutôt qu’un pensum moralisateur, un roman drôle, loufoque, amusant, mâtiné d’autodérision. Et cela, malgré les mots savants qui le parsèment, et qui rendent sa lecture ardue par moments, et les quelques longueurs dont le lecteur aurait pu se passer. C’est La Compagnie des spectres publié en 1997 (aux éditions du Seuil également) qui avait fait connaître Lydie Salvayre. Serait-ce le Portrait de l’écrivain en animal domestique qui lui vaudra son premier grand prix littéraire, en l’occurrence le Goncourt ou le Renaudot sur les listes desquels il figure en première sélection? Les paris restent ouverts... Zéna ZALZAL * Disponible à la librairie Stephan.
Dans la foulée d’une rentrée littéraire française plutôt grave, privilégiant les thèmes sociaux, les biographies désenchantées et les récits dramatiques, voici un livre qui fait figure de joyeuse exception. « Portrait de l’écrivain en animal domestique » de Lydie Salvayre* (éditions du Seuil, 234 pages) est une amusante satire du capitalisme à outrance, de l’abrutissement...