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Actualités - CHRONOLOGIE

Affluence matinale dans les bureaux de vote Au Metn, une atmosphère détendue entre partisans de ceux qui furent un jour dans le même camp Patricia KHODER

Deux véhicules provoquent l’embouteillage dans la rue d’un village du Haut-Metn. Dans l’une d’elles, des jeunes portent des étendards des Kataëb et des Forces libanaises. Sur les vitres du véhicule, des portraits d’Amine et de Pierre Gemayel. Dans l’autre voiture, un jeune homme, vêtu d’orange et portant le brassard rouge, noir et blanc du Parti syrien national social (PSNS) brandit un drapeau du Hezbollah. Sur les vitres de l’automobile, des portraits du général Michel Aoun. Les deux véhicules, face à face, diffusent des chants partisans à fond la caisse et les deux jeunes hommes derrière le volant refusent de céder le passage. La tension monte, les automobilistes derrière eux s’impatientent et craignent une rixe. Mais la voiture arborant les couleurs du général Aoun et de ses alliés finit par se garer à droite et céder le passage. Cette scène à Aïntoura el-Metn – où certains rappellent que de nombreux partisans de la famille Murr sont Kataëb à l’origine – donne une idée de la bataille de la partielle du Metn hier entre les supporters du mouvement du 14 Mars, d’une part, et les partisans du général Aoun, des courants prosyriens et, bien sûr, sur le littoral, du Tachnag, d’autre part. Craignant probablement des rixes et des incidents, les Metniotes se sont rendus très tôt aux urnes, le taux de participation frisant dans certains bureaux de vote, que ce soit sur le littoral ou à la montagne, non moins de 25 %, vers 9 heures 30. À Aïntoura el-Metn, le village est depuis bien longtemps divisé en deux, entre Kataëb et PSNS. Et hier, ces derniers – comme dans le village voisin de Khonchara – arboraient comme les aounistes la couleur orange. Mais malgré la division politique, l’ambiance était calme, presque bon enfant, dans ces localités du Metn. C’est ce que confirmait l’ancien candidat aux élections du Metn, Selmane Samaha, originaire de Khonchara. Samaha, militant souverainiste, est rentré de voyage pour voter et soutenir Amine Gemayel. « Il faut en finir avec la culture consistant à annuler l’autre. Malgré le départ des Syriens en 2005, c’est comme si nous étions revenus à la case départ », indique-t-il. À Mrouj, alors que des partisans du courant aouniste restaient calmement sur la chaussée, des convois des Kataëb, des FL et d’autres partisans du 14 Mars, notamment le PSP, dont les partisans habitent des villages voisins situés dans le caza de Baabda, sillonnaient les rues. Un partisan des Phalanges indique : « Il y a un peu plus de deux ans, on ne pouvait arborer aucun signe antisyrien dans cette zone. » Il ajoute : « En 2005, beaucoup de personnes de la région ont voté pour le général Aoun. Ce n’est plus le cas actuellement… Il y a un changement dans la rue chrétienne. Elle ne soutient plus le CPL. » À Bteghrine, fief de l’ancien vice-Premier ministre et député du Metn, Michel Murr, l’ambiance est également bon enfant. Ici, la quasi-majorité des électeurs vote pour Camille Khoury, le candidat du CPL. « Bteghrine est la patrie de la démocratie. Chacun fait ce qu’il veut… et moi j’ai voté pour Amine Gemayel », lance en plaisantant un homme arborant un foulard orange. Un peu plus loin, une électrice indique qu’elle votera pour le candidat du général Aoun : « Pierre Khoury ». Les voix des maronites Sur la route qui mène de Bteghrine à Bickfaya et qui serpente entre les petits villages du Metn, on ne voit que les portraits de Gemayel et de son fils assassiné ainsi que les drapeaux Kataëb. Vers 13 heures, dans un bureau de vote de Sakiet el-Misk, village limitrophe de Bickfaya, le taux de participation a atteint les 50 %. Georges est scrutateur du candidat aouniste, mais porte un badge au portrait de Pierre Gemayel. « Il est originaire de mon village et il a été assassiné », explique le jeune homme, assurant avoir voté pour le candidat du CPL. Patricia Pierre Gemayel, épouse du député assassiné en novembre dernier, arrive dans le bureau de vote. Elle est accueillie par les applaudissements. Elle se dit « confiante », indique que « la bataille est dédiée à Pierre », souligne encore qu’il y aura des activités pour perpétuer la mémoire de son mari par le biais d’une association qui porte le nom du député assassiné. Tout le long de la journée, les convois ont sillonné les rues de Bickfaya, fief des Gemayel, provoquant des embouteillages en fin d’après-midi. Dans la résidence de l’ancien président de la République, beaucoup de partisans sont venus de plusieurs régions du Liban, notamment du Kesrouan, de Jbeil et du Liban-Nord. Ils disent qu’ils préfèrent « attendre les résultats ici que de rester chez eux ». Interrogé par L’Orient-Le Jour, le conseiller de l’ancien président Gemayel, Sélim Sayegh, met l’accent sur « l’importante affluence des maronites aux bureaux de votes » et souligne que « les semaines qui ont suivi l’assassinat de l’ancien Premier ministre, Rafic Hariri, ont initié une dynamique historique que rien ne pourra arrêter ». À Baabdate, village du président de la République, Émile Lahoud, beaucoup votent selon les consignes données par l’ancien député Nassib Lahoud. Devant les convois des Kataëb, Grace, une supportrice du CPL, toute vêtue d’orange, indique : « Si nous n’avons pas de convois, c’est parce que le général nous a demandé de rester calmes. Et puis, ils peuvent nous agresser… ». Un peu plus loin, des supporters du général Aoun, dénoncent « des pratiques douteuses », et affirment que « certains présidents de conseils municipaux refusent de leur remettre leurs cartes d’électeurs parce qu’ils veulent voter pour le candidat aouniste ». Fidèles au sang des martyrs Kornet el-Hamra, village du candidat aouniste. Ici, comme ailleurs, les supporters aounistes et Kataëb se sont rassemblés côte à côte sur la chaussée. Un convoi arrive, on frise la rixe, mais tout se calme rapidement. Un homme se présente : Georges Khoury. Il est le chef des Kataëb du village et le cousin germain du candidat aouniste. C’est en applaudissant et en entonnant des vieux hymnes Kataëb que les militants accueillent Nicole Gemayel Mekattaf, fille de l’ancien président, qui effectue une tournée dans les bureaux de vote. En début d’après-midi, à Antélias, où les bureaux de vote ont connu une importante affluence le matin, certains indiquent qu’ils « veulent montrer que les Metniotes sont fidèles au sang des martyrs ». Vers 15 heures, la situation était un peu tendue sur le littoral du Metn. L’armée avait dressé des barrages, notamment à Amaret Chalhoub, Zalka et Jdeidé, confisquant les mâts des drapeaux aux supporters pour empêcher d’éventuelles bastonnades entre les partisans des deux clans. À Amaret Chalhoub, où le taux d’affluence a atteint les 30 % à 10 heures 30, l’ambiance tranche avec celle des villages du Metn, les supporters des deux camps s’adressant à peine la parole. Les militants Kataëb dénoncent le vote des naturalisés dans la localité. Les partisans de Michel Murr nient en bloc et indiquent que les électeurs en question sont originaires des localités voisines. À Jdeidé, en début d’après-midi, 45 % des électeurs de la localité avaient voté. Aux portes des centres électoraux, comme partout ailleurs, aux entrées des bureaux de vote, les scrutateurs des Kataëb distribuent des roses blanches en hommage au député assassiné. Youmna Béchir Gemayel arrive sur les lieux, elle est acclamée aussi bien par les militants aounistes que par les supporters Kataëb. Quand ces derniers se mettent à scander « Pierre est vivant en nous », les supporters du CPL crient de leur côté, « Béchir est vivant en nous ». Et Youmna Gemayel, qui a activement pris part à la campagne de son oncle, serre chaleureusement la main des personnes appartenant aux deux groupes. Le vote arménien Hier après-midi, les rues des Bourj Hammoud étaient calmes, les partisans des Kataëb sillonnant de temps à autre les rues de ce secteur majoritairement arménien. À l’école Mesropian, qui compte le plus grand nombre de bureaux de vote, l’affluence n’a pas dépassé les 30 %. Ici comme dans les autres centres de vote de Bourj Hammoud, c’est le Tachnag qui contrôle la situation. Chant, portant le T-Shirt du parti flanqué de la carte du Liban, indique : « Vous voulez savoir pourquoi nous votons pour le candidat du CPL ? C’est parce que le parti nous l’a demandé. Si le Tachnag nous demande de voter pour une baguette en bois, nous le ferons. » D’autres se plaignent que « rares sont les jeunes Arméniens qui ont voté », que « beaucoup sont en voyage »… Les scrutateurs du Henchag, parti qui soutient les Forces du 14 Mars, préfèrent parler aux journalistes quand ils sont seuls. Ils affirment que le Tachnag est désormais divisé, un groupe ayant fait scission pour créer le Mouvement des Arméniens libres. Jacques S. Yergat, membre de ce nouveau mouvement, indique qu’il y a beaucoup d’Arméniens qui œuvrent pour une idéologie démocratique et un pluralisme politique. « Nous incarnons le courant souverainiste au sein de la communauté arménienne », dit-il. Marlène, une partisane du mouvement, arrive au siège. Elle est hors de ses gonds. « À l’école des 40 martyrs, un inconnu a voté à la place d’un électeur. Ce dernier était en voyage, il n’avait pas voté depuis longtemps. Il s’est présenté au bureau de vote pour constater que quelqu’un avait voté et a signé à sa place », dit-elle. L’homme en question s’en est plaint au Mouvement et une plainte a été déposée à la gendarmerie. Marlène donne des détails, le nom de l’homme, son âge, et lit le procès-verbal de la gendarmerie. Rabieh, le domicile du général Aoun : le chef du CPL vit dans un bunker. Les identités de ceux qui entrent dans le périmètre de sécurité de la résidence sont méticuleusement vérifiées. Tous ceux qui viennent chez le général sont minutieusement fouillés. À 17 heures 30 hier, la maison du général était calme, on n’entendait aucun klaxon dans les parages. « Les supporters font la fête dans la rue. Ils n’ont pas à se présenter à la résidence », indiquent les gardes. Mireille Hachem, la fille du général Aoun, indique qu’elle « a effectué son devoir » en votant à Aïn Saadé pour son père. Interrogée sur les pronostics, elle note : « On entend des choses contradictoires… ». « Ceux qui ont voté pour Camille Khoury sont des convaincus », conclut-elle. Tard dans la soirée d’hier on n’était toujours pas fixés sur les résultats officiels de la partielle du Metn-Nord, où l’histoire semble se répéter, ou presque…Mais, avec la différence que certains acteurs ont changé de camp…
Deux véhicules provoquent l’embouteillage dans la rue d’un village du Haut-Metn. Dans l’une d’elles, des jeunes portent des étendards des Kataëb et des Forces libanaises. Sur les vitres du véhicule, des portraits d’Amine et de Pierre Gemayel. Dans l’autre voiture, un jeune homme, vêtu d’orange et portant le brassard rouge, noir et blanc du Parti syrien national social (PSNS)...