Rechercher
Rechercher

Actualités - CHRONOLOGIE

CONCERT - Hommage à Zaki Nassif à l’Assembly Hall (AUB) «Baladi habibi»: quand la chanson vole au chevet d’un pays meurtri…

Un public survolté pour une salle archicomble à l’Assembly Hall (AUB). Sous l’immense chapiteau en bois officiait maestro Walid Gholmieh en dirigeant sur scène, devant les tuyaux argentés des grands orgues, l’Orchestre national pour la musique orientale et la chorale du Conservatoire national supérieur de musique. Au menu, d’une extrême concision mais aussi d’une extrême richesse, le nom d’un seul compositeur, un musicien au souvenir impérissable dont les refrains sont sur toutes les lèvres: Zaki Nassif. L’homme qui est dans le cœur de tous les Libanais… Sous le titre bien émouvant et chatouillant le nationalisme de tous bords, Baladi habibi, d’ailleurs emprunté à l’une de ses ritournelles, ont retenti, entre musique et chant, une vingtaine de ses chansons. Toujours aussi belles, fraîches, aimables, tendres et souriantes… Hommage et souvenir pour celui qui galvanise encore les foules avec son fracassant succès Rajeh yetaamaar loubnan… Oui Rajeh yetaamaar loubanan, on y croit ferme, malgré tous les déboires, les coups de massue sur la tête, les coups de Jarnac dans le dos, les trognes en pleine face, les claques plein la figure….On y croit ferme, comme un aveugle à la lumière, à ce refrain vengeur Rajeh yetaamaar loubanan… À tel point qu’en fredonnant cet air qui a ponctué la guerre, comme un radieux sourire à travers des larmes amères, on en vient à oublier la réalité, la très triste réalité… Cette renaissance (mythe inaccessible?) qui tarde à venir et qu’on chante avec Zaki Nassif, dans l’euphorie et l’exaltation, comme un cri d’utopique ralliement, à chaque dérive, à chaque folie, à chaque stridence, à chaque éclat irrépressible, à chaque incompréhensible destruction, à chaque jour noir, à chaque déclaration incendiaire, à chaque débandade… Né en 1916 à Machghara, dans la Békaa, et décédé en 2004, Zaki Nassif a vécu les grands événements du pays du Cèdre. Les moments charnières les plus glorieux comme les plus angoissants, les plus héroïques comme les plus chaotiques. De l’azur de l’espoir aux noirceurs de l’enfer, la nuance des couleurs n’a jamais manqué à ce compositeur qui a vite compris l’importance de l’alliance heureuse du verbe, du rythme et de la mélodie… Des centaines d’œuvres musicales… Du mandat français à l’indépendance et jusqu’à la guerre dont les étapes tirent en longueur, la vie de Zakki Nassif a été à la fois témoin, acteur inspiré des grands maillons qui cimentent une vie humaine s’étendant sur presque un siècle. Un compositeur qui a fait ses études musicales (vers 1936) à l’AUB, surtout avec la communauté russe installée au Liban, notamment la famille Kouguel. Un homme qui a laissé derrière lui des centaines de compositions musicales, d’une absolue authenticité, profondément «baladi», qui voyait en chaleureuses images sonores locales tout ce qui lui restait de gracieux et de bon de son village natal… Images simples pour un ruban soyeux de notes satinées, douces, aériennes, enchanteresses. Du vrai sang neuf dans la musique libanaise. Malgré les vicissitudes de la vie, car Zaki Nassif est issu d’une famille commerçante et a connu les tracas du «business», le monde de l’art est celui auquel appartenait, de toute évidence, cet homme habité par les sons, le chant, la danse populaire. Avec Radio Orient commence une nouvelle carrière et son nom est associé à ceux qui ont fait la musique libanaise, c’est-à-dire Toufic el-Bacha, Philémon Wehbé, Assi et Mansour Rahbani et Walid Gholmieh. Et les voix de Wadih el-Safi, Nasri Chamseddine et Sabah furent les premières à porter ce message de plaisir et de rêve merveilleux à travers une chanson tout en scintillements et volutes satinées… Puis solo absolu dans sa carrière d’artiste à partir de 1965. C’est à cette période que naît ce «tube» dont les ondes de choc vibrent avec force encore «Rajeh yetaamaar loubanan»… Vision et espoir pour un peuple libanais ployant sous les malheurs, des malheurs que Sisyphe même ne songerait pas à porter et reporter indéfiniment comme une insoutenable image d’Épinal… Une chanson qui a pulvérisé le box-office et qui se positionne juste après l’hymne national libanais. Une chanson, tout en tonalités de lendemains qui chantent, qui vient, comme une mère aimante ou un frère secourable, au chevet d’un pays meurtri. Des hommages ont été rendus dès lors à Zaki Nassif, et ce n’est que justice. En tête de liste viennent la contribution et le soutien de la LBC. Parler de Zaki Nassif? «Non», comme le souligne Walid Gholmieh, le mieux c’est d’écouter sa musique, sa belle musique parfumée au thym et au romarin de nos montagnes. Une musique qui dispense joie et bonheur. C’est, bien entendu, dans une délirante «standing ovation» que s’est terminé le concert avec l’incontournable, imbattable et «dynamite» Rajeh yetaamaar loubnan. Cela donne du tonus, de la vitamine, de l’énergie à revendre, mais surtout, même si cela n’est pas fondé, même pour les plus échaudés, un espoir fou… Edgar DAVIDIAN

Un public survolté pour une salle archicomble à l’Assembly Hall (AUB). Sous l’immense chapiteau en bois officiait maestro Walid Gholmieh en dirigeant sur scène, devant les tuyaux argentés des grands orgues, l’Orchestre national pour la musique orientale et la chorale du Conservatoire national supérieur de musique. Au menu, d’une extrême concision mais aussi d’une extrême...