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Actualités - OPINION

Faut-il tuer Baudelaire ?

Le Hezbollah étale sa force. Et il est fort, militairement, encadré dans une organisation sans faille et mobilisant à tout bout de champ. Il montre néanmoins une insuffisance, une épine qui le ronge de l’intérieur, psychologiquement, une fissure, comme une maladie incurable : sa hantise de la modernité. Il est parvenu, par sa contre-révolution, à dilapider en un temps record toutes les semences du Printemps et il étouffe, par la voix de ses prédicateurs, Nabil Kaouk et aujourd’hui Fathi Yakan, ce qui lui fait le plus peur, les pensées individuelles. Qui lui sont perméables et donc redoutables, parce qu’il ne peut s’y opposer, malgré toute sa mécanique des rassemblements de masse et tout l’arsenal du monde. Le Liban du Hezb n’a ainsi besoin que d’une pensée unique, dirigée contre l’Occident et sa civilisation née de la Renaissance, des Lumières, des droits de l’homme et de la démocratie constitutionnelle. Dirigée contre Le Caravage, Velasquez, Dante et Baudelaire…Contre Édith Piaf, Greta Garbo ou Sharon Stone. Contre la cravate, le jean, le chapeau melon ou le béret écossais, les spaghettis ou la soupe à l’oignon. « Mort à l’Ouest ! » scandait Naïm Kassem, suivi, non sans un petit écart, par le discours hors sujet, qui résonnait d’ailleurs comme une fausse note, de Michel Aoun sur la laïcité, encore une idée importée de l’Occident. Je voulais uniquement m’assurer que Naïm Kassem (qui n’a sans doute jamais lu les écrits d’Ibn Khaldoun sur l’Occident et les travaux sur l’orientalisme, ou l’Occident puisant sa culture de l’Orient ancien) sache, du fond du bunker où il réside et qu’il cherche à bâtir dans les esprits, qu’il est encore des hommes, dans un Liban, même en lambeaux, même vidé de son sang, qui ne veulent pas tuer Salmane Rushdie, comme l’a voulu Hassan Nasrallah, qui ne veulent pas tuer Rimbaud, qui ne veulent tuer aucune culture et surtout qui ne veulent pas tuer Tarik Ramadan ou d’autres dont ils ne partagent pas les idées et les moyens. Et que nous devons, quoi qu’il en coûte de le dire, Deir Yassine, Jenine, Cana et Beit Hanoun hier, après Guernica et le Goulag, à la bêtise des hommes, à leur impulsion violente et plus que tout à la bêtise des hommes diaboliquement orchestrée et organisée par l’idéologie, la civilisation, même venue de l’Occident, n’y est pour rien. En continuant de couvrir politiquement un tel discours, en dépit de toutes les rancœurs à l’encontre de Joumblatt et Saad Hariri parce qu’ils lui ont refusé Baabda, Michel Aoun risquerait non seulement de tuer Charlie Chaplin, mais de se retrouver en face du personnage que jouait Chaplin, avec son globe, dans le Dictateur. Un demi-siècle après la Shoah, alors que l’on croyait nos sociétés guéries de la tentation totalitaire, une nouvelle bêtise est née. Elle s’appelle le négationnisme d’Ahmadinejad. Amine ASSOUAD
Le Hezbollah étale sa force. Et il est fort, militairement, encadré dans une organisation sans faille et mobilisant à tout bout de champ. Il montre néanmoins une insuffisance, une épine qui le ronge de l’intérieur, psychologiquement, une fissure, comme une maladie incurable : sa hantise de la modernité. Il est parvenu, par sa contre-révolution, à dilapider en un temps...