Rechercher
Rechercher

Actualités - REPORTAGE

REPORTAGE Ana Belga, fille soldat mozambicaine, rattrape les années perdues

À 11 ans, Ana Belga a été enrôlée de force et a servi de « femme » à un soldat durant la guerre civile mozambicaine ; devenue adulte à présent, elle se reconstruit en aidant d’anciens combattants et retourne en classe « pour rattraper les années perdues ». «Un jour, des soldats de la Renamo ont attaqué mon école. Quand ils ont commencé à tirer, nous nous sommes tous enfuis. Mais ils m’ont rattrapée ainsi que d’autres enfants », se souvient Ana Belga Angelo Napoleao, aujourd’hui âgée de 27 ans. La fillette est contrainte de se battre dans les rangs de la Résistance nationale mozambicaine (Renamo), la rébellion au régime marxiste du Front de libération du Mozambique (Frelimo) soutenue par le régime d’apartheid sud-africain. « Et puis j’ai dû vivre avec un soldat, lui servir de femme. Il avait 20 ans. Je n’étais pas préparée à ça », poursuit-elle, détournant pudiquement un regard embué de larmes. Selon le Fonds des Nations unies pour l’enfance (Unicef), les rebelles de la Renamo ont enrôlé près de 9 000 enfants, certains âgés de 6 ans seulement, durant les seize années d’une guerre (1976-1992) qui a dévasté cette ancienne colonie portugaise après l’indépendance, faisant près d’un million de morts. De nombreux enfants se trouvaient aussi dans l’armée gouvernementale ou dans les « milices populaires », forces paramilitaires dirigées par le Frelimo. À l’issue du conflit, il est apparu que plus d’un quart des quelque 90 000 soldats démobilisés avaient moins de 18 ans au moment de leur recrutement, dont 16 553 par les forces du Frelimo et 8 945 par la Renamo, selon l’Onumoz (force de maintien de la paix des Nations unies). Retrouver la liberté et les siens, une fois la guerre terminée, n’est pas toujours allé sans douleur. « Ça a été très difficile de m’en sortir. La famille avait peur de moi », lâche Ana. De surcroît, le père de ses deux filles de 3 et 4 ans l’a depuis laissée parce qu’elle était « plus forte que lui ». Mais n’étant pas du genre à se décourager, elle a repris l’école pour finir sa scolarité et « rattraper les années perdues afin de trouver un travail ». Pendant ce temps, ses filles l’attendent dans sa case de torchis d’un bidonville de Nampula (chef-lieu de la province du même nom à 2 000 km au nord de Maputo), qu’elle partage avec ses quatre frères et sœurs. La jeune femme donne aussi un coup de main à l’Association mozambicaine des démobilisés de guerre (Amodeg) qui aide à leur réinsertion. Si d’ex-soldats du Frelimo comme de la Renamo fréquentent son modeste bureau, Ana Belga n’y a jamais croisé celui auquel elle a servi de femme. « Je ne l’ai pas revu. Mais c’était loin d’ici. Tant mieux ! » Florence PANOUSSIAN (AFP)
À 11 ans, Ana Belga a été enrôlée de force et a servi de « femme » à un soldat durant la guerre civile mozambicaine ; devenue adulte à présent, elle se reconstruit en aidant d’anciens combattants et retourne en classe « pour rattraper les années perdues ».
«Un jour, des soldats de la Renamo ont attaqué mon école. Quand ils ont commencé à tirer, nous nous sommes...